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Rénovation des théâtres montréalais : Théâtres en chantier

Plusieurs de nos théâtres montréalais les plus importants ont été rénovés et reconstruits ces dernières années. Bien que souvent justifiés par une mise aux normes, ces projets brillent par leur qualité et récoltent des prix.

Dans le cadre de leur plan de mise à niveau des infrastructures québécoises, les gouvernements provincial et fédéral ont investi depuis quelques années des sommes importantes dans la rénovation et la construction de lieux culturels. Du coup, plusieurs de nos institutions théâtrales montréalaises se sont "payé" ces dernières années une cure de jouvence. En 2009, le Théâtre de Quat’Sous inaugurait fièrement sa nouvelle bâtisse, un collage architectural d’artefacts et de textures évoquant l’histoire du théâtre sur un édifice contemporain. En novembre de la même année, le Théâtre Denise-Pelletier dévoilait sa nouvelle salle pimpante de 800 places, tandis que le Théâtre d’Aujourd’hui achevait ses travaux d’agrandissement. Cette année, ce sera au tour du Théâtre La Licorne de se retrouver, comme le Quat’Sous, dans un édifice flambant neuf. 2011 sera aussi l’année de dévoilement du projet de rénovation et d’agrandissement du théâtre Aux Écuries.

Une mise aux normes

Aussi impressionnante que cette série d’investissements dans la culture puisse paraître, elle a souvent été imposée par une nécessaire mise aux normes, afin d’améliorer les conditions de travail des comédiens et le confort des spectateurs. On le sait, sous ses dehors pittoresques, le Quat’Sous défiait toutes les règles de salubrité et de sécurité. "Notre projet de rénovation est né des doléances du public qui se plaignait d’être mal assis", se rappelle Jacques Vézina, directeur du Théâtre d’Aujourd’hui. Le Théâtre La Licorne n’était pas à meilleure enseigne puisque les comédiens ne pouvaient pas jouer simultanément dans les deux salles et étaient souvent incommodés par la musique du bar voisin. "C’est en fait une grosse mise aux normes, qui touche l’ensemble des systèmes de climatisation, de ventilation et d’électricité", souligne l’architecte Dino Barbarese de Saia Barbarese Topouzanov Architectes, en parlant de la rénovation du Théâtre Denise-Pelletier. Ici, les seuls changements apparents n’ont porté que sur l’inclinaison de la salle principale (pour améliorer l’angle de vue) et son dégagement du mur (pour mettre en valeur les moulures et corniches de 1928), la restauration de la façade et l’ajout d’une oeuvre d’art de Rose-Marie E. Goulet sur le parvis. Et pourtant, avec la subvention publique, le directeur général du théâtre, Rémi Brousseau, avait cru pouvoir ajouter un balcon à la salle principale afin de déplacer le mur du fond et d’agrandir ainsi le foyer qui serait devenu un lieu de vie, avec son service de restauration. "Mais devant l’importance du coût de mise aux normes, nous avons dû faire marche arrière", regrette-t-il.

Belles réalisations, budgets limités

Car en matière de culture, les budgets restent ici limités. "Ce sont des projets qui nécessitent beaucoup d’énergie pour une compensation financière peu élevée", constate Éric Gauthier, l’architecte du Quat’Sous et de la future Licorne. Pour celui-ci, quelques millions de dollars, "c’est pour un gros chalet dans les Laurentides". Au Québec, on en fait un théâtre (4 M $ pour le Quat’Sous, 6 M $ pour La Licorne). "La majeure partie du budget passe dans la structure du bâtiment et son système technique. La plus-value attribuée à l’architecture est assez faible et de toute façon normalisée par le programme du ministère qui impose un coût au pied carré, quelle que soit l’approche architecturale", fait remarquer Éric Gauthier de l’agence FABG. Et ce coût est très différent de ce qui se pratique ailleurs. "On avait un budget de 15 M $ lorsqu’on a rénové le Monument-National, alors que le Elgin & Winter Garden en Ontario en avait le double", rappelle l’architecte.

Petits théâtres, grands prix

Mais ces petits budgets n’empêchent pas les architectes de réaliser des prouesses. D’ailleurs, le nouveau Théâtre de Quat’Sous a été lauréat d’un des prix internationaux d’architecture 2010 de l’USITT (United States Institute for Theatre Technology). "Lors de la cérémonie, j’avais à côté de moi le concepteur d’une salle de spectacle au Japon de 350 M $ et un autre qui a présenté un projet de 250 M $. Notre budget de 4 M $ ne couvrait même pas le coût des tapis!" plaisante Éric Gauthier. Le 13 janvier dernier, l’Ordre des architectes du Québec décernait un prix d’excellence au Théâtre Denise-Pelletier et trois au Quat’Sous: 1er Prix bâtiments culturels de 2 M $ et plus; prix Norman-Slater pour l’intégration des arts à l’architecture; Prix du jury – Innovation et potentiel de rayonnement à l’international! Et cette capacité à concilier un concept architectural de qualité avec un budget limité est sans doute ce qui démarque Montréal du reste du monde. "Loin de la culture d’opulence qui donne tout leur faste aux théâtres nord-américains, Montréal est sans doute la seule ville à avoir autant de mini-théâtres imaginés par des architectes de valeur", souligne l’architecte. Outre le Quat’Sous et La Licorne, celui-ci a aussi conçu l’Espace Go. Saucier + Perrotte a imaginé le Théâtre d’Aujourd’hui et le Théâtre du Rideau Vert. Lapointe Magne ont réalisé l’Espace Libre…

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Théâtre de Quat’Sous
Type: construction
Budget: 4,5 M $
Livraison: juin 2009

Théâtre d’Aujourd’hui
Type: rénovation et agrandissement
Budget: 2 M $
Livraison: décembre 2010

Théâtre Denise-Pelletier
Type: rénovation
Budget: 10,6 M $
Livraison: mars 2010

Théâtre La Licorne
Type: construction
Budget: 2,5 M $
Livraison: août 2011

Aux Écuries
Type: rénovation et agrandissement
Budget: 3 M $
Livraison: hiver 2011