Cassandra’s Dream : Deux frères

Au Festival du film de Toronto, lors de la conférence de presse de Cassandra’s Dream, troisième film de Woody Allen tourné en Angleterre, le réalisateur new-yorkais a étonné les journalistes par sa modestie: "Je ne suis pas un cinéaste dévoué, je suis paresseux, je n’ai pas de patience pour tourner avec les acteurs, confiait cet admirateur de Bergman et de Pasolini. Sur le plateau, je veux seulement en finir et retourner chez moi."

Si le frêle et timide cinéaste déboulonne avec autant d’aisance sa propre statue, Ewan McGregor et Colin Farrell ne tarissent pas d’éloges à son endroit: "Woody Allen est une légende, relatait McGregor au cours d’une table ronde. J’avais entendu plein de trucs à propos de lui – qu’il ne s’adresse pas aux acteurs, ne se rappelle pas leur nom et qu’il ne les dirige pas. Comme j’aime beaucoup ses films, j’ai accepté le rôle et j’ai alors découvert qu’il n’était pas du tout comme le personnage angoissé, névrosé et verbomoteur qu’on rencontre dans ses films."

Ewan McGregor poursuit: "Sa façon de diriger les acteurs est très spécifique… brillamment spécifique! Il voit toute la scène dans sa tête; tu la joues d’une certaine façon et là, il te demande de la jouer tout autrement. C’est un beau défi pour un acteur."

En conférence de presse, Farrell confiait: "Nous n’avions pas beaucoup de répétitions, nous ne faisions que deux ou trois prises. La façon de tourner était ainsi plus organique, plus réelle. Woody a beaucoup d’indulgence pour les acteurs."

À ce propos, Allen révélait: "Les acteurs aiment bien ne pas avoir à répéter 25 fois la même chose, et je ne crois pas que leur interprétation s’en trouve diminuée. Ils n’ont pas besoin de répétitions ni de conversations à propos de leurs motivations, car les acteurs ont généralement un bon instinct et puis, ils me font bien paraître. "

LONDON CALLING

Dans Cassandra’s Dream, McGregor et Farrell interprètent Ian et Terry Blaine, deux frères issus de la classe ouvrière du sud de Londres qui rêvent de s’enrichir: "Comme tous les grands auteurs, explique Ewan McGregor, Woody a exploré le thème du meurtre et ses conséquences, mais si vous lui demandiez ce que raconte Cassandra’s Dream, il vous répondrait simplement qu’il s’agit du récit de deux gentils garçons qui, à cause de circonstances données et de leur oncle amoral (Tom Wilkinson), seront poussés à faire des choses terribles."

"Nos personnages sont des gens terre à terre dépassés par les événements, se souvient Colin Farrell. Tu apportes ce que tu es à ce que Woody a écrit, mais les personnages sont si bien écrits qu’on ne ressent pas le besoin d’en rajouter."

Quant aux différences langagières entre l’américain et le britannique, McGregor dévoilait ceci: "Woody nous disait: "ce ne sont que des mots que j’ai écrits, dites-les à votre manière." C’est dur de faire des films après avoir tourné avec un tel réalisateur…"

Enfin, sur le fait de tourner en Europe, Woody Allen concluait le plus simplement du monde: "New York a imperceptiblement changé depuis le 11 septembre, je pourrais continuer d’y raconter mes histoires; d’ailleurs, j’aurais pu y tourner Match Point. J’ai toujours voulu être un réalisateur étranger et si je tourne en Angleterre et en Espagne, c’est qu’on accepte d’y financer mes films."

En salle le 1er février

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CHERCHER LA FEMME

Dans Cassandra’s Dream, Hayley Atwell rencontre son premier rôle important au cinéma. Voici ce qu’elle nous confiait peu avant la conférence de presse, sur…

… son personnage d’actrice

"Angela est obsédée par elle-même, c’est une fille ambitieuse qui sait ce qu’elle veut, bien qu’elle paraisse par moments naïve dans sa façon de concevoir l’amour et le couple. La relation qu’elle a avec Ian (Ewan McGregor) ressemble davantage à un échange commercial qu’à une relation de couple; il n’y a pas vraiment de sentiment ni de profondeur. Je ne m’identifie pas à elle, mais je crois qu’elle ressemble à beaucoup de jeunes femmes ambitieuses, actrices ou non."

… les personnages féminins d’Allen

"Si je n’avais pas joué dans Cassandra’s Dream, je n’aurais jamais pu deviner qu’il s’agissait d’un film de Woody Allen. Dans ses précédents films, les personnages féminins étaient plus dominants, plus humains et plus divertissants. Mon personnage est plus froid et n’a pas vraiment la chance d’évoluer. Généralement, Allen se penche sur les relations humaines, alors qu’ici, Angela réagit simplement à la tragédie qui se déroule."

… la direction d’acteur d’Allen

"Il est très timide, très doux, mais en même temps son discours est très articulé et très franc. De toute évidence, il sait qu’il n’a plus besoin de faire ses preuves ni de lever le ton pour se faire respecter. Il n’a pas peur de demander ce qu’il veut précisément ni de dire ce qui déplaît. Ce que j’aime de lui, c’est qu’il n’est pas exalté. C’est un perfectionniste qui sait où il va."