L’odeur de brioche chaude dans le rayon cuisine chez IKEA et le parfum de cuir à l’intérieur des voitures neuves, on connaît. Mais le marketing olfactif est aussi en train de gagner l’industrie de la mode. La prochaine fois que vous mettrez les pieds chez Hugo Boss, Men’s, La Baie, Marie Saint Pierre ou Isis, ouvrez bien les narines. Chacune de ces boutiques a une fragrance particulière diffusée au moyen d’une technologie sophistiquée (on est loin des vaporisateurs de parfum d’ambiance). Le but de l’affaire: se différencier de la concurrence et créer une "expérience client" plus complète et plus agréable. Certaines marques vont même jusqu’à adopter un "logolf", un logo olfactif personnalisé qui leur sert de signature. Peut-être reconnaîtra-t-on bientôt l’identité olfactive d’une marque aussi sûrement que le "swoosh" de Nike ou le M de McDonald’s…
UN TERRAIN À EXPLORER
"Les consommateurs sont saturés de messages publicitaires, explique Nathalie Lesage, vice-présidente communication et marketing de l’agence Mood Media. Ils veulent de plus en plus vivre des expériences et les bannières n’ont plus d’autre choix que de les offrir." Le marketing olfactif n’est que le plus récent ajout à une mise en scène sensorielle qui cible le confort du client, histoire qu’il reste plus longtemps. La musique d’ambiance, le design intérieur, les matières ou l’éclairage ne sont plus laissés au hasard depuis belle lurette. Alors pourquoi serait-ce le cas pour les odeurs? Avec le perfectionnement de la technologie de diffusion (le parfum est continuellement diffusé dans l’atmosphère, il ne disparaît pas et ne se fane pas), le marketing olfactif fait de plus en plus d’adeptes depuis les quelque cinq dernières années.
En effet, la vague du marketing olfactif a fortement happé l’Europe et les États-Unis: les Lacoste, Mango, Kenzo, Abercrombie & Fitch et Macy’s ont déjà mordu à cette nouvelle arme de séduction: l’odorat est un sens directement lié aux émotions et à la mémoire… C’est un peu appliquer la madeleine de Proust à la vente au détail: "Les odeurs nous rappellent des choses de notre passé, qu’elles soient agréables ou désagréables", explique Aisha Issa, présidente de Nutrisco, une compagnie qui a implanté des systèmes de diffusion dans les boutiques Marie Saint Pierre et Isis. "C’est très subjectif. Quand le client fait une expérience olfactive, cela le fait réagir dans un sens émotif ou cognitif."
UNE ARME À DOUBLE TRANCHANT
Et réactions il y a. Quand elles entrent dans la boutique de vêtements Isis, angle avenue du Parc et Saint-Joseph, les clientes s’extasient souvent en humant le parfum de fleurs blanches qui monte dans l’entrée. Mais il y a des exceptions, comme cette dame qui est ressortie en se plaignant du parfum trop fort au moment du passage de la journaliste. "C’est la première fois que j’entends ça, assurait Jade, la gérante de la boutique. Jusqu’à maintenant, on n’a eu que de bons commentaires, à part deux ou trois gars qui aimaient moins ça. Mais bon, ce sont des gars…"
La réaction à une odeur demeure subjective et conditionnée par les différences culturelles. Prenez le citron: malgré son parfum frais, il est associé aux produits nettoyants en Amérique du Nord. On comprendra donc que le marketing olfactif ne fasse pas l’unanimité chez tous les consommateurs. "On n’est jamais à l’abri des odeurs qui peuvent incommoder, dit Nathalie Lesage, de Mood Media. Il y a des gens qui sont très sensibles aux parfums, mais au moins ils ne peuvent pas y être allergiques." Les compagnies comme Nutrisco et Mood Media, qui implantent ces dispositifs de diffusion olfactive, proposent en effet des parfums hypoallergéniques dont on peut régler le niveau.
Chez Marie Saint Pierre, par exemple, il faut s’y prendre à deux fois avant de détecter le subtil arôme de thé vert et de citronnelle. Ici, les réactions des clientes sont plus rares. Pour Sylvie Jarry, la gérante, il ne s’agit que d’un des facteurs qui contribuent à créer une ambiance calme, feutrée, confortable. Pas question d’influencer le subconscient du consommateur et encore moins de stimuler la vente. "Dans l’industrie alimentaire, l’impact sur les ventes est plus immédiat, précise Aisha Issa. Mais en mode, l’idée, c’est surtout de créer un environnement chaleureux qui rende le magasinage agréable." Vos narines n’y seront pas imperméables.
CARNET D’ADRESSES /
Marie Saint Pierre
2081, rue de la Montagne
Tél.: 514 281-5547
Isis
5001, avenue du Parc
Tél.: 514 303-8252
Hugo Boss
1407, rue Crescent
Tél.: 514 843-5476
Men’s
1321, rue Sainte-Catherine Ouest
Tél.: 514 843-8877
La Baie
585, rue Sainte-Catherine Ouest
Tél.: 514 281-4422