Salut la Terre,
tout d’abord, tu dois me trouver un peu hippie sur les bords de t’écrire une lettre. Aussi, comme tu l’as remarqué, je me permets de te tutoyer et ça n’a juste pas de sens. Mais bon, j’imagine que tu sais plus de choses que moi, donc par extension, je présume que tu as des notions en stylistique et que tu comprends ma démarche.
Si je prends le temps de t’écrire en ce 22 avril, c’est par amitié. Tsé, dans la vie, on reconnaît nos vrais amis à ceux qui ont le courage de te mettre en garde et de te le dire quand ça dérape. Là, ne vas surtout pas penser que mon but est de te casser ton fun après la superbe journée que tu viens de passer. C’est juste que je voulais mettre une petite chose au clair avec toi. Parce que là, vite de même, j’ai l’impression que personne ne t’en a encore parlé pis je trouverais ça plate que tu l’apprennes par l’intermédiaire de Richard Martineau genre.
Vois-tu, on ne se le cachera pas, on pourra dire que le 22 avril 2012 a vraiment été un de tes 15 minutes de gloire. Du moins, ici au Québec. Tu l’as peut-être pas remarqué mais en plus des 300 000 personnes qui sont venues te faire un massage thérapeutique à Montréal, on a été près d’une quarantaine d’autres groupes de masseurs partout dans la province. Dans mon cas, j’ignore sur quelle zone de ton anatomie Alma a de l’effet mais on était quand même plus de 200 à être au rendez-vous. J’en conviens, ce sont des poussières si on compare avec Montréal mais peut-être que ça a quand même permis de te débloquer un nerf à quelque part. Tant mieux, si c’est le cas.
Maintenant, j’essaie de me mettre à ta place et je me dis que ça a dû être déroutant pour toi comme journée. Tsé, quand on y pense, l’humanité passe l’année à te scrapper, à t’étouffer pis à te transformer en une espèce de version géante du nez de Michael Jackson pis là, hop, tout d’un coup, on est une grosse gang à t’organiser un événement et à te répéter qu’on veut tous ton bien. D’ailleurs, j’en profiterai pour te féliciter de tenir le coup après toutes ces années. Non mais quiconque se ferait malmener comme ça pendant juste trois mois finirait par sauter un plomb et à se ramasser nu et confus dans la rue à marmonner « Qu’a bu l’âne au quai, l’âne a bu l’eau ». Pis toi, tu endures tout ça comme un patron. C’est pas rien. Chapeau.
Bref, compte tenu de tout ça, tu as certainement passé quelques heures aujourd’hui à te demander qu’est-ce que tu avais bien pu faire pour retrouver la cote comme ça. Et c’est justement là qu’en bon ami que je suis, j’ai la délicate tâche de remettre une ou deux timex à l’heure.
Premièrement, je crois qu’il est important de te prévenir de ne surtout pas t’enfler la tête avec le rassemblement historique d’aujourd’hui à Montréal. Oui c’est grisant et tout le monde t’aime bien mais pour être polie, disons que ta fête a vraiment ben adonné. C’est comme si je mourais demain pis que pour mes funérailles, ma blonde réussissait à faire venir chanter Neil Young.
L’affaire, c’est que la marde est pognée solide au Québec depuis un bout. Pendant longtemps, c’était encore possible de trouver une direction par où regarder afin de ne rien voir mais là, faut pratiquement être crétin pour ne pas s’en rendre compte. Donc comme le Québec est un morceau de toi, fais le calcul et tu déduiras que ton jour, le Jour de la Terre, avait aussi un petit côté neilyoungesque.
Je te dis ça parce qu’advenant que l’an prochain il y aurait moins de monde au rendez-vous, faudrait pas le prendre mal. Aussi, si jamais tu remarques que dans les prochaines semaines on t’accorde moins d’attention, ne tombe pas dans le piège de penser qu’on s’est servi de toi.
En tout cas, si jamais tu veux à tout prix que ton jour soit encore une réussite l’an prochain, va falloir user de quelques contacts. Aussi, je sais que tu serais tenté d’appeler Dominic Champagne pour ça mais si tu veux mon avis, tu devrais prendre directement arrangement avec celui qui s’est chargé de tout bien faire coïncider.
