Ce n’est pas parce qu’on est le dernier né de la lignée d’une grande famille de la parfumerie parisienne qu’on a nécessairement une histoire à l’eau de rose. D’ailleurs, Romano Ricci en a marre de ressasser cette histoire. N’empêche, le nom de ses aïeux est associés aux fragrances les plus célèbres du dernier siècle. C’est tout de même son grand-père, Robert Ricci qui a créer l’Air du temps! Mais bon, comme chacun doit le savoir (selon Romano), la maison Nina Ricci n’appartient plus à sa famille, "et d’ailleurs, je déteste en parler…" Voilà pour la généalogie des Ricci.
À Montréal pour lancer les deux parfums de son nouveau label Juliette Has a Gun, le jeune homme de 28 ans ne semble cependant pas avoir envie de prouver quoi que ce soit. Complet noir, chemise blanche, cravate fifties rouge en macramé et chapeau de gangster qu’il ne quitte jamais, on pourrait croire à priori qu’il s’agit d’un joli stunt publicitaire sur deux pattes, un point c’est tout. Pas besoin d’avoir un doctorat en sémiologie pour comprendre le lien entre le look dandy et le nom du label. "C’est la Juliette de Roméo, mais à une époque contemporaine. C’est un mélange de romantisme et de rock’n roll", le tout dans la langue de Shakespeare comme le veut évidemment le chic français.
La vérité, c’est que Romano est beau. Et il le sait. Il sait slalomer entre les questions et se permet des réponses sarcastiques. Au bout d’un petit moment, on a tout simplement envie de lui coller une étiquette avec écrit dessus "gosse de riche". "J’ai fait de la course automobile un peu, puis, je me suis consacré à ce que j’avais toujours rêvé de faire", dit-il nonchalamment. Forcément, quand on baigne dans les jus de luxe depuis tout petit… "Je fais de la parfumerie de niche. Pas question de faire des focus group et d’avoir à plaire à des grosses boîtes. Au total, je compte ne sortir que cinq fragrances sous Juliette", ajoute-t-il en recalant son chapeau sur ses yeux. Ainsi ne se gêne-t-il pas pour comparer sa marque à Jo Malone ou à l’Artisan parfumeur.
Et le petit jeu dure jusqu’à ce qu’il tende la première mouillette…
PLUS LOIN QUE LE BOUT DU NEZ
On a d’abord droit à Lady Vengeance, une variation sur la rose bulgare, le patchouli et la vanille. On dirait la version olfactive de la célèbre toile de Courbet, l’Origine du monde. Doux, sauvage et voluptueux. Autre mouillette, autre toile: Rose marocaine, musc et fruits rouge, cette fois, c’est plutôt La Naissance de Vénus de Botticelli, une nature fraîche, romantique qu’il a baptisé Lady Charming. C’est ici que l’impertinence se métamorphose en élégance.
Romano nous apprend alors que c’est le célèbre nez Francis Kurkdjian qui signe ses jus. Le Mâle et Fleur du Mâle de Jean-Paul Gauthier, c’est lui. Rose Barbare pour Guerlain, c’est re-lui. Narciso For Her? Devinez. Véritable vedette du monde de la parfumerie, Kurkdjian a accepté de prêter son talent à cette marque jeune et dynamique qu’est Juliette Has a Gun. Sinon, c’est du tout Romano. Le jeune homme d’affaire a dessiné les flacons, élaborer l’image de la compagnie et opérer la campagne de relation de presse. On comprend mieux pourquoi il en marre des préjugés qui viennent avec son patronyme, et on se laisse doucement séduire par le parfumeur de charme.
Lady Vengeance et Miss Charming sont vendu en exclusivité chez Holt Renfrew. 82$/50ml, 120$/100ml. Info: www.juliettehasagun