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Danse gitane et le flamenco : Gitanes et flamencas, toutes aficionadas!

Depuis Don Juan, la danse gitane et le flamenco font de plus en plus d’adeptes dans la région de Montréal. Féminité exacerbée et affirmation de soi, on tape du pied et on part ailleurs, loin du quotidien.

Elles ont en commun une passion pour leur art, sa maîtrise, et portent une attention toute particulière aux termes employés pour parler de ce qui les anime. Myriam Allard, de la compagnie La Otra Orilla, enseigne le flamenco traditionnel, celui qu’elle a appris. "Un peintre ou un musicien doit avoir une base avant de s’en éloigner", explique-t-elle. La musique est l’élément central de cet art. "La source, l’essence du flamenco se trouve dans le chant. On donne des classes techniques, mais aussi chorégraphiques où, là, la trame sonore est constituée de guitares et de chants."

Francine Tellier, professeure de danse gitane au Studio Nomadia et à Corps et âme en mouvement, ajoute: "À l’origine, le chant des gitans, leur musique étaient très joyeux. À travers leur grand voyage du Rajasthan jusqu’à l’Europe, ça a été de plus en plus difficile, et ce chant est devenu une complainte. C’est viscéral, ça exprime une blessure." Le musicien Paco de Lucia a initié le mouvement du flamenco nuevo, et certains danseurs et professeurs se tournent aussi vers cette musique. C’est le cas de Julia Cristina, fondatrice, du Centre de danse flamenco. "J’aime utiliser le flamenco nouveau, mais bien structuré. Les musiques les plus appréciées de mes étudiants sont celles qui ont été créées hors d’Espagne. Ça fleurit partout, notamment au Chili."

Pour le bénéfice des non-initiés, le flamenco peut-il être considéré comme une danse gitane? "Tout à fait!" de répondre Myriam Allard. "Je dirais, avec des réserves, qu’au Québec, non. Mais en Espagne, c’est clair et net. Les gitans font quelque chose de beaucoup plus instinctif, plus animal, moins stylisé."

RENCONTRE AVEC SOI-MÊME

Le flamenco et la danse gitane ont gagné en popularité au cours des dernières années, popularité qui aurait atteint son paroxysme avec la comédie musicale Don Juan. "Nos classes ont alors débordé", se souvient Julia Cristina, qui ajoute: "J’ai formé des gens qui font carrière maintenant, qui fondent aussi des écoles." Les trois professeures s’accordent à dire que l’intérêt du public – et par conséquent des programmateurs – est grandissant. Francine Tellier, qui enseigne plusieurs disciplines et, depuis 2002, la danse gitane de style Kalé, renchérit: "Les nouveaux cours que j’ouvre, c’est en gitan." La danse gitane de style Kalé, c’est une fusion, nous apprend-elle. "Je suis formée en danse orientale, en danse indienne et en flamenco, je vais donc chercher dans ces trois genres. Les élèves apprennent des rythmiques différentes."

Quand on cherche à savoir ce qui motive les élèves, majoritairement des femmes, on apprend bien des choses… Notamment, que beaucoup y voient une manière cathartique de laisser aller leurs émotions. "C’est une danse très affirmative, très forte. Juste le fait de frapper au sol, par exemple, représente le caractère. Les mouvements sont parfois agressifs, toute la rythmique aussi compte. C’est très stimulant pour les élèves", nous apprend Myriam Allard. L’image de la femme parfaite telle que définie en Amérique du Nord est ici laissée à la porte, comme l’explique Julia Cristina. "Le flamenco, c’est une rencontre avec soi-même. Ça vient avec la féminité et le désir d’aller plus loin. On va découvrir une personne qui nous habite très profondément, on fait éclore cet être-là que certaines élèves n’ont jamais vu elles-mêmes." Francine Tellier voit se présenter des femmes de tous âges. "C’est unique, je n’ai pas vu ça dans mes cours de baladi, par exemple. Il y a peut-être aussi un sentiment de liberté exploratoire, les élèves expriment toutes leurs facettes. La sensualité, la tristesse ou même la colère sont des sentiments exprimés par des jeux de pieds, des mouvements de châle. Dans la vraie vie, on n’est pas juste cute, fine!" Ce qui n’empêche pas les moments de grâce…

"Ça arrive régulièrement. À un moment donné, une étudiante devient flamenca sous mes yeux. C’est souvent une femme qui a un physique de contre-emploi, à l’opposé de ce que l’on attend d’une danseuse de flamenco. Mais parce qu’elle veut, parce qu’elle se travaille, une émotion intense se dégage d’elle. C’est son travail et c’est le mien, c’est mon jardin qui fleurit, raconte Julia Cristina. On sème à l’automne, et on récolte en mai-juin mais, parfois, on voit des perce-neige."

CARNET D’ADRESSES /

La Otra Orilla, Studio Pleamar, Montréal: www.laotraorilla.net

Centre de danse flamenco, Studio Bizz, Montréal: http://julia.cristina.tripod.com

Studio Nomadia, Saint-Eustache: www.francinetellier.ca

Corps et âme en mouvement, Studios Marmier, Longueuil: www.corps-et-ame-en-mouvement.org