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Patrimoine commercial : Commerces de détails

À Québec, que ce soit dans le quartier Saint-Roch ou dans le Vieux, il n’est pas rare de croiser un édifice commercial au cachet historique. Par leur architecture, ou à cause des illustrations murales dont ils sont ornés, ces bâtiments procurent un cachet énorme à la ville.

Véritables miroirs des quartiers, les artères commerciales symbolisent une vie urbaine avec beaucoup de mixité. On pense à la rue Saint-Jean, avec en particulier la Maison Simons qui s’abrite sous un magnifique édifice de pierres grises, et à la rue Saint-Joseph, où la façade des édifices rivalise d’intérêt avec la vitrine des boutiques.

"Au cours des années 50 à 60, explique Réjean Lemoine, chroniqueur à Radio-Canada mais surtout féru d’urbanisme, l’apparition des premiers centres commerciaux a permis aux gens de quitter les centres-villes pour s’exiler vers les banlieues." Les commerces de proximité tirent leur révérence, devenus obsolètes et déficitaires. Leur dernier mot n’a tout de même pas été dit puisque, toujours selon M. Lemoine, "on observe depuis les années 90 un phénomène de retour au centre, qui a obligé les villes à travailler sur la revitalisation d’artères commerciales".

Puisque ces bâtiments commerciaux n’avaient pas vraiment de valeur patrimoniale, il s’en est fallu de peu pour que l’architecture des années 70 et 80 ne prenne place un peu partout dans les quartiers, et ne transforme toutes ces vieilles pierres en blocs Lego: "À l’époque, le souci était de moderniser le Québec, continue Réjean Lemoine. Aujourd’hui, on a une préoccupation de redonner leur valeur aux bâtiments. On enlève la tôle, et on se rend compte qu’il y a une belle pierre en dessous."

Les entrepreneurs qui décident de rénover les façades de leurs commerces bénéficient de subventions de la mairie, souvent sous forme de crédit de taxes, et la Ville se charge d’améliorer l’atmosphère en rajeunissant le mobilier urbain, en créant des stationnements sur rue, etc., afin de donner un style à l’artère commerciale.

AFFICHAGE DE CARACTÈRE

Non pas les ancêtres du graffiti, comme leur nom pourrait l’indiquer, les illustrations murales à caractère publicitaire fleurissaient sur les murs d’Amérique au siècle dernier, et la ville de Québec n’était pas en reste.

Tombées petit à petit dans l’oubli, craquelées et défraîchies ou tout simplement recouvertes de peinture blanche, ces fresques remises à neuf ajoutent au cachet des vieux quartiers de la ville. Denis Paquet, appuyé par l’UNESCO, s’est octroyé la mission de préserver ces vestiges de l’ancien temps.

Dans une entrevue publiée dans un quotidien, M. Paquet se plaignait "des enseignes banales, uniformes et sans grande originalité, sans lien avec le passé". Graphiste de formation, ce qui lui apporte certainement cette sensibilité à "l’art commercial", Denis Paquet se présente comme un marketing designer quand il visite le quartier Saint-Roch: "La façade ouest du Théâtre de la Bordée affichait un immense logo d’époque de Pepsi. Il y aurait eu moyen de restaurer à l’ancienne ce symbole de la culture populaire. La compagnie, moyennant contribution, n’aurait sûrement pas dit non." Au lieu de ça, l’illustration est recouverte de peinture blanche, et plus personne ne s’arrête pour admirer le logo bien connu.

"Il y a une mode du mural, présentement, affirme Réjean Lemoine. Parfois la Ville va avoir une sensibilité, et comprendre qu’un bâtiment qui conserve ses peintures marque le paysage, mais ce serait encore quelque chose à développer."

Même si les centres commerciaux sont encore très présents dans les habitudes de magasinage des habitants de la ville de Québec, et que Place Laurier est la deuxième destination touristique de la capitale (sic), Réjean Lemoine reste confiant: "En plus du centre-ville, la mairie essaye également de retravailler les artères commerciales dans les secteurs plus en banlieue, notamment à Beauport ou à Charlesbourg."

La Ville de Québec a également lancé les Mérites d’architecture de la Ville de Québec, s’adressant à tous les arrondissements et comportant une catégorie commerciale. "Dans chacun des arrondissements, des responsables ont proposé des résidences, des commerces, des édifices publics et d’autres établissements considérés comme de belles réussites architecturales."

Beaucoup de commerces, dont le Théâtre de la Bordée, font partie de cette sélection. Si beaucoup des nominés sont influencés par la modernité, la plupart arborent ce cachet historique qui fait le charme de Québec.