Andy Thê Anh, Denis Gagnon, Antonio Ortega, Yso… Pour l’expo Au fil de l’art, les créations des designers font une rare incursion dans une galerie, le temps d’un dialogue avec les toiles de Dominic Besner. Celui-là même qui avait créé l’événement en 2004 avec sa monumentale exposition intitulée La Démesure des convoités. Les toiles aux dimensions épiques avaient attiré plus de 1000 visiteurs lors d’un vernissage où le mot d’ordre était, justement, la démesure. Après ce succès, les agents de l’artiste, représenté par la Galerie MX à Montréal, avaient décidé d’en faire une expo itinérante. Première étape: le Maroc. À Casablanca, la directrice du musée La Villa des arts a eu l’idée de faire participer des artistes marocains. Mais ce sont finalement des créateurs de mode locaux qui se sont prêtés au jeu de créer des pièces de vêtement uniques pour répondre aux tableaux du peintre. "Au départ, on ne voulait faire qu’une création de tableaux, mais on est tombés sur les tissus marocains", raconte Dominic Besner. "Le Maroc est un pays très coloré, où on porte le caftan. Alors on a décidé de demander aux artistes marocains de retirer l’essentiel de l’oeuvre de Besner et de créer des robes de soirée ou des caftans", dit le peintre. Certains stylistes se sont donc inspirés des couleurs, d’autres des motifs géométriques présents dans son oeuvre influencée par l’architecture.
QUAND LA MODE S’Y GREFFE
De retour à Montréal, l’expo s’enrichit des oeuvres de designers d’ici. Denis Gagnon, Antonio Ortega, Yves-Jean Lacasse, Rush Couture, Yso et Andy Thê Anh ont tous répondu présent à l’appel. Claudette Floyd, la créatrice de Rush Couture, a déjà eu l’occasion de collaborer avec le peintre: pendant la dernière Semaine de la Mode de Montréal, elle avait invité Besner à venir peindre sur ses robes. D’autres ont saisi l’occasion pour découvrir l’oeuvre d’un autre artiste. C’est le cas d’Yso. "Ce qui m’a inspiré dans les toiles de Besner, explique-t-il, ce sont les superpositions de la mémoire et des images. Il y a beaucoup d’information dans ses tableaux, beaucoup de couches de souvenirs superposées." Pour cet exercice de style, Yso a donc créé une robe dans une matière qui captait la lumière, une pièce très simple, dit-il, coupée dans une matière inusitée. Andy Thê Anh, de son côté, dit avoir toujours admiré le travail de Besner: "Ce sont des oeuvres qui ne peuvent pas laisser indifférent. Il y a [dans ses toiles] un choc des couleurs et en même temps une harmonie incroyable." Lui-même a été inspiré par ces couleurs violentes, le rouge, le noir, le violet, une palette qui rejoint la sienne par moments.
Que penser de cette incursion de la mode dans l’univers de l’art? Les métissages entre les deux médiums ne sont pas nouveaux. Elsa Schiaparelli avait ouvert la voie dans les années 30 en collaborant avec des artistes surréalistes. La route a ensuite été maintes fois parcourue, que ce soit par un Yves Saint Laurent sous l’influence de Mondrian, ou un Jean-Paul Gaultier exposant dans des lieux réservés à l’art contemporain. Mais les vêtements ont-ils leur place dans une galerie? Sans doute, s’il s’agit d’une pièce unique, croit Andy Thê Anh, tout en soulignant du même souffle qu’il n’y a pas là de quoi faire vivre son designer: "Il y a des designers qui créent des chefs-d’oeuvre qu’on expose au musée, mais que personne n’achète. Pour moi, la mode fait partie de son temps, c’est quelque chose qu’on consomme." Pour Yso aussi, la mode est un art en mouvement, à porter au quotidien: "Pour moi, la mode est quelque chose de commercial et de très accessible. C’est un art qu’on adapte à la vie." De son côté, Besner conclut joliment: "On est tous des artistes dans l’âme, on est tous sensibles à notre environnement. Il y en a qui transmettent leur vision du monde par des vêtements, d’autres par la peinture."
Du 29 novembre au 11 décembre
À la Galerie MX (333, avenue Viger Ouest)
Une soirée magique et envoûtante… Du BESNER à l’état pur!!!