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Cet artiSSe produit

Dans un article d’Isabelle Labrie, paru dimanche dernier dans la section Les Arts du Progrès-Dimanche, on cite gros comme ça Myriam Dubois qui, avec Martin Thibeault, crée des murales et des vitrines pour les commerces et restaurants. Elle aurait déploré le fait de devoir «lutter contre les préjugés qui ont cours au sujet des artistes»:

«Quand on les approche, les clients potentiels ont tendance à être méfiants. Ils croient souvent que nous ne sommes pas fiables. Et pourtant, il y a des artistes vaillants qui veulent vivre de leur art. Il faut lutter contre cette réputation en plus de vendre notre produit.»

Je ne remets pas en question qu’il y ait un volet créatif au travail de Dubois et Thibeault. L’art mural, au même titre que l’art paysagiste, l’art culinaire ou l’art oratoire, commande une certaine finesse de l’exécution. L’article de Labrie réussit d’ailleurs sans contredit à convaincre du sérieux de leur démarche de production. Là où je décroche, c’est lorsqu’on s’oppose aux autres artistes, qui évidemment nuisent à leur réputation, puisqu’ils ne sont pas aussi «vaillants», et ne veulent pas véritablement «vivre de leur art».
J’ai des petites nouvelles pour vous. Des artistes sérieux qui veulent vivre de leur art, qui travaillent d’arrache-pied pour réussir à subvenir à leurs besoins, qui dépensent toute leur énergie à bosser jour et nuit, parfois au détriment de leur santé ou de leur famille, j’en rencontre à toutes les semaines.
Si justement un préjugé subsiste à propos de la «vaillance» des artistes, c’est parce qu’il y a des gens qui le colportent. Blanchir sa réputation au détriment de celle des «autres artistes», c’est justement le propager.
Ce qui définit un véritable artiste, ce n’est pas son aptitude à l’effort, ni son sérieux, même si c’est fortement lié au reste. Et ce n'est surtout en terme de production qu'on peut l'évaluer. C’est plutôt de l’ordre d’une motivation intrinsèque, d’une démarche créatrice en progression, sans cesse remise en question, d’une réflexion sur sa propre pratique.