Lucien Ratio : Ceci n'est pas un premier ministre
Scène

Lucien Ratio : Ceci n’est pas un premier ministre

En plein climat électoral automnal, l’acteur et auteur Lucien Ratio présente sa troisième pièce originale; un monologue décapant, tant politique que fantastique, qui construit sous nos yeux un personnage fictif beaucoup plus réel que tous les gouvernants actuels.

Passionné de politique, Lucien Ratio suit avec intérêt l’actualité depuis plusieurs années. Fort de cinq ans à l’écriture et à la mise en scène du Beu-Bye, revue de l’année présentée à La Bordée, il s’attaque maintenant aux politiciens, plus précisément à l’image que ceux-ci renvoient au public. «À la dernière élection fédérale, j’ai été frappé par la manière dont Justin Trudeau a gagné les élections et par sa campagne électorale. On entendait plus parler de ses bains de foule que des politiques de son parti», indique le dramaturge, citant cette fameuse balade dans un métro de sa circonscription pour remercier humblement ses électeurs. «Il le fait, mais il le filme et se sert de ça comme outil promotionnel. On dirait que ça efface toute la bonne action.»

Même si le premier ministre canadien lui aura servi de muse pour le projet, le détestable personnage qu’incarnera Lucien Ratio sur scène sera plutôt une créature cousue des pires travers de politiciens tels que Rob Ford, Sarkozy et, bien sûr, l’explosif Donald Trump. Pour fracasser l’image immaculée du parfait chef, Just In présente au public un être humain fondamentalement immoral qui serait tout de même à la tête d’un pays. «J’avais envie de faire un show l’fun et ludique. Le personnage est tellement gros, presque bouffon, que ça crée quelque chose de drôle.» Aussi grand amateur d’horreur, l’auteur décrit la pièce comme un conte fantastique un peu sombre, où on suivra le protagoniste lors de sa première journée de chef d’État, qui commence sur le plancher d’une chambre d’hôtel. Nu comme un vers, au lendemain d’une cuite dont il n’a aucun souvenir, le très honorable personnage tentera de reconstituer sa soirée, pendant que le public remontera plus loin, dans le passé décomposé, pour se remémorer le parcours surréaliste de cet antihéros imaginaire.

Courtoisie Lucien Ratio
Courtoisie Lucien Ratio

Jouer faux pour vrai
Entouré d’une solide équipe avec laquelle il a souvent travaillé, notamment Jocelyn Pelletier à la mise en scène et Millimetrik à la conception sonore, Lucien Ratio s’approprie la satire politique d’une nouvelle manière pour contrer le désintéressement citoyen. Cette pièce est aussi un appel à la vigilance inscrit stratégiquement dans un cadre théâtral. «Quand quelqu’un joue faux, je le vois. Et je pense qu’il y a beaucoup de monde qui le voit, insiste Ratio. Il faut faire attention parce que c’est pas quelqu’un de réel qui nous parle. C’est plusieurs personnes qui ont façonné un personnage pour obtenir notre vote, pour nous vendre quelque chose. Il ne faut pas qu’on l’oublie, parce que quand on oublie ça, on fait confiance aveuglément. Ce qu’on nous présente, c’est monté de toutes pièces.» Preuve que le théâtre et la politique ont parfois plus en commun qu’il n’y paraît. Après tout, c’est une matière que Justin Trudeau a déjà enseignée au secondaire.

Du 11 au 22 septembre
À Premier Acte