Dans son livre de 2004, Emotional Design, Donald Norman, professeur émérite en sciences cognitives, évoquait pour la première fois le concept de design émotionnel, un design non seulement fonctionnel, mais capable de toucher les émotions. Il s’agissait alors de design d’objet. En début d’année, le magazine Novum considérait l’agence de design graphique québécoise Paprika comme l’un des chefs de file mondiaux du design émotionnel. On ne parle plus ici de l’émotion au service du design d’objet, comme l’entendait Donald Norman, mais des émotions que génère le design d’un environnement. Car, outre des produits imprimés, Paprika sait créer des univers à partir d’un traitement graphique de l’espace.
L’EXPERIENCE AU COEUR DE L’EMOTION
Le design émotionnel, en voulant atteindre la subjectivité de l’individu pour mieux le séduire, crée des expériences sensorielles. Donald Norman disait que le design d’un objet devait offrir un plaisir visuel et tactile. En matière d’architecture intérieure, l’un des domaines de prédilection de cette recherche d’émotions est l’hôtellerie. Après les hôtels-boutiques qui cultivaient les sensations de cocooning (bien comme chez soi au point d’en rapporter à la maison la literie et les produits pour le bain), les hôtels se sont mis en devoir de proposer à leur clientèle des expériences de vie originales.
Comme le soulignait le consultant international Otto Riewoldt, "l’hôtel devient un lieu où le visiteur peut mettre en représentation ses désirs et apprendre davantage sur lui-même". L’une des manifestations les plus spectaculaires de ce phénomène est sans doute le Puerta America, aux abords de Madrid, qui propose aux amateurs de sensations fortes un design intérieur époustouflant réalisé par 19 des plus grands designers d’aujourd’hui.
UNE MODE?
"Je pense que la notion de design émotionnel est une mode. En fait, le principe de générer des émotions en design est quelque chose que l’on fait depuis toujours", estime Louis Gagnon, directeur de la création de Paprika. En architecture, les notions d’éthique (le bien-être des usagers), d’émotion (les plaisirs visuels, olfactifs et tactiles), de fonctionnalité (usages) et de culture (adaptation de l’espace en fonction des moeurs et croyances) ne datent pas d’hier non plus. "Ça a toujours été présent chez les architectes. En fait, c’est le public qui a changé. Il recherche davantage de stimulations pour se sentir mieux…"