Une finale du FTA festive et sans complexes avec Gala, de Jérôme Bel
Couleurs, paillettes et danse décloisonnée : il n’y a pas meilleur moyen de conclure le Festival TransAmériques que ce Gala.
« Plus les individus sont uniques, plus la communauté qu’ils forment est forte. Plus vous serez vous-mêmes, plus vous respecterez les autres individus. » Voilà ce que nous disait le metteur en scène et chorégraphe Jérôme Bel en entrevue il y a quelques jours au sujet de son spectacle Gala, qui unit dans la danse un groupe de danseurs amateurs et quelques professsionnels : chaque fois un groupe différent créé dans chacune des villes où le spectacle s’arrête.
Le FTA se termine avec la deuxième représentation de la version montréalaise : le spectacle que nous avons vu dans un état d’exaltation particulier confirme les propos de l’artiste. 14 Montréalais, des touts jeunes comme des très vieux, des minces comme des gros, des grands et des petits, des Blancs et des Noirs, y dansent en toute liberté. Dans cette diversité des corps et des manières d’habiter l’espace se dégage fortement l’idée de collectif et se joue une ode au pluralisme et à l’humanité qui ne peut qu’être réjouissante. À Montréal, dansant sans complexes aux côtés d’un danseur principal des Ballets Jazz de Montréal (Alexander Hille) ou du spécialiste local du voguing (l’épatant Gerard Reyes), quelques comédiens (comme Mireille Metellus et Maxime D. Pomerleau) et de nombreux quidams ont pris la scène d’assaut pour conclure le FTA dans un parfum d’harmonie et d’utopie. Et ce , en costumes flos!
Il y a pourtant parfois matière à craindre, dans le travail de Jérôme Bel, une exposition de corps dits « singuliers » qui flirte avec certaines limites éthiques, rappelant à certains spectateurs le pire de l’époque des freak shows. Quand, dans le spectacle Disabled Theatre, il a brassé quelques tabous en mettant en scène des jeunes vivant avec une déficience intellectuelle, les alignant sur scène pour leur demander d’exécuter tour à tour un numéro personnel, nombreux furent les critiques et spectateurs à éprouver un malaise devant ce qui a pu être perçu comme un « étalage » de leur différence ou comme du voyeurisme malsain. J’ai vu ce spectacle au festival d’Avignon en 2012 et n’ai pas éprouvé personnellement ce malaise, l’analysant plutôt comme une oeuvre d’autofiction et d’autoreprésentation. Il est néanmoins vrai que, dans ce cas, la question se posait fortement.
Rien de tel dans ce Gala qui est avant tout une célébration de la diversité et du plaisir de la danse : une mise en relief de la nécessité profonde de s’exprimer librement par le corps.