Rap local : le rêve d'adolescence de ParkaOne
Musique

Rap local : le rêve d’adolescence de ParkaOne

Révélé grâce à ses battles sur la toile, le rappeur gatinois d’adoption montréalaise ParkaOne lance sa mixtape Eurodrop vol. 1.

Chaque semaine, cette chronique met en lumière l’oeuvre des rappeurs et des producteurs québécois les plus intéressants du moment. Au programme : entrevue, bons coups de la semaine et aperçu des prochains spectacles à voir.

Entrevue //

Eurodrop vol. 1 arrive environ un an après Petites bêtes, un premier EP à la signature musicale assez homogène et aux thématiques animalières assez originales. Cette fois, tu sembles avoir pris un peu plus de liberté dans tes choix artistiques. Qu’est-ce qui t’a guidé dans ta création?

Y’a énormément d’explorations, c’est vrai. C’est pour ça que je considère ça comme une mixtape, plus qu’un album. Ce sont toutes des tracks que j’ai faites pendant mon échange universitaire de 10 mois en Belgique. Chaque track est une rencontre avec un beatmaker, une occasion de connecter et de collaborer avec des artistes talentueux de là-bas, soit Velvet Sick, Luigi, Jan Ken, Taipan, Tony Merguez, Brudi der Lux, Sonj et .ph12. J’ai tout enregistré ça à mon retour à Montréal avec l’aide de mon bon ami EchoBoy.

Quelle couleur as-tu cherché à donner à la direction musicale? Quel a été le mot d’ordre avec les beatmakers que tu as rencontrés?

Je cherchais quelque chose de plus actuel que sur Petites bêtes. Et, ça tombe bien, car en Belgique, la scène rap est très contemporaine, très axée sur les tendances trap. Il y a beaucoup moins de rap old school qui joue là-bas qu’ici. 

Comment ton séjour a influencé tes textes?

Je parle beaucoup de voyage, mais surtout de musique à travers le voyage, de ce que ça m’apporte, de ce que ça me fait vivre de rencontrer tous ces gens-là. Je fais aussi des références précises à mon expérience belge, genre le fait que le weed est beaucoup moins bon et beaucoup plus coûteux là-bas. Je réagis aussi aux commentaires que j’ai reçus par rapport à mon accent québécois. 

Tu abordes aussi beaucoup ta réalité de rappeur au Québec, autant tes fortes ambitions que tes craintes. 

Ouais, c’est certain que, pendant que j’étais là-bas, je pensais aussi à quand j’allais revenir. Je considère ces chansons-là comme assez émotives, près de moi. Le rap, c’est mon rêve d’adolescence, et là tranquillement, je me rends compte des efforts que je dois mettre si je veux qu’il se réalise. Tout ça occasionne parfois des déceptions, des remises en questions. Quand je vois des super bons artistes performer dans des salles presque vides, je me dis que ça va peut-être m’arriver à moi aussi un jour. Si je finis pas par avoir l’attention du public que je m’étais imaginée, je ne sais pas si j’arriverai à continuer. J’espère que mon amour du rap sera assez fort et réel pour que je continue peu importe le retour que je reçois, mais je ne suis pas certain d’en être capable.

La plupart des gens qui te connaissent comme rappeur t’ont d’abord découvert comme battle rappeur, notamment dans les événements Rap Contenders et WordUP! Battles. Concrètement, qu’est-ce que ces expériences t’ont apporté?

De la confiance. Avant de faire les auditions WordUP! en mai 2017, j’avais juste une chanson de publiée sur mon Soundcloud. Personne me connaissait ou presque. Et, par la suite, j’ai commencé à avoir des vidéos de battles sur Youtube avec plus de 10 000 vues. Ça m’aide quand je me présente à des beatmakers, par exemple. C’est une super belle vitrine. 

En revanche, as-tu l’impression que cette implication assez intense t’a empêché de te concentrer plus rapidement sur tes projets musicaux?

Au début, quand j’enchainais beaucoup de battles, peut-être… Je me suis remis à enregistrer des chansons l’an dernier et, au départ, je dois avouer que j’étais un peu rouillé. En battle, tout est axé sur le ton et la performance. Et, en plus, j’ai un style assez éparpillé, très éclaté. Y’a fallu que je revienne à ma base, que je me remette à écrire des verses avec des rythmiques plus carrées. Ça a pas été si facile.

