Vie

Festival Mode et Design : Le carnaval de Montréal

"Festival de fashiontainment" (pour fashion et entertainment), "célébration de la mode", "free-for-all": ceux qui sont impliqués dans le Festival Mode et Design ne manquent pas d’adjectifs festifs pour le décrire. Parle-t-on de partys ou de défilés? Les deux!

Il y a huit ans, Chantal Durivage et Jean-François Daviau n’étaient pas encore à la barre de Sensation Mode, l’entreprise qui produit et diffuse les Semaines de mode de Montréal. Ils n’étaient pas encore le dynamique duo universellement respecté dans le milieu, celui qui a fait mentir les sceptiques qui ne voyaient aucun avenir pour la mode ici. Il y a huit ans, ils se faisaient la main avec leur premier Festival Mode et Design, un événement en plein boulevard Saint-Laurent. Quelques jours de défilés en plein air, de la musique à percer les tympans, une foule saoulée par l’alcool, la chaleur et la beauté des filles. La formule s’est raffinée au fil des années, mais les grandes lignes sont restées. Le Festival a fini par déménager ses pénates sur l’avenue McGill College, où la foule grandissante est un peu moins serrée, où les magasins sont tout près, où la folie du Grand Prix est à son comble. Le Grand Prix. Une période où "les touristes sont là, ils veulent acheter nos produits mais ils ne savent pas où les trouver, dit Jean-François Daviau. On voulait se servir de cette plateforme pour faire une promo à bas prix". Chose certaine, l’événement est fréquenté par près de 500 000 personnes chaque année. Et selon M. Daviau, c’est une excellente carte de visite pour Montréal sur le plan international: Berlin voudrait présenter un collectif au Festival, Tokyo et Dubaï ont manifesté un intérêt pour la formule et un média indien voudrait couvrir l’événement. "À une époque où l’on parle du branding des villes, le Festival positionne Montréal comme une ville de design", ajoute M. Daviau.

LA MODE AU PEUPLE!

Pendant cinq jours, une programmation touffue mélange donc allègrement designers et détaillants, marques locales et internationales. Les défilés de Levi’s, Guess, Reebok ou Le Château y côtoient ceux de Muse par Christian Chenail, de petits designers indépendants et de créateurs qui font dans la mode écolo. En tout, une cinquantaine de créateurs québécois seront présents d’une manière ou d’une autre, mais très peu pour un défilé complet. "Si je suis là cette année, explique Christian Chenail, c’est pour dire à ma gang: commencez à vous occuper de ça. C’est un véhicule efficace et peu dispendieux qui peut nous faire connaître au grand public. Cela rend le produit accessible." C’était certainement l’idée de Chantal Durivage et Jean-François Daviau lorsqu’ils se sont lancés dans l’organisation de cet événement: faire descendre la mode dans la rue, la rapprocher d’un public différent des médias et des acheteurs qui suivent les Semaines de mode. Du coup, "les standards de présentation ne sont pas les mêmes, dit M. Daviau. Le Festival, c’est du "fashiontainment". Ça parle aux gens. C’est complètement éclaté." Et ça adopte un ton pas mal plus racoleur: les défilés de maillots de bain et de lingerie fine (La Nuit des maîtresses, titre le spectacle) se déroulent dans une ambiance gonflée à la testostérone, courses de F1 obligent. "Mais on fait attention de ne pas choquer", explique M. Daviau, qui compare le spectacle de lingerie à l’incroyable show de strass et de paillettes que présente chaque année Victoria’s Secret. "On va à la limite de ce qu’on peut faire. En huit ans, il n’y a jamais eu de débordement, jamais un tata n’est monté sur la scène… Ça va siffler un peu, mais ce sont les femmes qui crient le plus quand les hommes sortent."

Élaine Léveillée, qui présente le défilé E.R.A. Vintage Wear, se réjouit de la foule bigarrée et de l’ambiance bien plus dégourdie que pendant un défilé traditionnel: "J’aime ça parce que c’est du vrai monde. Ma boutique, ça touche tout le monde, que tu viennes de Laval, de Brossard ou de Montréal. J’aime ça, avoir du monde normal qui ne fait pas partie du milieu de la mode." Selon elle, ce qui ne passerait pas dans le contexte d’une Semaine de mode – le mélange de créateurs et de marques hyper-commerciales – passe très bien dans celui du Festival: "C’est un free-for-all", dit-elle. "La mode d’ici part avec beaucoup de handicaps, ajoute Jean-François Daviau. On parle toujours de fermetures, on dit que c’est un milieu qui se plaint… Le Festival, ça vient briser ce carcan-là. C’est une fête."

La fête se déroule du 4 au 8 juin sur l’avenue McGill College. Info: www.festivalmodedesign.com.