Vie

Vin dit « naturel » : Question sulfureuse

Le vin dit "naturel" ou sans soufre est très en vogue par les temps qui courent. Dans les bars à vins branchés de Paris et de Montréal, on ne cesse de recommander des vins élaborés sans ajout de SO2. À tort ou à raison?

L’ajout de soufre au vin date du XVe siècle. Après les travaux de Louis Pasteur à la fin du XVIIIe siècle, l’oenologie s’est développée, le sulfitage s’est généralisé et est devenu abusif. Qu’en est-il aujourd’hui?

Heureusement, chez les producteurs consciencieux, les pratiques vitivinicoles améliorées, jumelées à l’oenologie moderne, contribuent à diminuer les doses de sulfites ajoutées aux vins.

LE RETOUR DU PENDULE

Dans les années 60 et 70, bon nombre de vins français, devenus minces, voire maigres se sont récemment métamorphosés en vins hyper concentrés. En effet, ces vins d’alors, critiqués par de nombreux puristes, se sont transformés en vins pleins, savoureux et sans lourdeur. Le sulfitage semble prendre la même route; le passage de son usage abusif à son absence complète a engendré une nouvelle secte d’adeptes de vins dits "naturels".

Toutefois, le vin zéro soufre n’existe pas, car la fermentation même du vin produit du SO2. Lorsque son dosage demeure raisonnable, ses vertus bienfaisantes sont connues: antiseptique, antioxydant, acidifiant. Le soufre permet aussi de renforcer la couleur, la teneur en tanins et les arômes du vin. De l’autre côté de la médaille, en plus d’être à proscrire pour les personnes asthmatiques, à fortes doses, il est toxique et peut provoquer des maux de tête et d’estomac. Heureusement, de nos jours, de plus en plus de producteurs sérieux minimisent son utilisation.

La production de vins dits "sans soufre" est un exercice des plus risqués. Les pinards instables et souvent oxydés perdent rapidement les caractéristiques typiques de leurs cépages et terroirs et ont tendance à se ressembler. Pour les puristes, les qualités organoleptiques des vins dits "naturels" deviennent parfois secondaires; ils préfèrent louanger l’effort tout en acceptant les déviations.

Les amateurs qui désirent se faire une opinion sur les produits sans soufre peuvent visiter les restos et bars à vins branchés de leur quartier (Bu, Pullman, L’Express, Les Trois Petits Bouchons), car les "sans soufre" ne sont pas offerts dans nos succursales d’État, puisqu’ils ne respectent pas le minimum de SO2 requis par le laboratoire de la SAQ. Les vins "naturels" sont vendus par les agents importateurs aux établissements désireux d’offrir des produits à la mode aux oenophiles avertis et professionnels à la recherche de curiosités… et de discussions vinicoles philosophiques.

Pour celles et ceux qui désirent simplement boire du bon vin, voici deux suggestions de flacons élaborés par des producteurs qui pratiquent le sulfitage à dose homéopathique:

UN BLANC /

Macon-Chaintré Vieilles Vignes 2004

Domaine Valette, Bourgogne,10224526, 26,85 $

/88

Nez très minéral rehaussé de parfums de fruits blancs tels que la poire et la pomme. Frais et délicat, bon équilibre et de sève moyenne, ce macon est tout à fait typique du millésime. Un vin tout en finesse mais savoureux à souhait. De bonne persistance, il accompagnera à merveille les crevettes ou calmars grillés, rehaussés d’un trait de citron.

UN ROUGE /

Bourgueil Tuffau 2005 Val de Loire,

Chasle & Ménard, France, 872481, 19,45 $

/89

En 2005, à l’instar de plusieurs régions françaises, Dame Nature a aussi privilégié la vallée de la Loire. Du fruit à revendre, une minéralité exemplaire rehaussée d’effluves de poivrons, de fruits rouges et de poivre rose. Un vin frais et généreux, doté d’un charme irrésistible. Très beau vin à découvrir avec les grillades de veau ou de porc.

www.nickhamilton.ca