Inauguré à Toronto en 2009, le deuxième volet de l’exposition itinérante Twenty + Change arrive à Montréal, à la Maison de l’architecture du Québec. Les 32 projets présentés par 21 jeunes firmes d’architecture nous donneront un avant-goût de ce qui pourrait être l’esprit d’une architecture canadienne de demain. "Pourquoi n’entend-on pas plus parler des jeunes firmes d’architecture au Canada?" s’interroge Ian Chodikoff, rédacteur en chef du magazine Canadian Architect, dans la préface du catalogue consacré à l’exposition. "Est-ce parce que le pays est trop grand, la pratique de la profession d’architecte trop locale, ou les opportunités de se faire connaître trop limitées?" avance-t-il. Il n’existe pas, par exemple, au Canada de publication comme celle du Young Architects Forum américain ou les Albums des jeunes architectes de France. C’est sans doute en partie la raison qui a poussé deux jeunes architectes de Toronto à lancer en 2007 l’exposition Twenty + Change, afin de donner plus de visibilité à certains architectes de la relève torontoise, sélectionnés parmi les plus méritants. En se généralisant à l’ensemble du Canada en 2009, cette exposition biennale, devenue itinérante, se fait désormais le porte-parole d’une relève canadienne qui veut avoir son mot à dire.
Une relève en architecture
"Il faut des initiatives comme Twenty + Change pour montrer la diversité de la relève dans un pays qui, contrairement à l’Europe, ne propose pas beaucoup de concours rémunérés permettant aux jeunes architectes de démontrer leur valeur", note Anne Cormier, directrice de l’École d’architecture de l’Université de Montréal et membre du comité de sélection de l’exposition. Ce qui caractérise sans doute le mieux cette relève, ce n’est pas tant son émancipation des principes de l’architecture contemporaine (pour proposer quelque chose de nouveau) que l’énergie qu’elle met à voir ses projets se réaliser. "Beaucoup de firmes émergentes sont influencées par les grandes firmes canadiennes, soit que leurs fondateurs y aient travaillé, soit qu’il faille de la maturité pour s’émanciper d’une architecture dominante. Mais ce qui les réunit, c’est leur esprit d’entreprise, certaines allant jusqu’à mettre en oeuvre leur propre projet", constate Ian Chodikoff, qui était également sur le comité de sélection. "On voit des projets qui combinent une pensée conceptuelle sophistiquée et une grande simplicité de réalisation, comme si les architectes avaient accepté de pousser leur réflexion beaucoup plus loin que le budget ne le permettait", confirme Anne Cormier.
Et à Montréal…
Parmi les 21 firmes choisies par le comité de sélection de l’exposition, deux sont montréalaises, _naturehumaine architecture design et NIPpaysage. Si chacune évolue dans une discipline différente de l’autre (respectivement, architecture et architecture de paysage), elles sont toutes deux représentatives de cette relève canadienne, plus à l’écoute de ce qui l’entoure que soucieuse d’imposer sa propre vision du monde.
"On part toujours des contraintes de base du projet, qu’il s’agisse de l’identité d’un espace existant ou des besoins du client, pour en faire autant de forces qui vont aider à construire le projet", explique Marc-André Plasse, fondateur de _naturehumaine. La jeune firme montréalaise place l’humain au coeur de sa démarche conceptuelle. Les deux projets présentés à l’exposition Twenty + Change en sont le reflet. Celui de la Résidence Garnier montre cette capacité à conserver l’identité d’un vieux triplex des années 1920 tout en créant un volume à la fois simple et convivial, correspondant aux besoins des clients. Celui du Quattro D est l’interprétation spatiale du concept original de restauration rapide défini par le client: le design au service de l’idée commerciale, et non l’inverse.
Bien qu’utilisant des outils différents, les quatre associés de NIPpaysage ont développé une sensibilité équivalente, fondée sur une écoute active du paysage et de la perception que l’individu en a. "Nos interventions traduisent l’identité topographique, historique et culturelle d’un territoire", témoigne Mélanie Mignault, cofondatrice de la firme. Chargés du plan directeur pour la renaissance du parc Point Pleasant de Halifax à la suite de l’ouragan de 2003, les designers de NIPpaysage ont choisi de conserver une trace de la catastrophe en créant un dialogue entre la construction de l’homme et le fait de la nature. Cette même ambivalence se retrouve dans leur jardin éphémère, Sentier battu, où, pour le 400e de Québec, ils ont voulu rendre hommage au dialogue entre civilisation et nature qui participe à l’identité du Québec.
Twenty + Change 02
Du 2 octobre au 13 novembre
À la Maison de l’architecture du Québec
www.maisondelarchitecture.ca
www.twentyandchange.org