La légumineuse, aliment du futur ?
La vedette de l’assiette, c’est elle. Les Nations Unies ont déclaré 2016 Année Internationale de la Légumineuse (sous le bel acronyme AIL), pour sensibiliser l’opinion publique aux nombreux avantages de cet aliment aussi bien d’un point de vue nutritionnel qu’écologique et gourmand…
Si les légumineuses font partie de notre alimentation depuis des millénaires, leurs cultures n’ont augmenté que de 59% au cours des cinquante dernières années, contre 200 à 800% pour celles de maïs, blé, riz et soja. Et cette année, la consommation moyenne de légumineuses devrait se maintenir à environ 7 kg par personne. Pas énorme.
Les légumineuses, qui regroupent les plantes dont les fruits sont contenus dans des gousses (lentilles, fèves et haricots secs, et pois secs), sont à la base de l’alimentation dans beaucoup de pays. Mais avec l’évolution des habitudes et goûts des consommateurs, les populations des pays riches délaissent les protéines végétales pour consommer des protéines plus chères, comme la viande ou les produits laitiers.
Pourtant, les qualités de la légumineuse sont multiples. D’un point de vue écologique, cet aliment peut aider à lutter contre les changements climatiques : du fait de sa propriété fixatrice d’azote, elle a une très faible empreinte carbone. Les cultures de légumineuses sont en outre très économes en eau et permettent ainsi de réduire la consommation d’eau potable et d’augmenter la fertilité des sols.
Dans le contexte de l’Année Internationale de la Légumineuse, l’Expo Manger Santé et Vivre Vert 2016 (en mars à Montréal et Québec) accueillera l’exposition itinérante du Musée de l’agriculture et de l’alimentation du Canada, qui sensibilise la population aux bienfaits des légumineuses – lors du Championnat amateur de Cuisine santé de Montréal, les candidats devront d’ailleurs présenter un plat mettant en valeur fèves, haricots ou autres lentilles…
« Super aliment » et alternative à la viande
Dans l’assiette, la légumineuse est ce qu’on appelle un « super aliment », car elle contient presque tous les éléments dont le corps a besoin : forte teneur en protéine, fibres alimentaires, minéraux, vitamine B, mais peu de graisse et pas de cholestérol ni de gluten. Et en plus d’être abordables niveau prix, les légumineuses peuvent être conservées pendant des mois sans perdre leur valeur nutritionnelle.
Grâce à ce potentiel nutritif, la légumineuse est une excellente alternative à la viande. « Mon petit gars de 6 ans aime les burgers, alors parfois je lui en fais un avec un steak aux haricots noirs », raconte Bob le Chef, qui sera par ailleurs un des invités de l’Expo Manger Santé et Vivre Vert. Un mois par an, le chef suit un régime végétarien : « Pendant ce mois je mange beaucoup de légumineuses pour compenser la viande ; c’est moins cher et plus rapide à apprêter ».
On peut acheter des légumineuses en conserve, séchées, etc. « Il y a tellement de choses à faire avec ! s’exclame Bob. Par exemple, l’eau des pois chiches récupérée dans la conserve ou après la cuisson a les mêmes propriétés que les blancs d’œufs : on peut fouetter l’eau et l’utiliser pour une mayo végétalienne… »
Mais les gens n’ont pas encore le réflexe d’acheter des légumineuses régulièrement. « On en a toujours dans notre garde-manger, en plat de secours, mais on les utilise rarement, indique le chef Daniel Vézina. Dans notre histoire culinaire, on a la soupe de pois et les fèves et lard, des recettes de camps de bûcheron très nourrissantes. On a moins besoin de ces plats très énergétiques aujourd’hui, mais il suffit d’apprêter les légumineuses de façon moins alourdissante et on peut en manger tout autant. »
Si on achète peu de légumineuses, c’est aussi parce qu’on se sait pas comment les apprêter – le chili con carne, ça va un soir. Selon Bob le Chef, « les légumineuses, on n’en parle pas assez et on ne les traite pas avec le respect qu’on leur doit ; il y a pourtant tellement de recettes qui sont sexy ! » Oui, il y a bien une nouvelle gastronomie possible autour de la légumineuse : aliment du pauvre par le passé, elle pourrait bien faire son retour dans les menus et amener un côté tendance aux plats.
La faim des haricots
Au centre de l’assiette comme en accompagnement, les légumineuses se consomment en salade, en purée, en soupe… Et se marient assez facilement avec tout. Pour sa part, Bob le Chef conseille la trempette de haricots noirs, à agrémenter de jus de tomate, sauce piquante ou autre selon les goûts. Il fait aussi une salade de pois chiches rôtis avec tomates séchées et navets – pois chiches rôtis qui peuvent aussi remplacer la viande dans un couscous royal.
Sans parler du classique mais bon velouté aux lentilles. « Je me roule par terre juste à l’idée d’en manger », confie Daniel Vézina. En accompagnement, la légumineuse permet de changer tout un plat. Le chef adore par exemple mettre une tasse de légumineuses dans une soupe, notamment une minestrone. Un ragoût de lentilles agrémente à merveille un porc ou un canard, et les haricots cocos donnent quant à eux une très belle purée, agrémentée de laurier et de thym.
« Le haricot coco, c’est mon préféré : c’est la légumineuse la plus fine et la plus crémeuse, et elle passe à toutes les sauces », explique-t-il. « On peut varier les houmous avec plein de légumineuses ! Moi j’utilise aussi la gourgane à la place des pois chiches.» D’ailleurs, la cosse de la gourgane se mange aussi (de préférence avec un filet d’huile d’olive, quelques gouttes de jus de citron et de la fleur de sel) : « C’est très populaire au Maroc, raconte le chef. Et c’est une mode que j’aimerais démarrer au Québec ! »
Mais pas question de parler de flageolets et autres haricots sans évoquer la question… des pets – les deux chefs ont d’ailleurs spontanément abordé le sujet sans qu’on les lance. Oui, les légumineuses souffrent de leur association avec les flatulences. « J’adore les légumineuses, mais quand j’en mange je m’arrange pour dormir seul le soir… », confirme Daniel Vézina.
« Bon, ça doit être comme avec la plupart des aliments : plus on en mange souvent, plus le corps s’habitue », conclut le chef. Et rassurez-vous, il y a un petit truc contre les gaz : l’épazote, une herbe du Mexique, qui permet de contrebalancer les propriétés intestines des légumineuses. Ajoutez-en un peu dans votre petit salé aux lentilles, et vous pourrez même en manger avant un rendez-vous galant…
Expo Manger Santé et Vivre Vert
11, 12 et 13 mars au Palais des congrès de Montréal
19 et 20 mars au Centre des congrès de Québec