Restaurateur : un choix de vie
L’aspect festif et gourmand que revêt chaque visite au restaurant est loin d’être celui que connaissent au quotidien les restaurateurs. Alors, pourquoi choisissent-ils ce métier? Entretien avec Émile Poulier, chef propriétaire des Cigales, à Saint-Lambert.
Émile Poulier n’est pas un nouveau venu dans le milieu de la restauration. Il a fait ses classes aux Cigales dans les années 1980, puis dans quelques établissements de la métropole montréalaise, avant de se joindre à l’équipe du Cirque du Soleil pendant 13 ans, tout d’abord de manière nomade en suivant les tournées à titre de chef des cuisines, puis comme majordome de Guy Laliberté. Un vrai conte de fées qu’il a décidé de finir en quittant son emploi pour se relancer dans l’aventure de la restauration. Choix impulsif ou insensé? « Certains pourraient le penser, mais j’avais le sentiment d’avoir assez voyagé, d’avoir été jusqu’au bout de cette expérience. J’avais une famille auprès de laquelle je voulais vivre, et je voulais construire quelque chose. » Ce quelque chose a été le rachat du restaurant Les Cigales à son ancien patron Roger Antoine. « C’était un ami et j’avais un attachement particulier avec cet établissement. Si ce n’avait été des Cigales, je crois que je n’aurais pas franchi le pas. »
Un métier difficile Son restaurant, Émile Poulier l’a enfin eu il y a trois ans. Et il a appris à la dure assez rapidement que rêve et réalité ne sont pas toujours conciliables. « C’est un métier difficile, il faut l’admettre. On fait de longues heures de travail, on n’a pas le choix d’être là pour assurer une qualité constante, on ne peut pas partir en congé quand on le désire ni même quand on en a besoin. Si les propriétaires s’arrêtaient à ces facteurs, il n’y aurait plus de restaurant. » À quelques exceptions près, il est vrai que les restaurateurs investissent beaucoup de temps et d’énergie dans leur entreprise, le plus souvent pour des bénéfices marginaux une fois que tous les salaires, taxes et factures sont réglés. « Il faut aussi être conscient que ce métier est émotif, ajoute le chef propriétaire. On passe régulièrement de la frustration à la tristesse et à la grande joie. C’est dur sur les nerfs, c’est dur physiquement, et c’est aussi dur pour la vie de famille, nos proches subissant les contrecoups de nos montagnes russes émotionnelles. »
La passion avant tout Pour tenir bon dans un milieu aussi exigeant et compétitif, il faut de la ténacité, du talent, mais surtout beaucoup de passion. Et Émile Poulier, qui a quitté sa place dorée au Cirque du Soleil pour réaliser son rêve de restaurant, n’en manque pas. Mais comment résiste-t-il? « Parce que je ne regrette rien. Je crois qu’il faut s’écouter et se réaliser. Même si le choix de devenir restaurateur aujourd’hui est un peu kamikaze, même s’il n’y pas de recette du succès assurée nulle part, même si on doit accepter de souffrir certains jours. Tout ça est compensé par la belle adrénaline qu’on ressent en cuisine lorsque le resto est occupé, par les relations privilégiées qu’on tisse avec sa clientèle – certains clients sont même devenus des amis. Et bien sûr, par le plaisir de cuisiner et de donner du plaisir aux gens qui nous rendent visite. » Un témoignage inspirant.
585, Avenue Victoria
Saint-Lambert J4P 3R2
450-466-2197