Vie

Québec de demain : Rêver Québec en 2058

Comment voyez-vous Québec dans une cinquantaine d’années? C’est la question que nous avons posée à quatre personnalités de la région. Elles ont accepté de sortir leur boule de cristal et de partager leurs rêves pour l’avenir.

La transformation viendra par les modes de transport. C’est ce que propose d’emblée la députée péquiste de Taschereau, Agnès Maltais. "Il est évident que dans 50 ans, on verra des changements majeurs dans le monde entier: il n’y aura presque plus de pétrole", note-t-elle. Cette ville, décrite par beaucoup comme une "ville de voitures", n’aura d’autre choix que de changer. Peut-être un ou deux lourds épisodes de smog l’y auront aussi poussée. Selon elle, un nouveau système de transport apparaîtra. Et même, qui sait, des automobiles électriques!

Sa ville, Agnès Maltais la voit aussi devenir capitale d’un État souverain siégeant à l’ONU, en lien direct avec l’international. "Ce sera possible de se rendre à New York en deux heures par train haute vitesse. À Boston également. Ces liens seront essentiels, car Québec fera partie des États d’Amérique", poursuit-elle. La capitale dont la députée rêve sera aussi une ville de cerveaux profondément transformée par l’industrie du savoir et des technologies.

Pourquoi cette vision? "C’est un peu les solutions que je vois aux problèmes qui sont actuellement en émergence. À cause de l’importance que ça pourrait donner à Québec, la capitale sera une ville qui aura réussi à éliminer une grande partie de la pauvreté", dit-elle. C’est qu’avec l’industrie du savoir viendrait aussi un accent tout particulier sur l’éducation. "Tout le monde sera mis à contribution. On va donner des outils afin que tous puissent y parvenir", conclut Agnès Maltais.

PERMIS DE RÊVER

Il faut bien se permettre de rêver un peu… Qu’y a-t-il de mal à ça? "Dans 50 ans, il faut que tous les gens aient leur permis de rêver. Que tu puisses te promener avec cette carte d’identité et que tu te permettes de rêver… et que les rêves deviennent réalité", lance d’entrée de jeu l’artiste Florent Cousineau, rappelant ces permis de rêver réalisés jadis par Les DéclencheurEs. Il faudrait aussi que ces rêveurs puissent observer l’art sur les toits. "En Europe, il y a beaucoup de buildings qui ont des oeuvres d’art, ton regard va toujours vers le ciel. C’est une autre façon de marcher que de regarder au sol, et ça amène un autre regard sur la ville", explique-t-il.

Bien entendu, le Québec de Florent Cousineau, dans 50 ans, aurait aussi connu de grands changements en transport, crise pétrolière oblige. On pourrait même imaginer un "recul" en matière de transport: un retour au cheval! "Ou encore, qui sait si on ne pourrait pas aller en ski de fond à son travail. On laisse une bordure au côté de la route pour les skieurs, à la manière d’une piste cyclable", propose-t-il. Et, selon lui, avec ces nouvelles manières de se déplacer viendraient de nouvelles manières de voir la ville.

Mais surtout, il espère qu’on verra dans 50 ans un retour à la machine humaine. "On a cette force-là en nous. Pourtant, on s’en remet toujours à la machine comme substitut. La force de l’humain: dans 50 ans, c’est là-dessus qu’il faut tabler", estime Florent Cousineau. Que la ville soit plus humaine. Que l’humain en soit le centre.

UNE VILLE CULTURELLE

Avec l’humain vient souvent l’art, la culture. Ce qui, dans 50 ans, pourrait également devenir lieu de rencontre, selon la directrice artistique du Théâtre Périscope, Marie-Ginette Guay. "J’aimerais que les lieux de culture soient investis davantage", dit-elle. Du théâtre à la musique, en passant par les arts visuels. "La culture brise l’isolement. On débarque du quotidien. On rêve. On côtoie nos voisins. On se parle. On s’aperçoit qu’on est plusieurs dans la même histoire", explique Mme Guay. Bref, que les lieux de culture soient une véritable place publique. "Les gens font des choses dans toutes sortes de secteurs: il faut qu’il y ait des liens entre ces gens-là", ajoute-t-elle.

Au bout du compte, on devrait peut-être s’inspirer de la vitalité dont Québec fait preuve, actuellement, avec le 400e anniversaire. "J’aimerais, dans 50 ans, voir une ville où les gens sont dehors. Dehors l’hiver, avec des belles joues roses, ça se peut aussi", poursuit la directrice artistique du Périscope. À travers tout cela, elle s’imagine aussi Québec comme une ville de théâtre, reconnue à travers le monde. "Je vois Québec comme une ville de référence pour la création théâtrale. Qu’on transite par Québec, et que la ville rayonne à travers le monde", continue Marie-Ginette Guay.

CROISÉE DES CHEMINS

Ce Québec dont plusieurs rêvent est possible… Mais, le rêve pourrait également se transformer en cauchemar. Ainsi, Québec est à une croisée des chemins selon Nicolas Lefebvre-Legault, coordonnateur du Comité populaire Saint-Jean-Baptiste. "Soit la situation actuelle continue et cette espèce de courant populiste demeure. On peut facilement rester dans notre confort, se dire: on ne fait rien, on ne bouge pas", explique-t-il. Pour lui, dans une cinquantaine d’années, Québec pourrait ainsi continuer de faire du sur-place, éviter les grands projets de peur de dépenser. "Mais, on peut également aller de l’avant et améliorer la qualité de vie qu’on a", ajoute-t-il.

Bien entendu, pour lui, cette deuxième option serait préférable. Un Québec donc, qui relèverait avec brio les défis des transports, de l’environnement urbain et de la démographie. "Et dans ce Québec, quelle place on donnerait au monde ordinaire, aux gens qui ont moins de revenus dans les quartiers centraux?" lance M. Lefebvre-Legault. Il espère ainsi voir une ville qui aura trouvé un équilibre à l’intérieur même de sa population, de ses milieux de vie.

L’idéal dans 50 ans selon Nicolas Lefebvre-Legault? "Une ville qui fait de la place à tout le monde, qui permet aux jeunes de prendre leur place au lieu de devoir s’expatrier, qui offre également des conditions de vie agréables, une ville où on a réussi à garder ce qui est essentiel, où la culture peut s’épanouir, où les citoyens ont le contrôle de leur quartier."