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Aéroports de Montréal : Cachez-moi ce chantier…

En pleins travaux de rénovation, ADM (Aéroports de Montréal) confie ses palissades à Mikaël Mourgue, de l’agence de publicité Beauchemin, pour créer. Essai transformé.

Depuis les années 1990, l’aéroport Montréal-Trudeau est bouleversé par une série de chantiers qui visent à augmenter sa capacité d’accueil. Pour éviter que ces travaux ne créent un environnement hostile, ADM s’est engagé depuis longtemps dans des campagnes d’embellissement des espaces affectés par les rénovations et agrandissements en cours. "Depuis 2002, on a toujours eu le souci d’habiller les palissades de nos chantiers afin de non seulement guider les voyageurs à travers l’aéroport, mais aussi de rendre l’environnement le plus convivial possible", souligne Christiane Beaulieu, vice-présidente relations publiques d’ADM.

Une nouvelle étape a été franchie avec le projet que vient de réaliser l’agence de publicité Beauchemin, qui depuis plusieurs années participe à la promotion de l’aéroport de Montréal. L’idée de base était de signaliser les boutiques de la zone commerciale de la jetée transfrontalière États-Unis/Canada, malgré la présence des palissades de chantier. Plutôt que de se contenter d’un marquage au sol ou de couleurs identifiant des zones, l’agence de publicité et ADM ont opté pour la création d’un véritable univers graphique définissant l’identité d’une zone autour du voyage, de l’architecture du lieu et du Canada.

ENVIRONNEMENT MOINS ENNUYEUX

"Quitte à animer la zone, on s’est dit qu’on pourrait choisir un concept original dépassant le simple message "nous travaillons pour vous" et créer un environnement moins ennuyeux pour les voyageurs", explique Christiane Beaulieu.

"J’ai proposé un concept d’écriture iconographique mêlant logos des franchises présentes dans la zone, symboles du voyage et du Canada et plans techniques stylisés venant évoquer l’architecture du lieu", précise Mikaël Mourgue, concepteur du projet pour l’agence Beauchemin. Ce jeune designer français, installé à Montréal depuis trois ans, s’est toujours démarqué par une créativité non conventionnelle. En France, c’est à lui qu’on doit les suremballages personnalisés qui faisaient la nique aux mentions légales obligatoires sur les paquets de cigarettes. À Montréal, il a présenté en 2006 sa montre TIME-IT, sans aiguilles ni cadran. Aujourd’hui, à l’aéroport Dorval-Trudeau, il propose un environnement dynamique fait de totems suspendus en deux dimensions, d’un compte à rebours graphique et d’un langage iconographique qui nous fait vivre une expérience ludique dans un espace en mutation.

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UN NOUVEL ESPACE DE CRÉATION

En Europe, il est devenu monnaie courante "d’habiller" les bâtiments à caractère patrimonial lors de leur rénovation en masquant les échafaudages avec une bâche peinte. Il s’agit souvent d’un trompe-l’oeil reproduisant le bâtiment, comme à la porte de Brandebourg à Berlin, la tour Saint-Marc à Venise ou le musée du Louvre à Paris. Plus près de nous, les magasins la Baie de Toronto, Montréal et Vancouver ont utilisé ce procédé lors de leur ravalement de façade en 2007, de même que l’hôtel de ville de Montréal à l’heure actuelle. Plus originales sont la malle géante qui a caché en 2006 les travaux de la boutique Louis Vuitton des Champs-Élysées ou la toile géante qui enveloppait le nouveau Musée Magritte de Bruxelles d’une oeuvre du peintre.
Mais la vraie originalité est aujourd’hui d’utiliser les chantiers pour faire vivre une expérience au public en créant l’identité d’un lieu en transition. C’est le cas des autocollants signalétiques de l’aéroport de Montréal, mais aussi des panneaux narratifs conçus par Orange Tango qui ceinturent aujourd’hui le square Dorchester. À Londres, la jeune designer montréalaise Mélissa Mongiat s’est fait remarquer en 2005 en réalisant des installations interactives combinant les sons, les mots et le jeu sur la palissade du chantier de rénovation du Royal Festival Hall. Plus spectaculaire encore, pour accompagner les travaux de démolition d’une barre d’habitations à loyer modéré à Lyon, l’édifice a été transformé en musée éphémère fait de murales, mobiles et sculptures insolites. En début d’année, sa façade a été peinte d’un arc-en-ciel géant et d’ici sa démolition prévue pour la fin de l’année, 500 mètres de palissade du chantier serviront de toile éphémère à plusieurs artistes…