Effet de mode passagère ou nouvelle fièvre du samedi soir? Il est sans doute trop tôt pour le dire. Pourtant, certains n’hésitent pas à comparer le style tecktonik avec la vague disco qui a déferlé sur les pistes de danse il y a tout juste 30 ans. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’une forme de danse comme d’une esthétique (sic) difficile à décrire.
Pensez à des jeunes en pleine crise d’épilepsie et sans leurs comprimés. Pensez au vidéoclip Vogue (1990) de Madonna. Enfin, pensez grands moulinets des bras, jeux de jambes, musique électronique et rythmes frénétiques. Tout ça ne vous dit rien (qui vaille)? Allez sur YouTube et tapez "tecktonik": vous allez tout voir et entendre.
Mais pour comprendre la tecktonik, c’est une autre paire de manches. C’est pourquoi, en ce samedi après-midi nuageux, nous avons rendez-vous au parc Jean-Drapeau avec Racha Tiar, organisatrice des happenings montréalais Meeting Electro. Lorsque nous arrivons sur place, en face du métro, les lieux ont déjà été envahis par une bonne cinquantaine de jeunes de 15 à 20 ans au look vaguement androgyne. Beaucoup sont coiffés en crête de coq, ont des baskets à damier aux pieds et sont vêtus de jeans cigarettes et de t-shirts fluo. Ils gigotent dans tous les sens au son d’une musique provenant d’un antique ghettoblaster. Racha, qui nous a repérés, mon photographe et moi, nous salue et explique: "Un Meeting Electro, c’est un rassemblement pour apprendre l’electrodance, faire des battles et former des teams. On partage notre passion, que ce soit au niveau de la danse, de la musique ou du style vestimentaire. C’est tout ça le mouvement électro. Ou tecktonik, si tu veux."
Racha (qui a tout juste 16 ans) et ses jeunes camarades préfèrent parler d’electrodance plutôt que de tecktonik. C’est que la tecktonik désigne moins un style de musique qu’une marque déposée, qui réfère d’abord aux fameuses soirées Tecktonik Killer en banlieue de Paris, où la danse du même nom est apparue au début des années 2000. Or, si sa popularité l’a rapidement hissée au rang de phénomène culturel en France et en Belgique, la tecktonik a fait depuis l’objet d’une vaste entreprise de récupération commerciale. Aujourd’hui, l’on parle des compilations musicales des soirées Tecktonik Killer, d’une marque de vêtements et d’une boisson énergisante, entre autres produits dérivés.
Cela n’a pas empêché Nick "Brutus Grass" Younes, jeune promoteur bien connu du nightlife montréalais, de s’inspirer librement du nom pour former le groupe TecktoniQ Montréal. Lancé il y a à peine quelques mois, ce groupe Facebook compte déjà plus de 800 membres. "Beaucoup de jeunes d’ici pratiquaient déjà la danse électro seuls dans leur sous-sol, et certains avaient même commencé à former des teams, explique Racha. Nick a un peu permis à tout le monde de se faire connaître et de se rencontrer, d’abord sur Facebook, puis grâce à des soirées organisées dans des clubs."
Mais la tecktonik, ou plutôt l’electrodance, se veut surtout une culture libre et gratuite, et surtout sans drogue ni alcool, selon Racha. Comme cet après-midi, où les danseurs se réunissent sur la place publique, dans un parc ou dans la rue, en apportant leur propre matériel de sonorisation et leur propre musique pour danser À Montréal, il existe quatre ou cinq teams, qui sont des groupes "officiels" dont les membres se réunissent régulièrement pour danser ensemble et développer leur propre style électro, telle la très énergique Electro-Family. Lors des Meetings Electro, que les initiés appellent aussi familièrement "Aprèms Electro", plusieurs teams s’affrontent ainsi amicalement dans des joutes dansantes, les battles. Le prochain Meeting aura d’ailleurs lieu également au parc Jean-Drapeau, le 14 juin prochain, entre 15 h et 19 h.
À quand un Meeting Electro en plein centre-ville? "Le problème, explique Racha, c’est que la Ville n’est pas très ouverte à ça. Soit elle refuse carrément de nous donner la permission de nous rassembler, soit elle nous demande jusqu’à 400 $ pour un permis. C’est franchement dommage que la Ville ne soit pas prête à appuyer des jeunes qui veulent occuper leur temps autrement qu’en regardant la télé ou en tagguant des murs."
CARNET D’ADRESSES TECKTONIK /
Pour danser (ou regarder danser) électro:
TecktoniQ Montréal (sur Facebook)
www.facebook.com/home.php?#/group.php?gid=6734139318
Meeting Electro (sur Facebook)
www.facebook.com/group.php?gid=9960273590c
Club 1234
1234, rue de la Montagne
514 395-1111
www.1234montreal.com
Pour s’habiller et se chausser électro:
American Apparel (vêtements)
8 boutiques à Montréal
www.americanapparel.net
Off The Hook (vêtements et chaussures)
1021, rue Sainte-Catherine Ouest
514 499-1021
www.offthehook.ca
X20 (vêtements et chaussures)
3456, rue Saint-Denis
514 281-0986
www.x20.com
Pour une coupe de cheveux électro:
Salon Funky Toque
3688, boulevard Saint-Laurent
514 985-2999
La plupart des salons de coiffure "urbains et branchés" peuvent vous faire des coupes électro; il suffit d’apporter une photo.