Vie

Rad Hourani : Une explosion de talent

Deux ans à peine après avoir déménagé à Paris, le Montréalais Rad Hourani a ébloui la presse internationale avec son premier défilé unisexe. Confidences d’un succès instantané.

Il ne croit ni aux tendances, ni aux saisons, ni à la séparation entre la mode masculine et la mode féminine. Il a abandonné l’école après le secondaire et n’a pas de formation en mode. Il se méfie de la religion, des nationalités, des pays, et prétend être "de nulle part". Dans cette espèce de néant de références, Rad Hourani, un styliste montréalais d’origine jordano-syrienne, a créé une première collection toutes saisons et unisexe qui, dit-il, n’exprime rien d’autre que sa propre personnalité.

"Je crée d’abord pour moi-même, annonce-t-il, lové dans la chaise en cuir du studio industriel tout blanc qu’il garde à Montréal. Rad, c’est une attitude nonchalante, une énergie positive, sleek, beaucoup de noir, toujours moderne, un peu mystérieux, chic."

Tout de noir et d’angles graphiques, de contrastes subtils de jersey et de soie, de cuir et de coton, ses pièces minimalistes et sophistiquées créent une silhouette androgyne et presque austère, sans fantaisie, aussi flatteuse pour les hommes que pour les femmes. Ses coupes en trompe-l’oeil dévoilent, çà, une queue-de-pie géométrique en satin sur un gilet-kimono, là, un jeu de transparence sur un pantalon skinny ultra-long. De la boucle en argent rectangulaire qui orne un lacet au plissé en cuir d’un sac souple, chaque détail a été méticuleusement pensé.

SUCCÈS FOU

C’est justement la beauté à la fois furieusement cool et sobre de la marque qui a séduit la presse internationale et les acheteurs lors du premier défilé organisé par Hourani, dans une galerie du 3e, pendant la Semaine de mode de Paris. Dès le lendemain, les médias canadiens Flare, Fashion, Elle Canada et The Gazette planifiaient des articles sur le nouveau talent; ID et Women’s Wear Daily, deux bibles de la mode, le mentionnaient; et Style.com le nommait parmi les 10 meilleurs jeunes designers internationaux. Barbara Atkin, directrice d’Holt Renfrew, achetait la collection pour la boutique montréalaise et Barneys New York négociait une entente avec le designer. On l’a même comparé à Helmut Lang et Ann Demeulemeester, deux canons de la mode contemporaine dont l’esthétique, puriste d’un côté et rock de l’autre, influence le travail d’Hourani.

Une surprise? Non, pas pour les proches de ce workaholic de 25 ans, plongé dans l’industrie de la mode depuis l’âge de 18 ans et qui travaille, dit-il, "24 heures sur 24". Avant de conquérir le catwalk, Hourani a appris le métier en organisant les shoots des plus grands médias canadiens; il est considéré comme l’un des meilleurs stylistes du pays. À 19 ans, il s’était secrètement promis de lancer sa première collection à 25 ans, et il a minutieusement planifié sa gloire, shoot après shoot, contact après contact. "Le stylisme, c’est vraiment un apprentissage génial – j’ai appris tout sur le marketing, la qualité des vêtements, comment les tissus tombaient…" Sauf que ses ambitions étaient trop importantes pour le pays. "J’adore Montréal, mais il n’y avait plus rien ici qui m’excitait", dit-il, notant avoir été très bien accueilli à Paris il y a deux ans. "J’ai eu une réaction positive tout de suite, à 23 ans. Ça m’a donné confiance, je me suis dit: pourquoi ne pas commencer la ligne quand la confiance est là?"

PREMIER SOUFFLE

Pour cette première collection, Hourani a donc commencé à dessiner des pièces dans son carnet lors de voyages, des constructions très simples et géométriques inspirées de l’architecture. Il a choisi des matières nobles: des jerseys aériens et des satins lourds pour ses tops, des voiles pour ses pantalons, des tricots italiens pour ses pulls, des cuirs d’Afrique du Sud pour ses sacs et italiens pour ses bottillons à talons. Aidé de ses amis maquilleurs, mannequins et de sa muse Brigitte Chartrand, propriétaire du concept-store Reborn, il a monté son défilé, invité les V.I.P., contacté les meilleures boutiques du monde.

Prochaine étape: un deuxième défilé lors de la Semaine de mode automne-hiver 2009 de New York. Hourani rêve également d’ouvrir une première boutique à Manhattan, et de vendre ses collections partout dans le monde. C’est qu’aucun rêve n’est trop grand pour ce jeune homme que sa famille a renié lorsqu’il a décidé de quitter l’école à 18 ans pour se dédier à sa passion pour la mode. "Je voulais partir, se rappelle le designer, parce que dans ma tête, il n’y avait que ca, il n’y avait que la mode."

www.radhourani.com

En vente chez Holt Renfrew dès janvier