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Critique: Les Immondes

Vicky Côté surplombe les trois comédiens, Sara Moisan, Patrick Simard et Caroline Tremblay sur cette photo de Jessyka Maltais-Jean.Il ne reste plus que quelques jours (jusqu'au 30 mars) pour assister à la pièce Les Immondes, conçue et mise en scène par Vicky Côté, avec Caroline Tremblay, Sara Moisan et Patrick Simard.

S'inscrivant en continuité avec une démarche artistique particulièrement bien déployée par Vicky Côté au cours des dernières années, Les Immondes place le spectateur devant un univers de peu de mots, où le corps et le faciès deviennent les transits de presque toute communication. Le choix des comédiens s'avère particulièrement judicieux dans les circonstances, car un jeu à ce point corporel demande une maîtrise qui n'est pas donnée à tous. Moisan avait d'ailleurs déjà fait ses preuves à ce titre dans la pièce Le Festin, présentée par la Rubrique en janvier 2006. Patrick Simard a quant à lui un jeu particulièrement physique qui ne renie pas non plus ses dernières participations (je pense au Capitaine Fracasse des Têtes Heureuses, et à sa participation presque animale dans Le Passage des éphémères).

La pièce commence avec force, déployant un univers propre à la conceptrice, qu'on pourrait situer quelque part entre Beckett, Tom Waits et Walt Disney. Si le spectacle est inégal, d'autres moments forts se produiront, qui eux-mêmes valent le détour – je pense à la séduction, le désir, le viol (superbe performance des trois comédiens dans ce tableau; agressivité, soufffrance et cécité volontaire, tout y était…) L'utilisation des costumes – dont je ne révèlerai pas la démesure – est aussi franchement intéressante en regard du thème de la pièce (la solidarité).

Dans un rapport qui donne souvent l'impression de se dérouler dans une cour d'école, Caroline Tremblay joue la recluse avec brio, alors que les deux autres incarnent une méchanceté toute enfantine. 

Petite réserve, puisque rien n'est parfait. À mesure que s'enchaînent les tableaux, les personnages se précisent et viennent à perdre leur nuance du départ. Les scènes collent de plus en plus à la réalité (scènes de bars un peu clichées, par exemple) – à moins que ce ne soit le spectateur qui en vienne à mieux comprendre le langage clownesque des Immondes. Clownesque parce que souvent exagéré au point où tout geste devient univoque, misant sur l'humour plutôt que sur l'intelligence du spectateur.

Il faut toutefois admettre que Côté réussit son pari. Malgré une économie de texte particulièrement impressionnante (à peine quelques phrases seront dites pendant la représentation), les comédiens arrivent à se faire comprendre sans détour par leur jeu de corps et d'onomatopées. Et malgré cela, on aura donné à voir toute l'ampleur de l'incompréhensible manque de cohésion et de solidarité de notre société, voire de l'humanité.  

À la salle Murdock, jusqu'au 30 mars (698.3210)