Il y a deux jours, je publiais les mentions spéciales 2018 du petit – mais tellement grand – monde de la bière au Québec. Aujourd’hui, 31 décembre, c’est l’heure de tourner la page sur cette année avec cinq palmes (ça nage plus vite). Bien humblement, je vous présente les gagnants que je proclame, de façon arbitraire, dans les catégories «Révélation de l’année», «Microbrasserie à surveiller en 2019», «Hommage», «Microbrasserie de l’année» et «Bière de l’année». C’est comme un gala, mais dans ma tête…
Révélation de l’année : Brasserie Bas-Canada
Si les New England IPA (NEIPA) sont à la mode, ce ne sont pas toutes les brasseries qui arrivent à rendre hommage de façon spectaculaire à ce jeune style. La Brasserie Bas-Canada à Gatineau est celle qui a réussi à mieux synthétiser l’essence du style pour le foutre dans une canette. Leur HYPA, désormais déclinée en plus d’une dizaine de variantes (même recette, les houblons changent) est parfaite. Aromatique, sans être trop amère, trouble comme l’horizon d’un matin de smog, brillante, juste assez carbonatée… Et que dire de leur Los Tabarnacos, en mode milkshake, avec mangue et lactose. C’est du gros jus pour les adultes qui ont encore un cœur d’enfant. Je les aime d’un amour presque malsain!
Microbrasserie à surveiller en 2019 : Beauregard Brasserie Distillerie
Voilà déjà quelques semaines que Beauregard Brasserie Distillerie fait partie du paysage montréalais. Étrangement, c’est comme s’ils étaient là depuis des années. Ils sont arrivés sans faire trop de bruit, avec un plan d’affaires redoutable et des idées à faire saliver. À la base, ils ne veulent brasser que des bières noires. Vont-ils changer leur fusil d’épaule, un peu comme Vrooden (qui se spécialisait dans les bières d’inspiration allemande) qui ont rajusté le tir pour s’ajuster aux infaillibles lois du marché? Dans un cas comme dans l’autre, je veux être aux premières loges pour suivre l’aventure. Même en se limitant au «dark side» du monde de la bière, le spectre est assez large pour avoir du gros fun.
En plus des divers styles et déclinaisons qui existent, ils pourront s’amuser à barriquer certaines bières, ou même les fortifier. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit aussi d’une distillerie! «On brasse uniquement des Stouts et des Porters», raconte Jonathan Coutu, qui a lancé la brasserie avec son frère Sébastien. «On se fait dire à tous les jours que c’est une très petite niche et qu’on ne vendra rien en été… On croit que cette spécialisation et obsession pour la qualité nous donnent au contraire une pertinence sur la scène brassicole québécoise. Et on n’a pas fini de briser les conventions», conclut-il.
Hommage : Brasserie Dieu du Ciel!
Je n’ai pas le choix de souligner la belle année de Dieu du Ciel! La qualité et la stabilité de leurs produits me dépassent. Ils arrivent à demeurer des chefs de file sans se prêter au jeu des tendances. Ils embouteillent encore en 341ml (très peu de microbrasseries utilisent ce format), ils n’ont jamais mis de NEIPA en bouteille et ils se limitent à 2-3 nouveautés par année. Malgré ça, ils demeurent dans le top 5 de la plupart des amateurs qui suivent la scène brassicole québécoise de près. Faut le le faire!
Et que dire de leurs bières barriquées, toujours divines, parfois légendaires. Nous avons affaire à une brasserie de calibre international. Même si le Québec a franchi le cap des 200 microbrasseries en 2018, il ne faut pas oublier celles qui brillent depuis (presque) toujours. Soulignons au passage le 10e anniversaire de la brasserie de Saint-Jérôme qui a eu lieu cette année. Gloire à Dieu! Vous pouvez vous rasseoir…
Microbrasserie de l’année : Microbrasserie Le Castor
Quand tu sors une bonne bière une fois de temps en temps, c’est l’fun. Mais quand chaque truc que tu lances sur le marché est un gros coup, tu joues dans une autre ligue. Ol’ Keeper Ale, Islay, Saison Rayée, Saison Macérée (les deux versions), Pilsner, Wee Heavy Rhum et j’en passe! Ce sont là des bières qui pourraient toutes faire partie de mon top 25 de l’année. Mais puisque je ne ferai pas un tel palmarès, principalement par paresse, je déclare Le Castor Micro de l’année 2018.
Bière de l’année : ???
D’entrée de jeu, je dois spécifier que je gère un commerce qui tient plus de 1000 bières de microbrasseries québécoises. Il ne se passe pas une semaine sans qu’on me demande ma bière préférée dans le magasin. Le hic, c’est que ma bière favorite est circonstancielle. Elle varie avec le temps, l’humeur, la saison et les bonheurs éphémères. Parfois, je me sens comme un Claude Rajotte – qui possède plus de 15 000 CDs et 5 000 vinyles – à qui l’on demanderait son album préféré. Ça m’a donné l’idée de le contacter pour connaître son truc pour se sortir de l’impasse. «J’ai réglé le cas avec Revolver des Beatles», a-t-il répondu.
Alors c’est quoi le coup de Revolver brassicole de 2018, hein? Historiquement, cette année est celle qui a vu naître le plus de nouvelles bières dans l’histoire microbrassicole au Québec. Choisir une seule bière est une décision irrationnelle qui désavantage certains styles par rapport à d’autres. Une bonne Pils a généralement peu de chance contre un gros stout élevé en barriques de chêne. Une blanche exécutée à la perfection attire moins l’attention qu’une Double IPA, triplement houblonnée à cru, issue de la collaboration de deux brasseurs sur la brosse.
Alors je fais quoi moi? Je vais y aller égoïstement, avec celle qui me laisse le meilleur souvenir. J’ai eu la chance de boire une rarissime Nordet IPA d’Auval en Gaspésie, embouteillée depuis quelques heures seulement, directement dans le stationnement de la brasserie. C’est ÇA un plaisir circonstanciel. Est-ce que j’ai bu de meilleures bières dans des moments plus ordinaires? Probablement! Mais la dégustation d’une bonne bière passe par bien d’autres étapes que le simple fait de se verser une bouteille dans le dedans du corps. Et c’est sur ces sages paroles que je clos le débat.
Pour connaître les mentions spéciales, cliquez ici. Sinon, je donne la parole à quelques microbrasseries et détaillants par ici.
Micro de l’année Le Castor? Avec un recall sur leur bière c’est un peu bizarre de leur décerner ce titte avec une si grosse bourde.