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Volera volera pas, la fabuleuse baloune?

Mouais. Je ne sais pas quel sera le jugement de la population pour la Nouvelle Fabuleuse, mais je n'ai pas été ébloui. Bien sûr, c'est toujours aussi impressionnant de voir l'énergie que mettent tous ces bénévoles dans la mise en place de ce pachiderme scénique. Mais on voulait une Nouvelle Fabuleuse… Est-on servi?

On a tellement gonflé la baloune de cette renaissance que cette fois on se demande si elle s'envolera, comme prévu, ou si elle éclatera. Avec tout l'argent investi (1 550 000$), avec toute la publicité faite autour de l'événement (qui ne sait pas qu'il y a mille nouveaux costumes?), on a tous les yeux rivés à cette baloune gonflée à bloc. Avouez. Vous voulez savoir si on se pète la fiole ou si on s'envole à nouveau…

Ce n'est pas une nouvelle fabuleuse. Tout au plus on l'a rafistolée pour qu'elle tienne un peu mieux et on a shiné le tout. Ça brille. Nouveaux costumes, nouveaux décors… Le problème, c'est que les moments les plus marquants sont toujours les mêmes, si bien qu'on a presque l'impression, en sortant, d'avoir vu le même spectacle.

C'est pourtant faux. Il y a eu des ajustements importants. Sur le plan de la narration, le personnage homérique de Michel Marc Bouchard fait la job, donnant à toute la trame une consistance que les courtes apparitions de Jos Maquillon ne permettaient pas, auparavant. Les choix qui ont été faits, aussi, par le dramaturge (ou scénariste, peu importe) sont sans contredit judicieux. Le personnage de Mishpuan, qui représente allégoriquement la présence amérindienne sur le territoire, permet un juste correction historique. L'Amérindien n'est plus simplement un monstre de foire à plumes, mais un acteur important dans l'histoire régionale – toujours pas assez, j'imagine, pour les puristes, mais c'est un effort qui mérite d'être souligné. En cela, c'est une belle coïncidence que la première ait eu lieu la journée même où des Amérindiens de partout au pays manifestaient leur désir d'une meilleure reconnaissance… Aussi, les quelques tableaux qui s'ajoutent pour présenter des pans de l'histoire du Lac-Saint-Jean sont tout à fait pertinents. C'est un juste retour des choses pour tous ces gens qui contribuent aussi à la consolidation du Royaume.

Là où le bât blesse – heureusement, ce sont des choses qui devraient pouvoir être réglées – c'est que le spectacle manque énormément de rodage. D'abord, la musique – qui par ailleurs est d'une qualité qui ne se compare même pas avec les tribulations synthétiques de la première trame sonore construite à l'emporte-pièce – est souvent trop forte pour la narration dont on perd la fermeture des phrases. À cela s'ajoute la fâcheuse tendance du comédien de Flo qui semble bien décidé à s'ouvrir les tripes sur scène – ce qui se traduit trop souvent par des cris inutiles, voire agressants. Mettons ça sur le dos du trac de la Première, et laissons le se rappeler qu'il a un micro à son col. Enfin, la difficulté majeure du croisement entre la narration préenregistrée et le jeu en direct, soit le synchronisme, n'a pas pu être évitée hier soir. Des chevauchements fâcheux ont eu lieu, et il est sans aucun doute très difficile de corriger un trou de mémoire lorsque la narration, elle, continue… Mais voilà, tout ça n'est que retouches – sans doute doivent-elles être mises sur le dos de la pression énorme qu'il y avait sur les épaules de chacun, hier soir, comédiens, figurants, techniciens et alouette – et devrait déjà pouvoir être corrigé lors des prochaines représentations.

Fait important à noter… Michel Marc Bouchard revient avec force sur le spectre de cet autobus qui amène nos jeunes vers les contrées lointaines – ah, cette métropole… Alors que plusieurs s'exclament déjà depuis un bon moment que les gens de la région ne veulent plus en entendre parler… Si quelque chose dérange la population régionale, ce sera probablement cette image douloureuse. Pourtant, si c'est un peu "baveux" de sa part (ce sont ses propres mots), il laisse tout de même les spectateurs sur un message d'espoir: si les jeunes quittent, c'est peut-être pour mieux revenir avec dans leur bagage toutes ces expériences qui ne pourront qu'enrichir la région.

Disons que son propre chemin de vie donne beaucoup de poids au message.