Gastronomie au bord de l’eau
«Je n’avais pas prévu de devenir chef. Je suis partie étudier en littérature à Montréal; je travaillais comme plongeuse pour payer mes études et c’est comme ça que je suis entrée dans la restauration…» S’ensuivent de nombreux voyages à travers le monde, durant lesquels Colombe St-Pierre cuisine beaucoup pour se faire de l’argent et découvrir les cultures locales.
Elle se rend alors compte comme la cuisine d’un territoire est emblématique de son peuple et de sa culture, et elle commence à se questionner sur la cuisine québécoise. «Quand des étrangers demandaient à des Québécois quel était notre plat emblématique et que je les entendais répondre “la poutine”, j’étais choquée. C’est un plat populaire, mais c’est vraiment pas ce qu’on a de plus intéressant à offrir!»
L’appel des racines la ramène ensuite dans le Bas-Saint-Laurent: «J’ai été très imprégnée par ce paysage, et c’était important pour moi de vivre près de l’eau. C’est ici que je me sens chez moi. Je ne me rendais pas compte de la beauté de cet endroit étant jeune, car je n’en avais pas vu d’autres…» La route empruntée par les gens qui visitent la région est bondée de St-Hubert et de Tim Hortons, et Colombe veut changer cela. Il y avait bien quelques bonnes places, mais pas tant, et la chef voulait proposer une adresse gastronomique avec des références à l’histoire de la région, un menu identitaire.
Chez St-Pierre, un «lieu de gastronomie régionale et par extension un lieu de valorisation du patrimoine comestible bas-laurentien», comme précise le site internet, on prône ainsi l’autonomie alimentaire et l’achat local. L’équipe ne touche plus aux animaux sur la liste des espèces en danger et priorise les productions maraîchères, artisanales et d’élevage du Bas-Saint-Laurent. La cuisine y est pleine de références au territoire: crabe des neiges, pousses maritimes, petits fruits des champs, fleurs sauvages, genévrier, amélanchier…
Si Colombe reste fidèle au terroir, ses plats gardent une touche exotique qui rappelle ses voyages. «La gastronomie québécoise est très éclectique, influencée par beaucoup de choses, mais axée sur la production locale», résume la chef, qui peut aussi bien servir un agneau de la région cuisiné au gingembre qu’un bœuf de Saint-Fabien dans un bouillon tonkinois aux algues d’ici.
La cuisine, pour elle, c’est un engagement: «Peu de chefs militent pour la portée politique de la cuisine. Ma mission, c’est de faire en sorte qu’il soit encore possible de servir ce bon produit demain. On a une terre généreuse, donc convoitée, et il y a peu ou pas de législation sur le naturel sauvage, beaucoup de problématiques autour de l’import-export des productions québécoises… Il y a un check-in à faire. C’est le moment: il faut profiter de l’intérêt actuel pour la gastronomie.»
De plus en plus de jeunes lancent des restos dans la région, et Chez St-Pierre, 70% de la clientèle viennent de l’extérieur, pour goûter un terroir remis au goût du jour, mais qui a pourtant toujours existé: «Je n’invente rien, moi! La cuisine locale, je ne comprends même pas qu’on l’ait abandonnée.» La chef a à cœur de protéger ce patrimoine vivant, comme elle l’écrit sur le site du resto, «pour une histoire culinaire qui puisse fièrement traverser le temps…»
Les choix de la rédac
On va se mettre au vert dans les Jardins de Métis. Ces beaux jardins à l’anglaise, qui mêlent de l’art contemporain à des milliers de variétés de plantes, sont devenus un lieu historique national.
200, route 132, Grand-Métis, jardinsdemetis.com
Pour une pause gourmande, un arrêt s’impose à Citron confit: cette boulangerie offre des produits maison dont les recettes originales ne contiennent aucun des allergènes principaux (gluten, œufs, noix, arachides, sésame, produits laitiers…).
2356, route 132 Est, Rimouski, boutique.citronconfit.ca
On profite des beaux jours pour aller au parc national du Lac-Témiscouata. Entre grands lacs et forêts, ce superbe parc a été distingué d’un grand prix du tourisme et un prix du patrimoine.
400, chemin de la Vieille-Route, Squatec, sepaq.com/pq/tem
Près du bic selon Colombe…
Un produit?
«Les bœufs de la Ferme Fournier à Saint-Fabien et ceux de la Ferme Dante à l’Îsle-Verte. Ces producteurs ont beaucoup de vision pour le futur. Il y a aussi l’agneau et le porc bio de la Ferme Bio-Rousseau, l’agneau de pâturage de la Ferme Biscornu, et les pousses biologiques et les légumes de la Ferme du Vert-Mouton. En fait, je recommande tous les producteurs qui fournissent le resto; la liste est sur mon menu!»
Ferme Fournier: 115, 1er Rang Ouest, Saint-Fabien, fermefournier.ca
Un coin de nature?
«Tout le parc du Bic… Le pic Champlain, c’est superbe! Il faut monter, mais d’en haut, on a une belle vue sur l’île Bicquette, là où j’ai grandi; mon père était gardien du phare.»
3382, route 132 Ouest, Rimouski, sepaq.com/pq/bic
Un endroit culturel?
«Le Vieux-Théâtre de Saint-Fabien! C’est un lieu particulier, une sorte de vieille grange… C’est différent des grandes salles de spectacle. L’endroit est antique, avec une ambiance feutrée, assez intime. Et la programmation est pas mal du tout, très éclectique; ça va de Radio Radio à Richard Séguin.»
112, 1re Rue, Saint-Fabien, vieuxtheatre.org