UNE VIEILLE DAME "BRANCHÉE"
Contrairement à ce que l’on peut penser, pendant deux siècles, Baccarat, fondée en 1764, a non seulement inscrit son développement dans son temps, mais en a aussi épousé toutes les tendances. En 1855, la cristallerie obtient une médaille d’or à l’exposition universelle de Paris. Dès le 19e siècle, elle est le fournisseur des plus grands de ce monde, du tsar de Russie Nicolas II au président Franklin D. Roosevelt, en passant par la Maison impériale du Japon.
Avec l’essor de la parfumerie au début du siècle dernier, elle fournit les flacons des François Coty (l’inventeur de la parfumerie moderne), Elizabeth Arden, Guerlain, Dior, Versace et autres Lancôme… En 1916, bien avant la naissance du design aux États-Unis dans les années 1930, elle prend comme directeur artistique un jeune artiste, Georges Chevalier, qui va entièrement remodeler l’image de la marque et profondément influencer l’art verrier jusqu’au début des années 1960.
L’ENDORMISSEMENT DE LA VIEILLE DAME
Dans les années 1970, Baccarat s’endort sur ses lauriers. "Il y a bien eu des associations intéressantes, mais cela restait confidentiel. En général les collaborations avec des designers étaient franco-françaises", rapporte Chantal Granier, la directrice artistique de Baccarat.
Pourtant, Baccarat s’associe avec des designers ou des artistes de renom, comme Salvador Dali, Roberto Sambonet, Van Day Truex, Pascal Mourgue ou Andrée Putman. Mais souvent, il ne s’agit que de "rencontres", comme les appelle pudiquement la maison française, collaborations ponctuelles qui débouchent sur la création d’éditions limitées. Le catalogue de base, lui, n’est pas touché.
UN RÉVEIL PRUDENT
Dans les années 2000, Baccarat décide de frapper un grand coup médiatique. En 2003, Philippe Starck a carte blanche pour repenser l’intérieur du nouveau siège social de la marque. De 2005 à 2007, le designer iconoclaste revisite à sa façon la tradition oubliée du cristal noir de Baccarat, avec sa collection "Darkside". Depuis, le designer Arik Levy poursuit ce processus de rajeunissement, en changeant les méthodes de fabrication pour réinventer la taille des objets et s’affranchir des motifs traditionnels.
Malgré tout, l’évolution de Baccarat est loin d’être révolutionnaire. Stark qui, à l’instar de sa chaise "Louis Ghost", aime revisiter les archétypes, n’a rien changé aux formes traditionnelles, chères à Baccarat. De son côté, Arik Levy qui, avec son "Phantom", épure un lustre traditionnel en ne conservant étrangement qu’une de ses branches, n’en préserve pas moins le classicisme original. En fait, comme le souligne Chantal Granier, "c’est une marque qui s’est embourgeoisée avec le temps. Pour répondre aux souhaits de notre clientèle, nous devons donc tendre vers un équilibre entre une modernité nécessaire et nos racines art déco inaliénables…"
Info.: www.baccarat.com