LA MODE DU DÉVELOPPEMENT DURABLE
La conscience écologique n’est plus le fait de quelques illuminés, soixante-huitards attardés, mais une question de civisme. Tout bon citoyen doit faire sa part en matière de propreté, de recyclage, de chasse au gaspillage… Côté construction, on parle de développement durable. De plus en plus de nouveaux bâtiments se font un devoir d’être LEED (Leadership in Energy and Environmental Design), cette notation de performance écologique. On pense notamment au magasin Mountain Equipment Coop du Marché Central, aux pavillons Lassonde de l’École polytechnique, à celui des sciences biologiques de l’UQAM, à la TOHU…
À côté de l’institutionnel et du commercial, après les campagnes pour dénoncer l’utilisation de matériaux délétères comme la MIUF (la mousse isolante d’urée-formaldéhyde, interdite au Canada depuis le début des années 80), on vante aujourd’hui les mérites de maisons plus saines et citoyennes.
L’an dernier, on a beaucoup parlé de la maison Écohabitation, sur l’avenue du Parc, la première résidence à être certifiée LEED au Canada. Cette année, au Salon national de l’habitation, la maison Énovo de IME Habitat tenait la vedette. C’est une maison modulaire, que l’on peut agrandir selon ses besoins. De plus, elle est dotée d’un système domotique intelligent, d’un système de filtration des eaux de pluie et de collecte des eaux usées, le tout avec un toit vert et une large fenestration…
UN QUÉBEC PAS SI VERT QUE ÇA
Roberpierre Monnier est un architecte spécialiste en construction écologique qui a bâti des maisons solaires passives (utilisant la fenestration et l’orientation pour améliorer la performance énergétique) et qui donne de nombreuses conférences sur la construction écologique. Selon lui, si les médias ont monté en épingle le phénomène du développement durable, dans les faits, il n’est pas si répandu que ça. "Dans le secteur résidentiel, sur 25 000 maisons construites annuellement, il y en a peut-être seulement 1 % ou 2 % qui prennent en compte des critères écologiques", estime-t-il. Et encore, comme il le précise avec humour, "il y a toutes sortes de teintes de vert, du foncé au très clair"…
Si le Québec est si peu vert, c’est autant à cause des coûts que du manque d’information. Si la plupart des particuliers exigent qu’on leur construise une maison selon les règles de l’art, en matière de développement durable, leurs revendications sont plus floues. Rares sont ceux qui s’engagent dans un processus de certification qui pourrait leur coûter jusqu’à 35 000 $. Par ailleurs, comme le souligne Roberpierre Monnier, "la plupart s’intéressent d’abord à la réduction des coûts énergétiques et au retour sur investissement". Du coup, l’environnement passe au second plan. On ne demande pas à l’entrepreneur de trier les déchets de construction, action pour laquelle il augmenterait sa facture de 10 %. On le laisse raser la végétation existante, parce que ça coûte moins cher à court terme. On asphalte et on sème du gazon parce que notre agent immobilier nous dit que ça fait plus propre.
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UNE ÉDUCATION À FAIRE
Pour Roberpierre Monnier, "il y a une grosse éducation à faire", notamment pour montrer au public que la construction écologique est abordable. Car si une certification est onéreuse, on peut la remplacer par les services d’un architecte spécialisé qui prendra dans les 600 $ pour une surveillance de chantier. Par ailleurs, si des technologies comme les systèmes photovoltaïques ou géothermiques sont encore très chères, on peut construire vert sans trop se ruiner. Voici quelques astuces données par Roberpierre Monnier pour faire du développement durable à petit prix:
– Orienter sa maison pour utiliser pleinement l’énergie solaire passive;
– Planifier des aménagements paysagers qui procurent ombre, fraîcheur et qui protègent du vent, quitte à payer l’entrepreneur plus cher au départ pour qu’il préserve la végétation existante;
– Réduire les surfaces gazonnées au bénéfice de plantes vivaces et contrôler l’érosion;
– Penser la fenestration selon l’ensoleillement;
– Investir dans la performance (étanchéité et isolation thermique) de l’enveloppe;
– Embaucher quelqu’un pour nettoyer le chantier et trier les déchets. Non seulement cela nous rend plus écologique, mais surtout cela nous évite de payer un plombier ou un menuisier 55 $ de l’heure pour faire le ménage avant de travailler!
Info: Roberpierre Monnier, architecte, M.Urb.
http://groups.msn.com/monnier-architecte1