Les brocanteurs de Saint-Roch : Renouveau rétro
Vie

Les brocanteurs de Saint-Roch : Renouveau rétro

On pourrait les surnommer affectueusement les «curateurs de cossins». Ces brocanteurs nouveau genre, tous établis dans le quartier Saint-Roch, partagent une obsession pour les marchés aux puces du dimanche. Visite vintage.

Le rétro est à la mode et, pourtant, pour Bruno-Clément Boudreault de Si les objets pouvaient parler, c’est aussi «un acte de contestation et d’anticonformisme». «Le vintage, après tout, avec ses objets qui résistent au temps et accumulent les histoires, c’est une contre-culture à la société de consommation.» Dans sa boutique de la rue du Pont, qu’il gère avec sa conjointe, Dominique Dupont (aucun jeu de mots volontaire), il expose dans une atmosphère de magasin général toutes sortes d’objets hétéroclites.

 

Si les objets pouvaient parler (Crédit: Caroline Décoste)
Si les objets pouvaient parler (Crédit: Caroline Décoste)

«Notre mission, c’est d’offrir une sélection vintage qui évolue au gré des tendances, mais surtout au gré de nos intérêts et de nos rencontres. Il n’y a rien en boutique qu’on n’aimerait pas avoir chez nous.» Ah, vraiment? Et ces immenses affiches de cinéma cochon circa 1970, avec des titres tels que La petite garce aime les partouzes et Mon petit oiseau s’appelle Percy, il va beaucoup mieux merci? «On se fait un malin plaisir à se spécialiser dans les objets à connotation sexuelle toujours plus douteux les uns que les autres.» Tout n’est pas aussi kitsch osé chez SLOPP (pour les intimes): les proprios ont une impressionnante collection d’appareils-photo anciens, des cartes postales à n’en plus finir, des macarons, de vieux livres, des vêtements, alouette! qui côtoient du fait-main par des artisans locaux. Le tout n’est pas sans rappeler le repaire à trouvailles qu’est Rétro Bordello, quelques coins de rue plus loin.

«On a pris le nom parce que ça prenait “rétro” dans le nom et que c’est un peu ça, un joyeux bordel!» raconte en riant Annie Robitaille, copropriétaire de Rétro Bordello. «On a failli s’appeler Les Sentinelles d’hier!» ajoute son conjoint, Mathieu Asselin. Le duo donne lui aussi dans la nostalgie. «Les choses étaient mieux faites dans le temps. Ça fonctionne encore!» explique Annie. «Ça me fait penser à la maison de ma grand-mère, au garage de mon grand-père», renchérit Mathieu. Dans leur minuscule boutique de la rue Saint-Joseph Est, les jouets Fisher-Price s’amusent à côté des affiches Labatt 50. Les buffets type Formica (ou Arborite, selon l’allégeance) servent de présentoir, tout comme un minibar lumineux, une table basse en teck ou une lampe à pied de tulipe. De quoi transformer son sous-sol en repaire pour wannabe Don Draper…

Rétro Bordello (Crédit: Caroline Décoste)
Rétro Bordello (Crédit: Caroline Décoste)

Le sexy publicitaire de Mad Men serait d’ailleurs à son aise chez Déjà Vu, toujours rue Saint-Joseph Est, parmi les meubles restaurés avec passion par François Gagnon, un ex-publicitaire (quel adon!). François retape du mobilier un peu trop aimé, dans le respect du design original. Les pièces uniques vont et viennent, comme cet authentique ensemble de salle à manger signé Niels O. Møller, représentant du design danois de l’après-guerre, ou les iconiques commodes colorées de l’époque Space Age de Giovanni Maur pour Treco. Les aficionados du Mid-Century Modern retrouveront le même genre de mobilier chez A2, lui aussi chiné avec un soin maniaque par Francis Bédard. C’est rue Saint-Vallier Est que se cache ce petit paradis du design des années 1950, 60 et 70.

A/2 (Crédit: Caroline Décoste)
A/2 (Crédit: Caroline Décoste)

«Je ne me vois pas comme un antiquaire, mais plutôt comme un curateur», explique Francis Bédard. «Je suis à cheval sur les années et les styles, j’aime les choses qui vont bien ensemble: le bois foncé comme le teck avec un punch de couleur, par exemple. Ce sont des meubles qui sont faciles à intégrer grâce à leur simplicité, on peut mélanger les styles facilement.» Ce «curateur» de mobilier travaille avec un réseau de pickers, soit des gens qui ne vendent pas au détail. «On ne sait jamais sur quoi on va tomber, il est très rare de voir la même pièce deux fois.» Il s’estime donc chanceux d’avoir mis la main sur un trésor à faire saliver les fanas du design: de vraies chaises Grand Prix d’Arne Jacobsen. «Je les ai vendues à un ami, parce qu’à un moment donné, je ne peux pas tout garder pour moi… mais j’en ai conservé une!» Son rêve de collectionneur, s’il n’a rien d’original de son propre aveu, serait de posséder une véritable chaise lounge de Charles Eames, qui est en quelque sorte l’emblème du design Mid-Century Modern. «J’ai vu plusieurs fois des répliques, mais j’en veux une vraie, avec une belle patine sur le cuir…»

 

Si les objets pouvaient parler
367 rue du Pont

Rétro Bordello
185 rue St-Joseph Est

Déjà Vu
834 rue St-Joseph Est

A/2
41 rue St-Vallier Est