Voilà ce qui émerge des brumes de ma boule de cristal. S'il y avait quelque part un colporteur de lucidité, il faudrait qu'il aille faire un tour chez les chefs et partisans des différents partis fédéraux – ainsi que chez certains analystes qui se contentent de nous rabacher les oreilles avec des évidences.
D'abord, le BQ. Gilles Duceppe peut bien se flatter la bedaine en vantant les mérites du Bloc, sans lequel, selon lui, le Parti Conservateur serait majoritaire… Mais c'est d'une incohérence patente. D'un côté, il affirme que ses électeurs ont choisi le Bloc parce qu'ils sont en désaccord total avec les valeurs du Parti Conservateur. Mais le Bloc est-il le seul à l'opposé de l'échiquier électoral? Voyons donc. Si ce n'était du Bloc, les partis Libéral et NPD auraient ratissé plus large, tout simplement. Et qui sait, peut-être le parti vert aurait-il poussé comme un champignon dans une circonscription du Québec. Mais le Parti Conservateur n'aurait pas eu plus de chance – en tout cas si c'est vraiment une question de valeur.
Surtout, manque de lucidité du côté Libéral. Je ne peux pas croire que personne ne l'ait dit encore: Stéphane Dion était un chef mort-né. Déjà, lors de son élection à la tête des libéraux, tout le monde est tombé de sa chaise. C'était une mauvaise blague, une incongruité mathématique, un jeu du sort. Les bonzes du parti devaient avoir hâte en baptême que les élections arrivent pour que Dion se plante. Pas qu'il ne soit pas un homme d'honneur. Pas qu'il n'ait pas eu quelques idées valables. Pas qu'il n'ait pas assuré lors de l'accord de Montréal. Seulement… Dion est comme une crevette. C'est bin bon dans le beurre à l'ail, là où on s'attend à la trouver, dans son environnement de prédilection. Mais tu ne demandes pas à une crevette de diriger un banc de morues.
Quant au chef du NPD, Layton, c'est au moment du scrutin qu'il a eu son retour de lucidité. Lui qui disait croire qu'il pouvait devenir Premier Ministre. Ç'aurait été un véritable revirement; de la droite conservatrice au gauchisme du NPD: ayoye la dérape.
Le seul qui a été lucide dans toute cette histoire, incroyablement lucide, même s'il a joué gros, c'est Harper. Quel stratège incroyable. Il a eu beau nous annoncer les pires décisions à venir (culture, jeunes contrevenants, etc.), il savait bien que même s'il avait un nouveau gouvernement minoritaire, il aurait le champ libre pour imposer sa (ses) loi(s). Et voilà pourquoi il déclencha ces élections. Pas parce qu'il pensait qu'il serait majoritaire – il l'a d'ailleurs mentionné clairement – mais parce qu'il savait que ce serait plus facile, juste après une élection impopulaire, de faire avaler quelques couleuvres à l'opposition – et au Québec.
Maintenant qu'on voit clair, mangeons des couleuvres.
Le 15 octobre 2008
Objet: lendemain d’élection
Cher Monsieur Caron,
Maintenant, qui – selon votre boule de cristal – pourra nous sortir des griffes de Gargamel? Quand le Grand Schtroumpf viendra-t-il enfin à notre rescousse? Azraël nous bouffera-t-il avant?
Signé: un petit schtroumpf inquiet