Longeant le Saint-Laurent sur 2,5 km, la promenade Samuel-De Champlain ouvre le bal. "Elle redonne un accès privilégié au fleuve et permet aux visiteurs d’entrer en contact avec diverses oeuvres d’artistes québécois", s’est enthousiasmée Valérie Saint-Pierre, directrice du Collectif Regart, qui a tenu jusqu’à dimanche dernier l’exposition L’Art public à Lévis. Inaugurée le 24 juin 2008, la promenade se situe entre la côte de Sillery et la côte Ross. Pour son 400e anniversaire, la capitale a reçu cet aménagement du territoire en cadeau du gouvernement québécois. Ravie de cette réalisation, Mme Saint-Pierre invite les Québécois et les touristes à parcourir la station des Quais et ses quatre jardins ponctués de sculptures. "Les dénivellations ondulatoires qui parcourent ces espaces et des oeuvres telles que Là où la terre fait danser les mâts d’Yves Gendreau et Plonger d’Hélène Rochette rappellent la culture maritime de Québec", a souligné la directrice. La promenade est en lice pour le 25e Prix d’excellence en architecture de l’Ordre des architectes du Québec.
Au bout de ce trajet s’érige le patrimoine industriel. Les silos de la Bunge, mis de l’avant grâce au Moulin à images de Robert Lepage, marquent le Vieux-Port, selon Luc Lévesque, théoricien de l’architecture contemporaine. "C’est une sorte de panthéon, les silos sont à une échelle démesurée", a soutenu l’historien, pour qui les réservoirs à grains imitent un temple grec dont on ne verrait que les colonnes et l’entablement. Cette architecture industrielle servira cet été encore d’écran de projection à l’équipe d’Ex Machina.
Non loin de là s’impose la Gare du Palais, âgée de 84 ans. Avec son allure de château médiéval, son horloge et son immense fenêtre, la bâtisse incarne le lieu de la rencontre, selon Florent Cousineau. À raison, car elle a accueilli dès son origine les trains du Canadien Pacifique reliant le Lac-Saint-Jean à Québec. Fermée en 1976 et rouverte en 1985, la gare abrite depuis les trains passagers de VIA Rail Canada et sert de gare routière pour plusieurs compagnies d’autocars.
"C’est aussi notre nombril du monde à nous", a indiqué M. Cousineau en parlant de la verrière imprimée d’une carte de l’Amérique du Nord, au-dessus du hall du bâtiment. L’édifice a été désigné gare ferroviaire patrimoniale par la Commission des lieux et monuments historiques du Canada.
De nouveau dehors, les eaux de la sculpture-fontaine Éclatement II s’écoulent avec fracas. Quel choc visuel entre l’oeuvre cinglante de fluidité de Charles Daudelin et l’imposante majesté de la gare.
On clôt la boucle en remontant vers la haute-ville. L’aménagement de l’avenue Honoré-Mercier est le coup de coeur de Paul Bourassa, responsable du développement des secteurs architecture, arts décoratifs, design et métiers d’art au Musée national des beaux-arts du Québec. À l’origine des travaux entamés en 2002, le mobilier devait rendre l’avenue à ses riverains, ses passants, ses automobilistes. Il est constitué de trois îlots thématiques délimités à l’aide de bornes de protection piétonnes et semés de mâts de signalisation. Un exemple réussi du mariage entre l’esthétique et l’utilitaire. En partie réalisé par le designer industriel Michel Dallaire, l’aménagement matérialise la transition entre le Vieux-Québec, désigné arrondissement historique par l’UNESCO, et le quartier Saint-Jean-Baptiste.
Une rencontre entre l’histoire et le présent. Un mélange des genres qui fait le charme d’une ville dont on ose tremper l’ancestrale beauté dans les eaux troubles de l’art actuel pour en mettre plein la vue.