Agnus Dei, le traiteur spectaculaire
C2MTL ou le Cirque du Soleil font appel à ce service de traiteur pas comme les autres, qui allie l’événementiel à la fine cuisine dans des cocktails très mis en scène…
On arrive dans la tente VIP devant le chapiteau où sera présenté dans une heure le spectacle de cirque Volta. Devant nous, c’est un monde étrange, entre technologie et féérie. La Décanteresse entourée de tuyaux sert du vin aux invités, les poke bols sont servis dans des bulles translucides, tandis qu’à la station charcuteries le boucher sert du saucisson au-dessus d’une table en feu. On nous fait tourner une roulette pour choisir une « bouchée casino », au goût mystère: noire ou blanche, au hasard, on ne sait pas ce qu’on mange…
Alors que le spectacle de cirque Volta a commencé ses représentations le 27 avril dernier, les détenteurs d’un billet Expérience VIP peuvent ainsi profiter avant le spectacle d’un cocktail haut en couleurs signé par le traiteur haut de gamme Agnus Dei. Tout le menu a été construit autour du thème de l’illumination : « Chaque bouchée va créer une lumière chez l’invité », indique David Carrier, le président et directeur création de cette entreprise de « gastronomie événementielle ».
En rachetant l’entreprise familiale de traiteur, où il a commencé sa carrière, David avait pour objectif de faire se rencontrer les univers du spectacle et du culinaire. Passé par HEC et formé en finances et droit, il donne alors une nouvelle orientation à Agnus Dei avec cette signature créé il y a six ans : « spectaculinaire ». Fort de ses interactions avec le milieu culturel québécois, ce traiteur se spécialise dans la mise en scène des plaisirs de la table via une présentation créative et ludique…
L’emphase est mise sur la mise en scène de la nourriture. « Rien n’est disposé simplement sur des ardoises, indique le chef Anis Mouldi. Au lieu de servir des bouchées sur une cuillère, on les sert aimantées sur la robe d’une serveuse qui se déplace parmi les convives… C’est une compagnie où l’art culinaire fait partie du quotidien. » Le chef travaille notamment sur le trompe-l’œil, avec ses bouchées qui semblent suspendues ou celles au foie gras qui ressemblent à des petites pommes.
Faire partie intégrant de l’événement
La mise en scène, c’est aussi l’intégration d’une chorégraphie dans le service du repas – un metteur en scène de théâtre a été engagé spécialement -, ou le soin apporté aux costumes des serveurs, tous confectionnés par un designer québécois. Pour créer un univers culinaire dédié au spectacle propre à chaque événement, Agnus Dei s’occupe de toutes les étapes, de la création des différentes stations à l’installation des plateaux. « On fait partie de l’événement, on n’est pas juste un traiteur qui ne se consacre qu’à la cuisine, souligne David Carrier. C’est un événement clés en main qu’on propose. »
Pour la tente VIP de Volta, l’équipe d’Agnus Dei a commencé à travailler à partir des moodboards du spectacle, puis de photos et de vidéos. La compagnie compte un directeur artistique à l’interne pour superviser l’événement, Christian Touchette – qui a auparavant travaillé avec Le Louvre, Google, Mercedes, Louis Vuitton ou encore Apple. « On fait des clins d’œil au spectacle, sans rien révéler pour autant », confie David, qui collabore avec le Cirque du Soleil depuis plus de 15 ans. Le défi : ne pas copier, et se renouveler à chaque fois.
Mais le culinaire ne doit pas pour autant être oublié dans le spectacle, et aucun compromis n’est fait sur la qualité des ingrédients. Dans le Manifeste du spectaculinaire d’Agnus Dei, il est précisé que le produit doit toujours être honoré. « Il y a un équilibre à garder. On ne veut pas sacrifier le goût au bénéfice du flafla », insiste David. Les plateaux sont à 95% faits par le traiteur – exception faite de certaines spécialités, comme les macarons. À la station des charcuteries par exemple, c’est un artisan boucher au lieu d’un serveur qui présente les produits.
Du côté des cuisines, il faut savoir s’accommoder de cet aspect créatif. Pour suivre les idées de mises en scène, beaucoup de tests, d’essais et d’expériences culinaires sont nécessaires pour arriver au résultat voulu. « Il faut être réceptif aux idées, et ne jamais dire que ce n’est pas faisable, explique le chef Anis Mouldi. Travailler à Agnus Dei, c’est un challenge, avec des projets qui sortent des sentiers battus et ne sont jamais similaires. C’est très rare de trouver ça ailleurs. » Pour l’événement, la compagnie collabore aussi avec le chef exécutif Darren Bergeron (copropriétaire de Fou d’ici, et passé notamment par les restos 375C, Decca77 et Newton).
« Montréal nous oblige à nous dépasser »
Un concept qui a fait ses preuves : en 2006 et 2007, Agnus Dei recevait le prix de la meilleure bouchée à l’International Caterer Association. Outre le Cirque du Soleil, la compagnie compte parmi ses clients C2MTL, Les 7 Doigts de la main et plusieurs congrès internationaux. « Des clients qui ont un intérêt pour l’esthétisme, indique David Carrier. Dans l’ensemble, on a toujours été très proches du milieu culturel québécois. »
Agnus Dei est aussi derrière les concepts culinaires de la Scena, la salle événementielle du Vieux-Port de Montréal qui accueille notamment Un Chef à l’érable, ainsi que les événements de l’HOTEL10 (Coco). La volonté de la compagnie, c’est d’aller au-delà du traiteur. « Les services de traiteur vont toujours survivre, mais ils vont être obligés se renouveler. Ça doit être un service avec une valeur ajoutée, pense David. Il y a beaucoup de concurrence dans le domaine ici, mais Montréal nous oblige à nous dépasser. »
En attendant, cette extension de l’élément culinaire vers le domaine du spectacle est un gros succès, soutenu par la vague de foodies qui déferle depuis quelques années. « Né dans le traiteur », David a initialement pris cette décision de conjuguer les plaisirs de la table à l’événementiel de manière un peu défensive, en réaction à tous ces nouveaux chefs qui poussaient un peu partout. « Mais j’ai aussi toujours considéré le repas comme quelque chose de culturel », souligne l’entrepreneur. Après tout, l’art se mange aussi…