Avec la multiplication des parfums, en fait d’odeurs, il y a de quoi y perdre son latin. À côté des lancements des grandes maisons comme Dior, Givenchy ou Lauder, il y a ceux des stars de ce monde. Après Céline Dion et Jennifer Lopez, on a eu droit, ces derniers mois, à Mariah Carey, Gwen Stefani (L.A.M.B.), Kate Moss et Kimora Lee Simmons (Fabulosity), parmi tant d’autres… Depuis quelques années, il y a aussi les parfums de niche, ces fragrances qui veulent se démarquer des grands courants marketing et qui se retrouvent souvent en exclusivité dans certains magasins (Lady Vengeance de Juliette Has a Gun, Rossy de Palma d’Etat Libre d’Orange…).
Pourtant, derrière cette apparente multiplication des parfums, de grandes tendances en matière de préférences olfactives se dessinent. Ainsi, comme le fait remarquer Sylvie Jourdet, maître parfumeur créateur et présidente de la Société Française des Parfumeurs, "traditionnellement, les senteurs favorites des femmes sont associées aux fleurs, tandis que
les hommes préfèrent des notes boisées ou aromatiques". De Happy de Clinique au No 5 de Chanel, en passant par les J’adore de Dior, Pleasures d’Estée Lauder et Eternity de Calvin Klein, les fleurs embaument nos jardins corporels féminins. Selon Isabelle Vacheret, vice-présidente marketing chez Symrise, les fragrances florales représentent d’ailleurs plus de la moitié du marché des parfums pour femmes.
Du côté des hommes, ce sont effectivement les aromatiques qui dominent, ces fragrances composées d’herbes tels la sauge, le romarin, le thym ou la lavande. En tête de cette catégorie, on retrouve donc les Eternity de Calvin Klein et Mâle de Jean-Paul Gaultier, et, plus récemment, Hypnôse de Lancôme et Nautica Voyage.
FÉMINITÉ FRUITÉE ET FRAÎCHEUR MASCULINE
Pourtant, comme on le sait, les parfums ne sont pas faits d’un seul bloc olfactif. Mille et une nuances en composent la complexité. Si, en Europe, les floraux se chargent volontiers de notes plus orientales, en Amérique du Nord, on aime les fruits! J’adore, Happy, Romance sont tous des floraux fruités, sans parler des jus plus récents, comme Be Delicious de Donna Karan, Cool Water Wave de Davidoff ou Daisy de Marc Jacobs. "C’est une caractéristique du marché américain que l’on retrouve dans la plupart des parfums de stars", confirme Isabelle Vacheret. Believe de Britney Spears marie les mandarines et la pulpe de goyave à des fleurs de tilleul et de chèvrefeuille. Le dernier-né de Kimora Lee Simmons, Fabulosity, associe la prune, le lys et la fleur d’oranger.
Pour les hommes, si les parfums doivent rester "virils", on les aime ici plus frais que de l’autre côté de l’Atlantique (où on les préfère boisés). "On retrouve une tonalité aquatique dans la plupart des fragrances qui ont du succès en Amérique du Nord", explique Isabelle Vacheret. On pense bien sûr à Acqua di Gio d’Armani (ces agrumes et ce romarin baignés dans des notes marines), mais aussi à l’Eau d’Issey d’Issey Miyake, ce boisé aquatique qui mêle la muscade au nénuphar.
VERS PLUS DE SENSUALITÉ
Malgré tout, si certaines familles olfactives restent des incontournables, leur interprétation évolue. "Aujourd’hui, il y a des fleurs que l’on n’utilisait plus et qui reviennent à la mode, comme l’iris ou la fleur d’oranger. La rose, toujours intemporelle, est travaillée de façon différente. Accompagnée de notes fruitées et légères, on la fait aujourd’hui plus majestueuse", remarque Sylvie Jourdet. Les hommes aussi voient leur univers olfactif évoluer. On voit notamment apparaître des notes fleuries (le dernier Jean-Paul Gaultier), ce qui était impensable avant. En fait, comme le souligne Isabelle Vacheret, "les parfums deviennent aujourd’hui plus sensuels".
On rend les floraux plus charnels en leur ajoutant, par exemple, des notes boisées (comme Elle d’Yves Saint Laurent). On rajeunit les chyprés (basés sur des accords de mousse de chêne, ciste-labdanum, patchouli et bergamote) en leur ajoutant des notes fleuries et fruitées plus jeunes (Coco Mademoiselle, Delicious Night de Donna Karan, Mariage de Givenchy). Chez les hommes, on va rechercher des notes plus voluptueuses boisées et ambrées (l’Eau d’Issey Intense, Fahrenheit 32, CK IN2U), voire chyprées. Ainsi, le premier parfum masculin du couturier Narciso Rodriguez reprend le patchouli sur fond de notes aromatiques, en le combinant avec du musc, de l’ambre et des feuilles de violette… pour la part de féminité qui sommeille en tout homme.