Lorsqu’on nous invite à dormir dans un igloo, cela ne veut pas dire que nos hôtes sont «froids». Bien au contraire!
Il fait au moins quinze sous zéro lorsque nous nous décidons à quitter la table pour aller dormir. La salle est chaude, agréable, et nous hésitons encore avant de choisir notre gîte pour la nuit: chalet ou igloo? La nuit est claire, l’air est cristallin et la lune, ronde comme un ballon, nous donne envie de dormir dehors. Elle sera notre guide vers notre «chambre». Nous avons évidemment préféré l’igloo. L’exotisme de la chose et la beauté de la nuit nous ont finalement convaincus.
Armés d’une lampe de poche et d’une glacière remplie de bonnes choses – chocolat, café, eau et autres gâteries -, de sacs de couchage bien chauds, et après un dernier pipi, nous nous acheminons vers notre abri pour la nuit. Refermant la porte derrière nous – un simple bout de bois stratifié taillé exactement de la forme arquée de l’entrée -, nous pénétrons à genoux dans cet habitat inhabituel. A quatre pattes, nous tâtons les peaux de chevreuil et replaçons les branches de sapin qui constituent notre matelas. Nous installons les sacs de couchage bien à plat sur les peaux… On va être bien!
Composée de blocs de neige empilés les uns sur les autres, selon une technique bien précise, notre hutte de neige, comme toutes les autres, préserve une chaleur moyenne de cinq degrés Celcius, quelle que soit la température extérieure. La neige est un isolant naturel. Pour éviter de laisser l’humidité envahir notre couche, notre hôte nous a permis d’allumer une petite ampoule électrique (!) – c’est le confort de l’exotisme avec une touche de modernité! Habituellement, une chandelle suffit à garder l’igloo bien au sec.
Le dodo…
Comme on fait son lit, on se couche… Dans un igloo, on ne demeure pas longtemps sous la lumière de l’ampoule, surtout la première nuit. L’excitation, l’appréhension surtout, nous invitent à nous glisser dans le sac de couchage de bonne heure. Dormira-t-on? Gèlera-t-on?
Sitôt enfouis dans l’édredon, une douce chaleur nous envahit. Pas mal. En prenant garde de demeurer sur le matelas – tout de même étroit, mais bon, on est presque en camping -, on s’endort, en attendant le premier hurlement du loup. Hélas, de loup il n’y en a guère dans cette forêt, et nous serons plutôt bercés par le vent se faufilant dans les sapins. Coup de pot, aucune envie du petit coin ne dérange cette nuit! Je me réveille tout de même fréquemment, gelée! Pourtant, la température de l’igloo est plus confortable que le moins dix à l’extérieur… Je me rendors quand même.
Au petit (tout petit) matin, nous nous étirons. Mon compagnon, bien reposé, réclame presque une deuxième nuit! Je suggère plutôt une soirée au coin de l’âtre, dans un chalet. Je n’ai pas apprécié autant ma nuit parce que, on me l’expliquera plus tard, j’avais la tête nue. Pour profiter de son coucher en igloo, comme en camping d’hiver, il faut avoir la tête couverte! C’est maintenant qu’on me le dit.
Je ne peux toutefois que recommander cette expérience, qui ravit nos cousins d’outre-Atlantique. Exotique pour les Français, elle est un peu dédaignée ici. Pourtant, les préliminaires entourant le coucher nous réconcilient avec ceux d’avant le dodo à la maison. Et puis, le contact avec la nature est exceptionnel. On se sent protégé et vulnérable à la fois dans cet abri de neige.
Nous avons vécu l’expérience à Sacré-Cour, à la Ferme Cinq Étoiles. Claude Deschênes, notre hôte, est un bonhomme particulier pour qui le confort de ses invités trône au premier rang. Ces igloos respectent les règles de sécurité les plus poussées: une structure métallique a même été installée pour permettre de supporter les blocs de neige. En cas de dégel – même si cette région gèle bien avant la métropole, cela arrive -, les dormeurs seront protégés par cette structure, en cas de chute des blocs de neige. Au réveil, Imelda, la dame de Claude, sert un petit-déjeuner ravigotant aux accents du Saguenay et de la Côte-Nord, puisque Sacré-Cour se situe à cheval sur ces deux régions.
La Piste Desbois
A Québec, au Lac-Beauport plus précisément, une jeune entreprise propose depuis peu des forfaits «Couchers en igloo». L’an dernier, La Piste Desbois s’est fait remarquer en installant un village amérindien complet sur le site du Carnaval de Québec. Queenzy et igloos faisaient le l’oil aux fêtards… L’activité fut populaire. A preuve, les festivaliers attendaient en file pour dormir dans l’un des igloos érigés sur les Plaines d’Abraham…
Cette année encore, il sera possible de s’offrir l’exotisme inuit. L’igloo, faut-il le rappeler, sert encore aujourd’hui d’abri temporaire aux tribus du Grand Nord. Les chasseurs dressent leur campement dans un endroit stratégique où ils attendent le gibier. Et le délaissent, une fois la saison de la chasse terminée.
La Piste Desbois propose donc un forfait d’une nuit en igloo, sur le site du Lac-Beauport ou sur les Plaines d’Abraham, incluant des préliminaires se déroulant près du feu. Au réveil, les dormeurs ont droit à un copieux petit-déjeuner.