"Les gens oublient parfois que la forêt est un organisme vivant. Ils font des gestes qui semblent anodins, mais qui ont des conséquences sur la nature. Ils agissent ainsi par ignorance, pas par mauvaise conscience", affirme Jeff Thuot, membre de Sans Trace Canada, un organisme qui vise à sensibiliser les adeptes du plein air quant à leur impact sur la nature. Guide de plein air chevronné – il a 30 ans d’expérience derrière l’anorak -, il était de passage à la boutique La Cordée le 28 septembre dernier pour donner un atelier sur les principes prônés par Sans Trace. En voici un aperçu.
GÉRER SES ORDURES
"La gestion des déchets, c’est l’aspect le plus difficile lorsque l’on part en excursion de plein air, soutient Thuot. Cela nécessite beaucoup d’organisation. Il faut planifier les repas à l’avance pour faire le moins de déchets possible, et les ordures inévitables, on les met dans des sacs Ziploc." Pas question, donc, de jeter quoi que ce soit dans la nature, aliments biodégradables inclus. "La nourriture attire les animaux. Non seulement ça déstabilise leur environnement naturel, mais ils ne sont pas faits pour la manger. Ça peut les rendre malades." Faites donc gaffe aux restes de table, notamment lorsque vous lavez la vaisselle. Ne la lavez pas n’importe où, surtout pas dans un cours d’eau. Et ce, même si vous utilisez du liquide à vaisselle bio. Le savon est un dégraisseur, ce qui peut être nocif notamment pour les canards, qui ont besoin de leur huile naturelle pour se protéger du froid. Jeff Thuot suggère plutôt de transporter l’eau souillée de la vaisselle à 70 mètres de tout cours d’eau. Et puisque l’on parle de vaisselle, assurez-vous d’en utiliser pour manger vos hot-dogs. Ça vous évitera de laisser tomber des miettes. Si vous vous gavez de saucisses aux ingrédients douteux, c’est votre problème, pas celui des bêtes sauvages.
LE DROIT CHEMIN
Selon Jeff Thuot, il est primordial que tout adepte de plein air soit conscient des surfaces durables qui l’entourent. Le mieux, c’est d’utiliser les dalles rocheuses, le gravier, l’herbe sèche, la neige et, surtout, les sentiers existants. "Beaucoup de gens aiment sortir des sentiers battus, soit pour prendre des raccourcis, soit pour camper à l’écart des autres, dit-il. C’est un problème, ça met en danger des centaines d’organismes vivants qui se trouvent au sol." En fait, la seule bonne raison de vous écarter du droit chemin, c’est pour vos envies naturelles. Avouons-le, il est moins intimidant de s’accroupir sous le regard d’un orignal que sous ceux des autres randonneurs. Évacuez le tout dans un trou, que vous recouvrirez de terre et de matières organiques telles que des feuilles mortes et des brindilles. Qu’en est-il du papier hygiénique? Mieux vaut utiliser du papier naturel: des pierres ou des feuilles. Si vous craignez de vous érafler, vous devrez trimballer votre papier souillé dans votre baluchon. À vous de choisir.
AU FEU!
Bien des gens ne peuvent s’imaginer partir en excursion dans le bois sans faire de feu. Si vous êtes de ceux-là, assurez-vous de l’allumer là où c’est permis. Si vous êtes en kayak de mer et que vous faites une halte sur le rivage pour la nuit, Jeff Thuot vous conseille de faire votre feu dans la partie inondable de la plage. "Elle est toujours remise à jour par la marée, qui se charge de ramener les bactéries et les enzymes nécessaires à l’écosystème." Dans tous les cas, ne jouez surtout pas les bûcherons. Utilisez plutôt les branches mortes qui traînent au sol. Au dire de l’expert, celles-ci ne devraient jamais dépasser la grosseur de votre poignet. De cette façon, le feu ne risque pas de s’éterniser et d’être laissé à lui-même lorsque vous quitterez les lieux. Un feu de forêt est si vite arrivé. Si vous croyez qu’il s’agirait d’une manière très efficace de faire disparaître vos traces, vous avez tout à fait raison. Mais de grâce, tracez-vous des limites!
Sans Trace Canada
www.sanstrace.ca