Excellent papier dans le Figaro de Sébastien Lapaque – du moins une amorce fort bien écrite – à propos de ces auteurs qui se foutent carrément d'avoir l'air gentil.
M'est avis que c'est une question qui peut se poser dans la propension universelle de la littérature, mais qui ne s'applique pas dans le microcosme culturel de notre région. Au Saguenay, quand on n'est pas gentils, on ne fait pas long feu.
Le plus étrange, c'est d'entendre un type comme Jean-Rock Gaudreault (qui signe Une maison face au Nord) affirmer à la radio (l'émission de Paule Therrien) que les gens d'ici ont l'authenticité de dire ce qu'ils pensent, quitte à devoir s'excuser par la suite. Je ne sais pas dans quelle région il est né, mais je ne connais pas le même Saguenay. Ici, si on mord même avec beaucoup d'amour (tut-tut-tut, ne fantasmez pas tant), on en subit rapidement les conséquences. Suffit d'en parler à Dario Larouche dont les critiques théâtrales sur Les Clapotis d'un yoyo lui ont coûté quelques mauvais moments…
Je subis d'ailleurs encore les contrecoups de quelques-unes de mes chroniques. Ce n'est jamais très clair. Ce n'est pas la méthode Sarkozy, au contraire… Ça se transforme en indifférence contrôlée. Parce que quoi qu'en dise Gaudreault, dans la région, on préfère souvent se taire plutôt que de dire des choses qu'on pourrait regretter.
Personnellement, je crois M. Caron que certaines de vos envolées politiques, vous ont valu des critiques pour le moins un peu dures. Tout est politique en ce bas monde, et je ne vois pas pourquoi le grand monde de la culture ne serait pas politisé lui aussi.
Pour ce qui est de la gentillesse, si elle est accompagnée d’un caractère fonceur, dont on connait tout de suite les limites, les chances de survie sont assurées, mais elle demeure toutefois accessoire.
Bien que n’étant pas natif du Saguenay, je n’ai pas beaucoup de difficulté à comprendre les dynamiques sociales, même si je dois admettre que beaucoup de choses ont changé depuis mon arrivée. La langue de bois est très présente, car on peut toujours être en présence d’un cousin éloigné, d’un ami ou d’un commerçant qui nous refusera une faveur plus tard, face à un commentaire défavorable sur quoi que ce soit.
La coupure sociale (indifférence contrôlée) que vous exprimez si bien, survient sans crier gare et on ne sait pour quelle raison. Par exemple, notre journal régional, refuse systématiquement tous mes textes, mes opinions, considérant les libres penseurs de la cybercommunauté, comme une menace à leur métro-boulot-dodo.
Pourtant, les gens ont des opinions, vont au théâtre, lisent des livres et sont abonnés à leus journaux!
Heureusement, les travers chauvins de la vieille garde tendent à disparaître et avec eux, tout un paquet de mythes, plus farfelus les uns que les autres. Se taire, en faisant une profession de foi au sentiment d’appartenance à la région, c’est se mentir à soi-même et ça, ce n’est pas gentil du tout. Les jeunes de cette région ont tendance à exprimer bien fort ce qu’ils pensent, sans se laisser influencer par les mythes d’une société de commerçants parvenus, ou par les conversations de garage.
Je préfère être de ce côté…