Vie

Redécouvrir l’avenue du Mont-Royal : De populiste à populaire

On y magasine, on s’y promène, on y mange. En été, on y voit des "paysages éphémères" et on y passe des "nuits blanches sur tableau noir". L’avenue du Mont-Royal pétille d’animation, coeur névralgique d’un quartier qui a l’âme d’un village. On croit bien la connaître et pourtant on peut passer à côté des mille et une facettes hétéroclites qui font l’identité originale du Plateau Mont-Royal. Visite guidée de l’organisme L’Autre Montréal le long d’un chemin de campagne devenu une avenue très courue.

70 ans de beans!

Quand on dit "le Plateau", on pense à ses origines ouvrières, peuplées des chroniques de Michel Tremblay. En effet, au début du siècle dernier, on doit construire aux abords de l’ancien chemin des Tanneries pour loger les nombreux immigrants d’Europe et les ruraux québécois qui vont alimenter les industries du secteur (abattoirs, tanneries, carrières…). "Malgré la présence de certaines catégories professionnelles aisées, la population du Plateau reste encore aujourd’hui constituée d’ouvriers, d’employés et d’artistes fauchés", souligne Bernard Vallée de L’Autre Montréal. D’ailleurs, certains établissements ont traversé les décennies. Le plus connu est sans doute La Binerie (à l’angle de Saint-Denis), lieu principal de l’action du Matou d’Yves Beauchemin, qui sert depuis plus de 70 ans des fèves au lard, de la soupe aux pois et autres ragoûts de boulettes!

Le triplex montréalais

À la fin du 19e siècle, les nouvelles idées européennes en matière d’urbanisme, d’hygiène et de sécurité vont encourager les élus municipaux à limiter la hauteur des bâtiments, à faire construire en retrait des trottoirs (pour améliorer l’ensoleillement des rues) et à prévoir des ruelles arrière (pour mieux lutter contre les incendies). Du coup, on va édifier de petits bâtiments de deux ou trois étages qui, pour des raisons évidentes de rentabilité, vont avoir des escaliers à l’extérieur et des appartements qui s’étirent en longueur. C’est la naissance du fameux triplex du Plateau qui va se retrouver partout, d’autant plus que le quartier va être construit très vite, dans les deux premières décennies du 20e.

Trésors du Second Empire

L’avenue du Mont-Royal n’a pas vu se construire que des maisons pour ouvriers ou employés modestes. À la fin du 19e siècle, juste avant la construction de l’avenue, l’implantation de communautés religieuses, près de l’actuel métro Mont-Royal, va créer un noyau urbain important. La congrégation du Très-Saint-Sacrement fait construire un monastère qui constitue aujourd’hui un bel exemple d’une architecture de style Second Empire, avec ses formes massives, son toit mansardé et ses lucarnes richement décorées. Depuis 1979, il est classé monument historique. En face, les soeurs de Sainte-Croix érigent un pensionnat pour jeunes filles qui abrite aujourd’hui la maison de la culture.

La maison de la culture

L’âge d’or d’une avenue tendance

Une caractéristique originale du développement commercial et résidentiel de l’avenue du Mont-Royal est que, à côté de petits commerces de proximité, s’implantent des magasins à rayons de deux ou trois étages, attirant une clientèle régionale et faisant ressembler l’avenue à la rue Sainte-Catherine. Certaines façades Art déco (années 30) de ces magasins ont été conservées, comme celle de l’ancien magasin Messier (occupé aujourd’hui par L’Aubainerie). "Jusque dans les années 60, l’avenue du Mont-Royal était LA place où il fallait aller", commente Bernard Vallée.

L’Autre Montréal

Depuis près de 30 ans, le collectif d’animation urbaine L’Autre Montréal propose des circuits de découverte urbaine qui donnent des perspectives historiques concrètes à des enjeux sociaux ou de développement urbain. "Plutôt que de donner un cours théorique, on amène les gens sur place, pour leur faire comprendre une réalité sociale ou urbaine à travers l’histoire de bâtiments", explique Bernard Vallée. C’est moins rébarbatif qu’un dossier à lire et, finalement, plus efficace!

Du coup, si le grand public connaît l’organisme à travers ses visites guidées à pied ou en bus, c’est à une autre clientèle que L’Autre Montréal consacre la majeure partie de son temps. "Ce sont surtout des professionnels qui font appel à nous, que ce soit des intervenants sociaux qui veulent avoir une approche plus collée à la réalité d’un quartier, des associations qui souhaitent renforcer un sentiment d’appartenance ou des institutions qui veulent illustrer concrètement une thématique", confirme Bernard Vallée.

Circuit avec L’Autre Montréal: "Avenue du Mont-Royal: 100 ans de vie urbaine"

Jusqu’au 16 septembre, de 13 h 30 à 16 h 30

Renseignements: www.autremontreal.com