Et même si peu t’importe quant au succès de la prochaine édition de ton jour, ça serait la moindre des choses d’envoyer un petit remerciement au fameux gars dont je te parle. Mine de rien, ça faisait plusieurs mois qu’il se fendait le cul à créer l’atmosphère idéal pour ton jour et sans lui et son organisation, tu n’aurais jamais vécu un trip comme celui du 22 avril 2012.
Pour ton info, le gars s’appelle Jean Charest. Il est Premier Ministre du Québec.
Fais-lui donc juste un p’tit coucou en guise de remerciement.
Je suis certain qu’il serait ben content. Nous-autres aussi.
D’ailleurs, c’est-tu encore toi qui contrôle ça la foudre?
Espérant ne pas vous offusquer ce faisant, je me permets – en raison de cette vieille habitude ancrée chez moi, quelque chose remontant à mes toutes premières années ici sur Terre, et renforcée par ces petits livres traitant de bienséance si populaires au cours des années 1950 lors de mon enfance – je me permets donc de ne pas vous tutoyer, Monsieur Martel.
Les locuteurs anglophones n’ont pas cette possibilité d’être polis et doivent sans cesse faire dans la familiarité. Que celle-ci soit appropriée ou pas.
Évidemment, j’ai depuis longtemps compris, ou du moins cru comprendre, que vous avez entrepris de tutoyer à tout venant depuis quelques interventions (quoique en vous excusant de le faire à chaque fois) pour faire plus… hum… plus familier! Comme les anglophones, quoi…
Enfin, votre but n’est fort probablement pas de faire comme les anglophones en tutoyant à répétition, mais en bout de ligne, c’est tout comme.
Mais je ne vais pas vous retenir davantage. C’est en effet l’heure où je dois sortir au métro Côte Ste-Catherine chercher les journaux gratuits qu’on y distribue (Métro et 24H), jaser une minute ou deux avec les deux camelots du très mauvais temps que nous sert aujourd’hui la Terre, et rentrer pour ne plus ressortir de la journée.
Ah oui… une dernière chose, Monsieur Martel. Une toute petite chose, et c’est vous-même qui m’avez en quelque sorte ouvert la porte pour en faire mention, alors que vous écrivez «on reconnaît nos vrais amis à ceux qui ont le courage de te mettre en garde quand ça dérape».
Sans vraiment prétendre être de votre entourage proche de «vrais amis», encore moins de faire ici montre de «courage», et ne considérant pas que «ça dérape» à ce point, je vous suggère néanmoins de revenir au génie de notre langue française, celui qui permet autre chose que le «tu» de nos voisins anglophones.
Là-dessus, bonne journée! Moi, je cours car je suis en retard sur mon horaire…
claude!
« Les locuteurs anglophones n’ont pas cette possibilité d’être polis et doivent sans cesse faire dans la familiarité. »
as-tu déjà pensé qu’on peut utiliser ton raisonnement pour conclure que les anglais doivent sans cesse faire dans la politesse?
Quand on me vouvoie dans une conversation, j’ai souvent l’impression qu’on s’adresse à moi et à « ma gang », à moi et à tous ceux « de ma sorte ». Cela peut être ambigu et pas si poli, en fin de compte. Je préfère, et de loin, le clair et franc tutoiement.
Joel.
comme disait ma vieille mère:
» il y a différentes sortes de tutoiement et de vouvoiement… comme exemple, tu peux vouvoyer ton père ou ta mère : »allez chez le yable!! » et tutoyer ton père ou ta mère: « je t’aime beaucoup »…
Tout est dans le ton et la manière.
Joel,
Tu peux continuer à me tutoyer pcq – dans tes commentaires- tu es toujours respectueux ..
Si je dis TU à la Terre, c’est pour m’en rapprocher …
Si je dis TU à la vie, c’est pour m’en faire complice …
Si je dis TU à l’humain, c’est pour ne pas oublier que JE ne suis rien sans TOI …
L’univers ne forme qu’UN … dans un UN, tous sont égaux …
J’espère qu’UN marchera avec autant de détermination et d’espoir à chaque 22 avril de chaque année à venir …