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Concours d’illumination du Gesù : Et la lumière fut

Le Gesù a dévoilé la semaine dernière les noms des gagnants du concours d’idées pour l’illumination de sa façade. Le début d’un long processus de réflexion autour de l’identité lumineuse de la plus vieille salle de spectacles en activité au Québec.

En octobre, le Gesù lançait, en collaboration avec le Partenariat du Quartier des spectacles et Design Montréal, un concours d’idées international pour la mise en lumière de sa façade. Des étudiants et des designers professionnels du monde entier ont répondu à l’appel, du Canada à l’Inde, en passant par le Brésil et l’Europe. Au total, 37 propositions ont été reçues et ont fait l’objet d’une exposition au Gesù, laquelle se termine le 28 mars.

"Je m’attendais à voir se répéter un peu le même genre de projet; en fait, j’ai été surpris par leur diversité", commente l’architecte Éric Gauthier, président du jury qui a procédé à la sélection des trois lauréats du concours. "Certains étaient ludiques, d’autres plus graves, avec des accents dramatiques, et d’autres adoptaient une démarche métaphorique."

Même diversité dans le choix des lauréats. Le premier, une jeune firme de design montréalaise, BCK design, a voulu évoquer la lumière vacillante des bougies qui éclairaient les églises d’autrefois. Le deuxième prix, remporté par les concepteurs montréalais Martin Labrecque et Jean Laurin, propose de faire de la façade un immense rideau rouge virtuel. La troisième proposition, des architectes new-yorkais James Long et Athena N. Anders, utilise la vapeur d’eau pour représenter la fumée qui s’échappe des encensoirs des églises.

COMMENT ÉCLAIRER LE GESÙ?

L’intérêt du concours n’aura pas tant été d’offrir des solutions d’éclairage toutes faites que d’entamer un processus de réflexion autour de l’identité du Gesù et de sa place au sein du Quartier des spectacles. Comme le souligne Marilyn Carnier, directrice artistique de la salle: "Notre édifice est complexe; c’est à la fois une salle de spectacle, un lieu d’exposition et une église."

Seule église typiquement de style baroque à Montréal, le Gesù a été construit en 1865, à partir des plans de l’architecte Patrick C. Keeley, qui s’est largement inspiré de l’église du Gesù de Rome. Conçu initialement pour abriter la chapelle et la salle académique de l’ancien collège Sainte-Marie, le Gesù ne deviendra une salle de spectacle qu’en 1923 (aujourd’hui, la plus ancienne encore en activité au Québec). Il verra naître de jeunes talents d’alors, comme Hector Charland et Paul Langlais.

On peut comprendre, dès lors, qu’éclairer la façade du Gesù ne pouvait pas se réduire à une illumination purement esthétique. Les concepteurs ont dû d’abord se pencher sur cette identité ambiguë de l’édifice avant de proposer une intervention qui en tienne compte. "Ce que nous cherchions, c’était des idées pour mieux comprendre comment nous pouvions mettre en scène notre identité et avec quel genre de budget", explique Marilyn Carnier.

ET APRÈS…

En janvier et février, un millier de bulletins de vote ont été déposés pour déterminer le Prix du public: la proposition des Montréalais Jonathan Barro et Stéphane Caissy de Montréal, qui redessine le Gesù et fait de sa façade un écran vidéo dynamique. En fait, hormis la signature du Quartier des spectacles imaginée par Ruedi Baur (les fameux points rouges lumineux), qui devrait apparaître devant l’édifice d’ici la fin de l’année, la mise en lumière du Gesù est encore à définir.

Et est-ce une mauvaise chose? Sûrement pas, pense Marilyn Carnier: "Nous ne recherchons pas un éclairage temporaire, mais une mise en lumière qui nous ressemble et ne vieillisse pas. Il va ressortir de cet exercice un projet qui va sans doute être proche des propositions, mais nous avons encore du travail à faire." Plutôt qu’un pré-projet, il faut voir dans le résultat du concours d’idées la matière à une réflexion sur la façon de mettre en valeur adéquatement le Gesù. Faut-il dissocier l’entrée du théâtre de l’église et faire des escaliers un signal lumineux que l’on voit de la rue Sainte-Catherine (voir la proposition du premier prix)? Faut-il projeter sur la façade des silhouettes d’acteurs et faire de l’entrée une scène, comme le suggère le deuxième prix? La semaine dernière, le Gesù organisait un débat public pour nourrir cette réflexion.

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