Les formations en entreprises d'insertion : L'école de la vie

Les formations en entreprises d’insertion : L’école de la vie

Chaque année, plus de 3000 personnes en marge du marché du travail décrochent un emploi grâce aux formations données par des entreprises d’insertion sociale et professionnelle. Richard Gravel, directeur général du Collectif des entreprises d’insertion du Québec, insiste sur la pertinence de ces formations alternatives.

Voir: Quelle est la mission des entreprises d’insertion?

Richard Gravel: "Bien que ces entreprises offrent des produits et services, il s’agit d’organismes sans but lucratif qui s’inscrivent dans le mouvement de l’économie sociale et dont la mission première est de donner une formation pour permettre la réinsertion des personnes marginalisées. Vous achetez peut-être des produits dans des entreprises d’insertion sans le savoir."

Ces formations s’adressent à quelle clientèle?

"La moitié de ceux qui suivent une formation en entreprise d’insertion est prestataire d’aide sociale, tandis que l’autre ne reçoit aucun soutien monétaire. La grande majorité est composée de personnes sous-scolarisées: 73 % n’a pas terminé son 5e secondaire. Il peut aussi s’agir d’immigrants dont les diplômes n’ont pas été reconnus. Dans la plupart des cas, ce sont des personnes qui ont tenté à plusieurs reprises de retourner sur le marché du travail, mais qui ne sont pas parvenues à conserver leur emploi en raison de problématiques d’ordre personnel. Elles font alors face à une spirale descendante où chaque échec les éloigne de plus en plus du marché du travail."

En quoi consistent ces formations?

"Il s’agit de formations de six à huit mois données en entreprise par des professionnels d’un métier semi-spécialisé, que ce soit dans la restauration, le commerce ou le secteur manufacturier. Elles sont complétées par des ateliers psycho-sociaux, par exemple sur les normes du travail ou les techniques de recherche d’emploi. De plus, un intervenant accompagne chaque candidat tout au long de son parcours et l’amène à modifier les comportements faisant en sorte qu’il ne parvenait pas à conserver un emploi. Les personnes qui suivent ces formations sont rémunérées pour leur travail, plutôt que de demeurer prestataires, comme c’est le cas pour les autres mesures d’employabilité d’Emploi-Québec. Apprendre dans un contexte réel de travail tout en étant salarié les amène à prendre confiance en eux et à retrouver la motivation."

En octobre dernier, lors de la 4e édition de la Semaine des entreprises d’insertion, vous avez tenu un débat-conférence intitulé "Lutter contre l’exclusion en contexte de crise, une utopie?". Quel est le bilan de celui-ci?

"Le constat, c’est qu’il y a un gaspillage de la main-d’oeuvre. D’une part, les employeurs ne sont pas prêts à engager des employés qui n’ont pas les compétences nécessaires, ce qui est compréhensible. D’autre part, il y a des gens qui veulent retourner sur le marché du travail, mais qui ne parviennent pas à décrocher un emploi parce qu’ils font face à des problèmes que les entreprises d’insertion peuvent les aider à régler. Au moment où le Québec est dans une situation de pénurie de main-d’oeuvre, il est important de constater qu’il existe des façons alternatives de reconnaître les compétences, d’autant plus qu’il s’agit d’un modèle rentable puisque les entreprises d’insertion ont un chiffre d’affaires de plus de 67 millions de dollars et qu’elles sont à moyen terme un investissement en ce qui concerne les systèmes de santé et judiciaire. Notre cheval de bataille pour les prochaines années sera donc une reconnaissance officielle des compétences acquises en entreprise d’insertion."

Quelle est la pertinence de la réinsertion sociale et professionnelle?

"La pertinence de la réinsertion est d’abord humaine: on ne peut pas laisser des gens dans une situation de pauvreté. C’est aussi une question de droit à l’éducation: le cadre scolaire ne répond pas aux besoins de certaines personnes qui ont aussi le droit d’avoir un autre type de formation, qui leur permettra d’accéder au marché du travail. Cette année, 73 % des personnes qui ont suivi une formation en entreprise d’insertion ont trouvé un emploi ou sont retournées à l’école. Évidemment, la réinsertion sociale et professionnelle ne règle pas tous les problèmes, mais elle parvient à remettre les gens sur les rails en leur donnant les outils nécessaires pour décrocher et conserver un emploi. Puisque les entreprises d’insertion s’autofinancent à 50 %, chaque personne qui achète dans l’une de celles-ci contribue à la lutte contre la pauvreté, mais aussi au développement durable, puisque la plupart de nos membres ont aussi un engagement écologique."

Collectif des entreprises d’insertion du Québec
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