ParkaOne + Lodgicko – Bar Danse Entre-Nous (Montréal), 6 décembre (20h30)


La nouvelle de la semaine //

Les Francos de Montréal ont annoncé un concert bien spécial en vue de leur 32e édition, qui aura lieu en juin prochain. Afin de souligner les 10 ans de 4,99, album phare de la nouvelle garde du rap québécois, le festival montréalais offre à Alaclair Ensemble l’un des plus gros événements de sa carrière, c’est-à-dire un spectacle au MTelus, salle emblématique de la métropole qui a déjà accueilli plusieurs rappeurs comme Loud, Koriass, Dead Obies et 5sang14.

Soulignons aussi la confirmation d’une rumeur qui persistait depuis quelques mois : la signature d’un contrat entre Imposs et l’étiquette Joy Ride Records. Le vétéran rappeur fera paraître son troisième album solo au printemps 2020, et on pourra notamment y entendre une collaboration avec Rymz, Loud et White-B.


Le projet de la semaine //

Trois albums se démarquent cette semaine dans des sous-genres complètement différents.

D’abord, coup de cœur pour Mascara Tears du CJ Flemings. Après nous avoir livré le puissant Forever Wanted More en 2017, le rappeur anglo-montréalais y va d’une proposition plus accrocheuse aux influences R&B bien dosées, qui n’a rien à envier aux productions américaines du même genre.

Ensuite, saluons la qualité et l’audace du deuxième projet de Boskorgï, le bien nommé Jazz Pranksters. Formé des producteurs et multi-instrumentistes Thomas B. Martin et Antoine Bordeleau (notre collègue au VOIR d’ailleurs), le duo propose ici des ambiances funk, jazz et soul au groove prenant et aux rythmes inventifs.

Enfin, Raccoon évolue admirablement sur son premier album officiel Gentil pour un noir. Si la direction musicale manque légèrement de vision et d’audace, les textes, eux, s’avèrent plutôt bien ficelés, tandis que le flow et l’exécution du jeune rappeur frôlent la perfection.


La chanson de la semaine //

Alaclair Ensemble frappe un grand coup avec Mets du respect dans ton bac, chanson financée par la ville de Laval pour sensibiliser les gens sur l’importance de trier ses déchets. Phil Chagnon signe une impeccable réalisation pour le clip.

Mention à Rymz qui signe un retour réussi avec [youtube href= »https://www.youtube.com/watch?v=C8raFj0OMFM »]Cercueil[/youtube]. La chanson témoigne d’un habile contraste entre le flow acéré du rappeur, et l’ambiance musicale sombre et mélancolique de Farfadet.


L’instru de la semaine //

Les producteurs DJ Manifest et Lowpocus déploient l’attirail funk pour ce remix très réussi de TODO List, chanson de KNLO avec Steve Beezy.


Le clip de la semaine //

Sac de sport est le vidéo souvenir d’un séjour new-yorkais express de Lary Kidd et Loud. Signée par le duo montréalais Dan + Pag, la réalisation s’avère dynamique et efficace.

[youtube]k2M2EIwe7fc[/youtube]


Les spectacles à voir //

Vendou, Jacobus et Valaire ★ NDLP

Le gentil rappeur Vendou sera du festival Noël dans le parc en compagnie du groupe électro Valaire et du rappeur acadien Jacobus.

Jardins Gamelin (Montréal), 7 décembre (19h)

Loud

Après le Centre Bell, Loud se prépare à fouler les planches du Centre Vidéotron dans la capitale. Son fidèle acolyte Lary Kidd assurera la première partie.

Centre Vidéotron (Québec), 7 décembre (21h)

Of Course / De.Ville

Tout juste récipiendaire d’un Lucien dans la catégorie de l’album/EP world de l’année, le duo De.Ville proposera son habile et ingénieux alliage de trap, d’électro, de funk et de raï (pour ne nommer que quelques-uns de leurs styles) aux côtés du duo Of Course.

Quai des brumes (Montréal), 6 décembre (21h30)