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Parc-Extension : Le sourire des ex

Dès que l’on y met les pieds, on sait qu’on est ailleurs. Est-ce en Inde, au Pakistan, aux Antilles ou au Vietnam? C’est Parc-Extension, tout simplement.

Dominic est l’un des rares Québécois de souche qui résident dans ce secteur, situé entre Ville Mont-Royal et le quartier Villeray. "Ici, c’est un monde à part. C’est une partie de la ville qui est plutôt fermée. Les nouveaux immigrants y arrivent et n’en sortent pas nécessairement", reconnaît-il.

À l’évidence, que l’on modifie la loi 101 ou non, on n’entend pas forcément parler français dans les ruelles du quartier. "Qu’on leur laisse leur chance, dit Dominic. On ne sait pas dans quelles conditions ils ont quitté leur pays. Certains ont dû partir d’urgence, je comprends très bien qu’ils aient envie de venir rejoindre leur communauté. Et pendant qu’ils ouvrent des commerces pour pouvoir vivre, leurs enfants, eux, apprennent le français."

Après trois ans à faire partie de la minorité visible, Dominic fait son bilan: "J’aime ça! Tout ce que je vois, ce ne sont pratiquement que des sourires. Quand j’habitais sur le Plateau, je me souviens d’avoir salué une fille qui était ma voisine depuis un an. Tout ce qu’elle a trouvé à répondre, c’est: "Est-ce qu’on se connaît?" Ici, si j’ai envie de saluer les gens, tout le monde me salue en retour, peu importe s’ils me reconnaissent ou pas. Et c’est toujours avec un sourire!"

Le mieux, c’est qu’avec cette gaieté, vient l’entraide. Ce qui donne des situations dignes d’une mission de l’ONU. "Aussitôt qu’il y a une voiture coincée dans la neige, tout le monde sort aider. L’autre jour, il y avait deux Asiatiques dans une auto. Mon voisin indien et moi sommes allés leur donner un coup de main, et quelques minutes après, un Grec s’est joint à nous. J’adore ça!"

MARCHER DANS LE MONDE

Le quartier foisonne de boutiques de tissus indiens et de petits marchés pakistanais ou orientaux. Par contre, Dominic n’est pas un grand consommateur. Malgré les magasins exotiques et les bouibouis aux mille et une odeurs, il préfère l’expérience humaine à celle de l’achat. Fumeur, il doit néanmoins s’approvisionner régulièrement en clopes. "Je ne vais jamais au même dépanneur! J’aime faire le tour et parler avec les gens. Les clients autant que les propriétaires sont très contents de voir arriver un Blanc dans le commerce."

L’expérience humaine du résident se poursuit même jusque dans les sucreries. "De temps à autre, je vais à la pâtisserie grecque Piccadilly. Il y a une vieille dame qui peine à parler français et anglais, mais elle m’en donne toujours plus que je n’en demande. Je sors de la place avec plein de pains aux raisins et toutes sortes de petites pâtisseries!" Ça, c’est pour la Grèce, mais s’il a envie de faire un petit tour en Afrique le temps d’une course, Dominic va au Marché Ghanacan, rue Ogilvy. "Ils ont des produits africains et antillais et c’est toujours plein. C’est à croire que toute la communauté africaine de Montréal s’y donne rendez-vous. Les discussions là-bas sont fortes et animées. Il y a vraiment un cachet sympathique. C’est typique de Parc-Extension."

Il va sans dire, ça grouille dans le quartier et chaque communauté amène son énergie. "À deux pas de chez moi, il y a le parc Athéna, rue Jean-Talon. Comme il y a peu d’espaces verts dans le coin, beaucoup de gens s’y retrouvent. Il y a des personnes âgées qui jouent aux cartes et des enfants de toutes les nationalités qui s’amusent ensemble. Parfois, une communauté célèbre une fête spécifique à sa culture et les autres communautés y participent. C’est très beau à voir."

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NOTRE 6 1/2 DE GARS DANS PARC-EX

Dominic habite rue de l’Épée avec deux copains. Côté déco, nous sommes ici dans un véritable appart de gars. "Je ne suis pas très fort sur la décoration. Un de mes colocs possède quelques plantes, mais je ne les ai jamais arrosées!" Qu’à cela ne tienne, la décoration se trouve dans le cachet "naturel" du logement. Non seulement il est gigantesque, mais les moulures et les plinthes sont encore en bois d’origine et le joli plancher de bois franc s’y harmonise à merveille. Mieux, une belle porte vitrée sépare la salle à manger du couloir central. "C’est vraiment un super endroit à habiter, dit-il. Hélas, j’admets qu’il y a quelques inconvénients. Par exemple, mes proprios, qui habitent en bas. C’est un vieux couple de Grecs et ils s’engueulent du matin au soir. Je dois mettre de la musique pour ne pas les entendre…"

Serait-il tombé sur les seuls résidents du quartier qui ne sourient pas?