Chez Victoire cuisine le terroir
De plus en plus de restaurants prennent soin de faire briller le terroir québécois en apprêtant les produits de son garde-manger. C’est le cas du resto Chez Victoire, situé sur le Plateau, qui a fait le pari de cuisiner dans la mesure du possible des aliments 100% locaux. Et pour bien mettre ces richesses de chez nous en valeur, quelques règles s’imposent.
Pour rehausser la saveur de la pièce de résistance d’un plat, il faut d’abord aller faire un tour dans la cour de l’animal. «Quand je travaille les produits du terroir, je pars surtout des protéines, que ce soit le canard du lac Brome ou le lapin de Stanstead, et j’essaie de respecter la façon dont l’animal a été nourri, ce qui se trouve dans son environnement», explique Alexandre Gosselin, chef cuisinier du restaurant.
Le canard sera donc accompagné de maïs, alors que les viandes rouges sauvages ou d’élevage comme le cerf partageront l’assiette avec des petits fruits rouges ou des camerises, petite baie de la couleur du bleuet. Le veau de Charlevoix, quant à lui, ira avec les champignons débordant de nos forêts québécoises. Cuisiner le terroir, c’est aussi respecter les saisons et créer à partir de ce qu’offre la nature.
«Les légumes et les fruits disparaissent peu à peu en ce moment, et c’est les légumes racines qui prennent le dessus. Mais je suis un fan de l’hiver pour les légumes racines. J’aime beaucoup les couleurs très monochromes et tout ce qui est «légumes terreux», qui apportent une texture lourde dans une assiette», indique le chef, qui se réjouit d’entrer dans la saison froide.
Expliquer la valeur des produits
L’hiver permet également de cuisiner des pièces de viande un peu moins nobles qui finissent bien souvent braisées, créant des plats plus chauds et réconfortants que ceux de l’été. Pour être certains d’avoir les produits dont ils ont besoin au moment opportun, certains chefs cuisiniers choisissent même d’acheter des parcelles de terre aux agriculteurs pour cultiver leurs propres légumes.
Selon Alexandre, n’importe quel cuisinier peut réussir la cuisson d’une viande ou d’un poisson d’ici. En fait, un plat délectable dépend surtout des accompagnements: «On maximise le goût avec une cuisson juste, mais le gros du travail a déjà été fait par le producteur. Après, c’est souvent les légumes ou la sauce, par exemple la camerise que tu rajoutes à l’intérieur, et pour les légumes, la façon dont ils sont transformés, qui font que ton plat est juste bon ou wow».
Si les clients apprécient la qualité et la fraîcheur des produits du terroir, certains se surprennent du prix en lien avec la portion servie. «Si c’est pas bien expliqué, les gens ne savent pas la valeur des produits, ou pourquoi par exemple il n’y a que trois pétoncles des Îles-de-la-Madeleine dans leur assiette. Certains plats sont fins. Il faut savoir tout ce qu’il y a derrière et qui justifie leur prix. Pour cela, les serveurs sont ma voix», raconte le chef.
Les producteurs, bien souvent seuls à tout organiser, travaillent fort pour exploiter les richesses du terroir et survivre au marché. Dans cette grande roue de la consommation, plus le consommateur exigera les produits d’ici, plus ces derniers seront abordables.
«C’est un risque à chaque fois: le produit coûte plus cher, et on ne sait jamais comment la clientèle va réagir. Mais il y a une fierté comme cuisinier à utiliser les produits québécois, et à penser, quand on se couche le soir, qu’on fait une différence…»
Chez Victoire
1453, avenue du Mont-Royal Est – Montréal
514 521-6789
chezvictoire.com