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Travailleur autonome : Travail à la demande

Le nombre de travailleurs indépendants a fait un bond au Québec au cours des 20 dernières années. Effet de la crise ou changement de mentalités, pour beaucoup d’entreprises, le travailleur autonome, c’est le beurre et l’argent du beurre…

Consultants, contractuels, ils travaillent pour les entreprises… en marge des entreprises. Les travailleurs autonomes sont de plus en plus nombreux. En 20 ans, leur nombre a augmenté de 40 %, selon l’Institut de la statistique du Québec. Après une baisse à la fin des années 1990, la catégorie a tranquillement gonflé dans les années 2000 et, en 2007, plus de 550 000 Québécois se déclaraient travailleurs autonomes.

"C’est une évolution logique, suite aux récessions", explique Jean-Benoît Nadeau, auteur du Guide du travailleur autonome. "L’augmentation – ou la réduction – du nombre de travailleurs autonomes est à mettre en lien direct avec le contexte économique. On a vu beaucoup de travailleurs se mettre à leur compte au début des années 1990, suite à la récession économique. C’est le même phénomène auquel nous assistons aujourd’hui."

C’est dans le secteur des services qu’on trouve la quasi-totalité des travailleurs autonomes, particulièrement dans le domaine des services professionnels, scientifiques et techniques, qui emploie, à lui seul, près de 85 000 travailleurs autonomes. Avocats, comptables, ils agissent de plus en plus à titre de consultants externes pour les entreprises. Viennent ensuite les domaines du commerce (représentants), et le secteur de la santé et de l’assistance sociale.

La plus forte augmentation au cours des 20 dernières années a, par ailleurs, été enregistrée dans le domaine de l’enseignement (près de 440 % d’augmentation). "Certains secteurs s’y prêtent mieux que d’autres, souligne Jean-Benoît Nadeau. Il est bien évident que les médecins sont mieux placés pour embrasser ce statut, et pas les ingénieurs, qui oeuvrent dans le cadre d’un travail très collectif." Les domaines de la presse et du marketing sont, eux aussi, reconnus pour leur recours massif aux pigistes.

"Pour certains types d’industrie, c’est une question de survie, dit Jean-Benoît Nadeau. La presse, par exemple, ne pourrait pas survivre sans les pigistes, au sein desquels elle trouve constamment un vivier de nouveaux talents. C’est une réserve de créativité incontrôlée et branchée sur d’autres réalités." Il précise néanmoins que le système connaît ses limites: "Une entreprise ne peut être viable à long terme que si elle repose sur une équipe permanente."

Avantageux pour les entreprises, le recours aux travailleurs autonomes couvre parfois aussi une autre réalité: "Il faut savoir que derrière les chiffres se cachent beaucoup de faux travailleurs autonomes, dit Jean-Benoît Nadeau. Ce sont d’anciens employés, qui ont été licenciés par l’entreprise puis réembauchés, à titre de contractuels ou de consultants captifs, le plus souvent de manière temporaire, en attendant une conjoncture plus favorable."

Ces contractuels ou consultants ne répondent pas entièrement aux critères définissant le travail autonome: ils travaillent le plus souvent dans les locaux de l’entreprise, avec un matériel qui appartient à cette dernière, et ne gèrent pas totalement leur emploi du temps, sans pour autant bénéficier de la convention collective ni des avantages de la vie de bureau, un statut parfois litigieux.

À LIRE /
Le Guide du travailleur autonome
de Jean-Benoît Nadeau
Québec Amérique, 2000, 360 p.