Comment classifier les meilleures bières du Québec?
La semaine dernière, j’assistais à un événement de nature brassicole (avouez que ça sonne beaucoup plus mondain que «je buvais des broues dans un festival»). Par la force des choses, j’en suis venu à discuter avec un confrère sur mes articles, notamment sur les divers palmarès des bières québécoises que je dresse ici et là. Il m’a demandé formellement : «As-tu une pilsner qui trône parmi tes derniers top 10?», ce à quoi j’ai répondu par la négative. Et là, dans le plus soudain des soudains (c’est la première fois que je vois ce mot au pluriel), je me suis reposé la question à plusieurs reprises au fond de ma tête de gars préoccupé par les détails.
Le type qui m’a posé la question, c’est Stéphane Morin (éditeur de la revue Effervescence, détenteur d’un diplôme de maîtrise en histoire dédiée à l’évolution des brasseries et port-étendard éminent de l’industrie microbrassicole depuis plusieurs années). J’imagine, à tout le moins, que venant de lui, l’idée méritait une certaine réflexion. D’ailleurs, je me souviens avoir lu un questionnement similaire sur le blogue des Coureurs des Boires (probablement le blogue sur la bière le plus intéressant au Québec – http://lescoureursdesboires.blogspot.ca/2012/11/le-langage-des-amateurs-de-bieres-de.html). Les auteurs écrivaient : «Lorsque nous publions nos commentaires de dégustation sur Internet, est-ce que nos goûts personnels doivent avoir préséance sur une juste description de la bière en question?». La question se pose, toujours et encore.
Pourquoi un top 10 de bières devrait-il contenir une pilsner? Ici, l’exemple de la pils aurait pu être remplacé par une bonne ale blonde de soif ou une rousse de bon augure. Je pense toutefois avoir compris, dans la question de Stéphane, un sous-texte qui critique l’éloge des bières costaudes brassées dans la démesure au détriment des bières plus conventionnelles qui peuvent être exceptionnelles sans jouer dans les extrêmes. En gros, les amateurs de bières qui donnent des notes sur des sites comme Ratebeer ou Beeradvocate ont tendance à magnifier les gros canons (Stout Impérial vieilli en fût de bourbon, Triple Belge, Double IPA…) et donner des notes plus ordinaires à des bières plus tranquilles, même si elles sont parfaites selon les règles qui définissent leur style.
Pour donner un exemple clair, c’est comme si les critiques de cinéma ne considéraient que les films hollywoodiens qui mettent le paquet, même si certains films de répertoire, tournés avec moins d’un million de dollars, peuvent être de vrais chefs-d’œuvre. Un autre exemple? C’est un peu comme si j’étais un critique culinaire et que je ne mettais juste des plats de viande dans un top 10 de mes mets préférés. Le questionnement de Stéphane est donc tout à fait légitime.
Sauf que moi, quand j’établis le top 10 de mes bières préférées à la fin de l’année, je dresse carrément la liste de mes 10 bières préférées. Rien de plus rien de moins. Dix produits, ce n’est pas énorme lorsqu’on a la chance d’en goûter plusieurs centaines dans une même année. C’est vrai qu’une pilsner ne s’est jamais taillé une place dans l’un de mes palmarès, mais ce n’est pas un désaveu envers le style. Il s’agit en fait d’une mise en évidence de ce qui a été brassé de meilleur au Québec et qui sort de l’ordinaire. Suis-je en train de dire qu’une pilsner est ordinaire? Non. Mais j’ai toujours cru que mes lecteurs s’attendaient à des suggestions qui feraient pétiller leurs papilles. Ce constat me pousse à me questionner en profondeur sur l’industrie de la bière et le modèle de critique, de catalogage et d’arbitraire hiérarchisation.
Maintenant que tout est dit, je demeure perplexe. Qu’est-ce que je fais maintenant? La question est large et la réponse le sera tout autant. Désormais, lorsque je serai appelé à dresser un palmarès, je vais le subdiviser. Au lieu de publier un top 10 annuel, je vais établir trois top 5! En plus de me donner la chance de parler de cinq bières supplémentaires, j’aurai l’opportunité de sortir de mes champs d’intérêt les plus marqués. Voici les trois catégories que je compte adopter :
- Top 5 des bières d’exception (mes 5 coups de cœur sans contraintes)
- Top 5 des bières de 0% à 6.4% d’alcool
- Top 5 des bières de 6.5% à X% d’alcool
Une telle catégorisation me poussera à inclure des bières plus douces (0% à 6.9%) qui auraient pu passer sous le radar. Je pense à des bières de style pale ale, bitter, blanche belge, hefeweizen ou même des pilsners. Si, si! Mais attention, même avec un tel changement, ce ne sont pas tous les styles qui seront représentés. Autrement, il faudrait faire un top 100 et l’exercice perdrait un peu de son sens. À force de vouloir tout inclure, on en viendrait à remettre en question la pertinence d’un tel exercice.
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En attendant ma réforme, je vous propose quelques-uns de mes palmarès annuels :
– Top 10 des meilleures bières embouteillées au Québec 2013 https://voir.ca/pierre-luc-gagnon/2013/12/30/palmares-les-meilleures-bieres-de-microbrasseries-embouteillees-au-quebec-en-2013/
– Top 10 des meilleures bières embouteillées au Québec 2012 https://voir.ca/pierre-luc-gagnon/2012/12/25/top-10-bieres-les-meilleures-bouteilles-de-2012-au-quebec/
– Top 10 des meilleures bières embouteillées au Québec 2011 https://voir.ca/pierre-luc-gagnon/2012/01/12/mon-top-10-des-meilleures-bieres-quebecoises-embouteillees-de-2011/