Vie

De graffiti en graffiti : Voir la ville

Qu’on les aime ou les abhorre, les graffitis sont plus que jamais des indicateurs d’urbanité. Et Québec n’y échappe pas. Tag, graffiti, murale, espace légal ou prise de possession illégale, les aérosols parcourent les murs de la ville à la recherche d’un endroit pour déposer un signe de vie ou, peut-être, une oeuvre d’art. Petit guide d’exploration hors norme pour les mordus et les curieux.

Alors que la Ville de Québec peut se targuer d’avoir effacé en 2006 10 608 pieds carrés de graffitis en 44 jours grâce à son équipe Graff’cité, d’un autre côté, elle encourage parfois les initiatives légales, où les artistes peuvent s’exprimer en toute quiétude. L’exemple qui vient évidemment à l’esprit est celui des gigantesques fresques qui ont été réalisées sous les bretelles d’autoroute de l’échangeur Dufferin, dont deux (Fond marin et Le Jardin d’Éden) sont présentement en mode survie et disparaîtront sous peu. Dernière chance de les admirer!

Une autre initiative, lancée par la Maison Dauphine, est le Projet Graffiti, porté par Pastel Bourget, intervenant, où des graffiteurs sont appelés à s’exprimer sur des espaces autorisés, et ainsi à perfectionner leur art. Lui et un autre graffiteur ont d’ailleurs réalisé au début juillet, avec le soutien de la Ville, une oeuvre sur un pan de mur de la boucherie W.E. Bégin (coin des rues Saint-Jean et Sainte-Claire), où les tags se succédaient nettoyage après nettoyage. Maintenant, le graffiti lui assure d’être laissé tranquille par les autres taggeurs.

Pour les curieux, il sera possible de voir des graffiteurs en pleine action pendant tout le mois d’août, alors que Pastel Bourget et quelques autres entreprendront un projet d’envergure, en apposant leurs couleurs sur deux espaces de 120 pieds de longueur, situés sous un viaduc de l’autoroute de la Capitale, près de Charlesbourg. Une entreprise qui aide les jeunes à sortir de leur marginalité, selon M. Bourget: "Il faut apprendre à se connaître, d’un côté comme de l’autre. Souvent, les gens ne savent pas trop ce qu’est le monde du graffiti. Et les jeunes en arrivent à réaliser que la société ne les hait pas tant que ça, finalement."

Autres oeuvres à admirer: Patrick (connu sous le nom de Avive) et Sbire, de la galerie Morgan Bridge, ont produit lors de Limoilou en fête deux oeuvres avec aérosol sur toile, qui seront exposées au Simons de Sainte-Foy du ?? au ??.

HORS DES SENTIERS BATTUS

Un des plus célèbres graffiteurs underground, Banksy (www.banksy.co.uk), qui produit de véritables oeuvres d’art sur les murs et espaces publics à Londres, écrit sur son site: "I want to be a non-conformist, just like everybody else." Phrase qui résume bien l’état d’esprit de plusieurs graffiteurs, car tous ne se sentent pas à l’aise dans un contexte préétabli, la production de graffitis étant souvent associée à la prise de risques et à l’expression d’une identité bien distincte. "Tu te tannes vite de ce genre de contexte [légal]", raconte un graffiteur qui veut garder l’anonymat. "Souvent, tu as un grand mur, mais un petit carré pour faire ton graffiti, qui se perd dans un espace énorme."

Certains y vont de prouesses extrêmes pour réussir à apposer leur tag ou leur pièce à un endroit choisi et quasi inaccessible, comme ceux qu’on peut observer ces jours-ci derrière la façade de l’église Saint-Vincent-de Paul. Autres spots que notre graffiteur anonyme a bien voulu nous révéler: le long des pistes cyclables, plus particulièrement près de la baie de Beauport, nombre de viaducs, dont celui sur Charest près du Lady Mary Ann, et aux abords du vieux tunnel qui part de l’anse Wolfe et traverse la ville sous les Plaines.