Chez Camellia Sinensis, le matin, on boit du thé Darjeeling. Quand il n’est pas en Inde à la recherche de nouvelles feuilles, c’est Kevin Gascoyne qui se charge de le préparer. Il n’y a pas de recette secrète: quelques feuilles infusant au fond d’une théière ventrue suffisent pour perpétuer la tradition du tea time à l’indienne. "Du thé noir indien, tout le monde en a bu au moins une fois, ne serait-ce qu’un sachet de Salada! Même présenté comme ça, c’est un produit assez noble: des feuilles oxydées et coupées mises dans un sac de papier… cela reste une boisson santé de qualité. Mais si c’est une expérience dégustative que vous recherchez, alors il faut essayer le Darjeeling, le champagne des thés noirs, conseille-t-il. Contrairement à ce que croient la plupart des gens, ce n’est pas une variété de thé, mais une appellation qui rassemble 85 jardins de l’Ouest de la province du Bengale. Ce sont des feuilles qui représentent un terroir, un style de transformation, une tradition régionale et cela fait près de 20 ans que je me consacre à leur découverte", raconte l’expert dégustateur.
LE GOÛT DU THÉ
"En ce moment, il y a une dynamique très intéressante à Darjeeling. Les producteurs font des expériences artisanales pour tester des goûts nouveaux et pousser la chimie de la feuille. J’aime faire affaire avec les petits jardins qui ont cette approche. Un de mes préférés, c’est le jardin Samabeong, le plus haut du monde à 2750 m d’altitude. J’ai signé un accord avec la famille et chaque année, c’est moi qui achète leur meilleur lot en exclusivité pour Camellia Sinensis, 20 kg en tout! C’est un thé dont les feuilles roulées à la main recèlent une complexité d’arômes intéressante avec un côté fruité, floral et épicé et une texture onctueuse très équilibrée", explique-t-il en faisant déguster sa trouvaille.
"Presque tous les thés équitables qu’on trouve sur le marché viennent de l’Inde actuellement. Les jardins sont très syndicalisés et les ouvriers indiens bénéficient d’assez bonnes conditions de travail et de moyens de pression efficaces. À l’origine, le thé indien a été planté par les Britanniques en 1828, pour concurrencer la Chine. Au moment de l’indépendance, les Indiens se sont réapproprié les plantations et depuis 1951, celles-ci doivent se conformer à une réglementation sociale stricte: fournir du riz et des lentilles à leurs employés, construire une école et une clinique sur place et interdire le travail des enfants de moins de 14 ans… Dans les plus grosses plantations, de 500 à 700 personnes vivent en permanence dans les jardins, et c’est une véritable usine qui se charge de la transformation des feuilles récoltées sur place pour produire près de 80 000 kg de thé par année, en moyenne. C’est un contexte très industriel, c’est pour cela que le thé Darjeeling se vend à un prix très bas, fixé par le marché", explique l’importateur.
LE GOÛT DU VOYAGE
Le printemps dernier, Kevin Gascoyne a fêté son 17e voyage en Inde à la recherche du goût du thé qu’il a raconté de nombreuses fois dans des revues spécialisées états-uniennes, anglaises ou japonaises et qu’il importe maintenant chaque année à l’intention des clients des maisons de thé et boutiques de Camellia Sinensis. Aujourd’hui, c’est le goût du voyage et la passion pour son pays de prédilection, l’Inde, qu’il veut transmettre. En octobre, l’importateur-dégustateur emmènera un groupe de touristes à la découverte des jardins de thé de Darjeeling pour la compagnie de voyages personnalisés Uniktour. "Je voudrais faire découvrir les choses comme je les vois: montrer toute la chaleur d’une ville comme Calcutta, faire comprendre aux gens la dynamique sociale des jardins, le processus de fabrication du thé, mais aussi tous les autres aspects de la région de Darjeeling, la beauté de l’Himalaya et des temples tibétains tout proches, évoque-t-il. Au fil de mes voyages, j’ai rencontré de nombreuses personnes, des gérants de plantation, des dégustateurs spécialisés, des acheteurs, des courtiers, des familles qui vivent du thé… Désormais, je suis vraiment établi là-bas en tant que dégustateur international. Mon groupe aura donc la chance de dormir dans les jardins avec les récolteuses, dans le bungalow d’un gérant. Devenir guide touristique ne sera pas trop difficile pour moi: je peux parler de ma passion pendant des jours s’il y a quelqu’un pour m’écouter!"
Camellia Sinensis
351, rue Émery à Montréal
Info et réservations: 514 286-4002
Pour partir sur la route des jardins de thé de Darjeeling avec Kevin Gascoyne: www.uniktour.com
Pour en savoir plus sur les thés de la région de Darjeeling: www.camellia-sinensis.com
Atelier sur les thés indiens: le 16 septembre à 9h30 et le 24 octobre à 19h30.