La lumière est tamisée et le bar est vide. Un homme vêtu d’un complet apparaît sur scène dans un éclairage rappelant la disposition d’un store devant une fenêtre. Il commence tranquillement à se dévêtir. Difficile de se sentir plus voyeuse qu’en ce moment. Heureusement (ou non?), la propriétaire Annie Delisle apparaît dans le décor. "Andrew répète son nouveau numéro imaginé par la comédienne Brigitte Poupart. Ça rappelle Eyes Wide Shut, non?" interroge-t-elle au moment même où Andrew atteint le moment le plus chaud de son numéro. Sans une centaine de femmes criant et brandissant de l’argent dans les airs, la scène provoque un tout autre impact. Appelons-le malaise. "Andrew a commencé à danser ici à l’âge de 18 ans, il en a maintenant 40! Dis-toi que ça ne le gêne plus trop de se promener nu… En même temps, je t’avoue que ce n’est jamais la partie préférée du travail des gars. Aussi joli soit-il, la fierté d’un homme passe encore beaucoup par son pénis", philosophe candidement la femme à la tête du seul bar de danseurs pour clientèle féminine de Montréal, Annie Delisle, qui a repris le commerce créé par son père il y a 30 ans. Celle qui se dirigeait vers une carrière en communication se rappelle l’impact qu’a eu l’ouverture du bar alors qu’elle n’était âgée que de 10 ans. "Les féministes se sont un peu emparées de l’idée. Plusieurs femmes ont vu ça comme une revanche et la possibilité de créer des hommes-objets. La vérité, c’est que mon père a simplement voulu offrir le même genre de divertissement qu’il donnait déjà dans son bar de danseuses, le 321." Après avoir confirmé que son père n’avait pas l’imagination débordante quand venait le temps de nommer ses établissements, Annie précise que les débuts n’ont pas été des plus virils. "Les danseurs n’avaient pas d’autres modèles que ce que les danseuses faisaient. On s’entend que ce n’est pas aussi excitant de voir un gars se trémousser autour d’un poteau. Il y en a même un qui est déjà arrivé avec des pompons de cheerleader!"
30 ans en spectacle
Aucun risque de revoir le même scénario 30 ans plus tard. Pour la propriétaire du 281, l’aspect créatif du divertissement importe beaucoup: "Qu’on se comprenne, je sais très bien qu’on ne sauve pas des vies et qu’on ne fait pas nécessairement de l’art. Mais tant qu’à créer des numéros, aussi bien le faire avec ambition. Las Vegas est une inspiration pour moi." Voilà pourquoi Manon Oligny, Brigitte Poupart et Jocelyn Coutu (du Match des étoiles) figurent parmi les metteurs en scène invités pour le spécial trentième anniversaire. Des numéros qui rouleront leur bosse au cours des six prochains mois.
Question de remercier ses clientes, le 281 versera une partie des profits du week-end du 30e anniversaire à la cause du cancer du sein.
Le 281
94, rue Sainte-Catherine Est, Montréal
www.281.ca
Week-end rose anniversaire, du 15 au 17 avril