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Système léger sur rail : Dessine-moi un train

Pendant que Québec et Ottawa tardent à donner le feu vert à la construction d’un système léger sur rail (SLR) sur le pont Champlain, deux étudiants vont de l’avant et proposent leur propre design. De quoi aurait l’air le train idéal?

L’extérieur serait peut-être noir, les lignes aérodynamiques, la machinerie cachée. À l’intérieur, quatre zones associées à des activités différentes offriraient un confort maximal aux passagers. Ce n’est pas la "Batmobile" des trains, mais c’est pas mal plus chic que les wagons bleu et blanc du métro montréalais. Cela dit, les deux étudiants de l’UQÀM à l’origine du projet – Sophie Pelletier et Elvin Hélias – n’avaient pas à coeur de jeter de la poudre aux yeux. Leur système léger sur rail, ils l’ont conçu en fonction des besoins des passagers. "On essayait de donner une autre image du transport en commun en associant des activités aux zones qu’on était en train d’aménager", explique Sophie Pelletier.

CE QUE PASSAGER VEUT…

Dans la zone "Découverte", on peut rester debout pour observer le paysage à travers les grandes baies vitrées. Ailleurs, on peut s’asseoir dans un coin tranquille pour lire, transporter des bagages ou prendre un café. Afin de trouver ce concept polyvalent, les deux étudiants de 2e cycle de l’École de design ont fait des sondages auprès des usagers du métro. Ils ont observé, demandé, noté. Il en est ressorti un tas d’affirmations contradictoires: "Les besoins des passagers en termes de confort sont très difficiles à cerner, affirme Mme Pelletier. Cela change d’une journée à l’autre." En règle générale, les usagers préfèrent des formes fluides et aérodynamiques aux formes carrées. "Mais il ne fallait pas qu’on arrive à un train trop futuriste, qui ressemblerait trop à un TGV", dit Elvin Hélias. L’idée de cacher le plus possible les parties mécaniques vient d’une découverte faite pendant les sondages: "Les gens trouvaient que ça faisait vétuste de voir les parties mécaniques. Ils avaient l’impression que le train pouvait tomber en panne plus facilement", explique M. Hélias. Il leur a aussi fallu composer avec les consignes du réseau de transport de Longueuil: concevoir un train silencieux, fiable et confortable, avec une identité visuelle propre à Montréal. Difficile de jongler avec autant de contraintes et d’y trouver son compte en tant que designer? "C’est de la contrainte que naît la créativité, croit Elvin Hélias. Plus on a de contraintes et plus on va chercher des solutions originales."

LE SLR, UN PROJET QUI TARDE A ABOUTIR

S’il était enfin réalisé, ce train léger serait installé sur l’estacade du pont Champlain. Le pont le plus achalandé de la Rive-Sud, où la congestion est monnaie courante. On n’y compte en ce moment qu’une voie réservée aux autobus aux heures de pointe et délimitée deux fois par jour avec des cônes orange… Avec les inconvénients que l’on devine: le service d’autobus est souvent perturbé par la circulation, la voie réservée est souvent fermée, la limite de capacité est atteinte. Un système de train rapide, au contraire, ne serait pas affecté par les conditions météorologiques ou par la circulation. Il permettrait de rejoindre Montréal en 13 minutes, de transporter 20 000 passagers par heure et par direction (soit la capacité équivalente à trois ponts Champlain), de réduire l’émission de gaz à effet de serre (il fonctionnerait à l’électricité). Qu’attend-on pour le construire? La question semble en suspens quelque part entre Québec et Ottawa. Chose certaine, on parle de ce projet depuis les années 80, sans que rien ne soit fait. Mais à l’heure où les prix de l’essence brisent chaque jour de nouveaux records, l’idée d’un SLR se fait plus présente que jamais. "Le transport en commun, c’est quelque chose qui est vraiment en développement présentement à Montréal, croit Sophie Pelletier. Et le design, axé sur le confort des usagers, devient de plus en plus important." Son coéquipier et elle ont donc misé sur l’idée d’un train tout noir, noir comme une limousine ou une voiture de luxe. Avec ses grandes baies vitrées qui donneraient sur l’eau et la ville pendant que le train traverserait le pont, le projet qu’ils ont imaginé pourrait aussi devenir une attraction touristique. Son aménagement suffirait-il à attirer une nouvelle clientèle? Les deux étudiants croient que oui. Et ils donnent ici une démonstration brillante d’une manière de le faire.

Pour plus d’info: www.amt.qc.ca; www.rtl-longueuil.qc.ca