Vie

le cidre : boisson légendaire

Mois maussade s’il en est un, novembre est le moment tout indiqué pour réchauffer l’atmosphère en partant à la (re)découverte d’une boisson légendaire: le cidre.

Pauvre novembre. Difficile de passer à travers celui dont le nom évoque des journées froides, courtes et souvent pluvieuses. Une fois les feuilles envolées, l’horloge reculée et l’Halloween fêtée, il faut patienter encore un mois avant d’avoir droit aux premières vraies bordées de neige de l’hiver. Entre-temps, que faire pour se sortir du théâtre ou du cinéma?

Amateurs de boissons réconfortantes et de beaux paysages, une destination de choix existe près de Montréal et elle s’appelle Rougemont. Rougemont et ses pommes, oui. Mais aussi Rougemont et ses cidreries artisanales.

Cidre illégal
Les récents ascendants de Michel Jodoin ont tous fabriqué du cidre artisanal à partir des pommes du verger familial, planté par son arrière-grand-père au début du 20e siècle. Le cidre était vendu à même la cave et la production était minime car le produit était interdit par la loi. Qu’à cela ne tienne, la coutume de venir chercher son cidre chez les producteurs autour de la montagne était bien ancrée dans les moeurs.

En 1970, tout bascula lorsque la loi fut modifiée. Un cidre industriel privilégiant le volume au détriment de la qualité fit son apparition sur le marché. "En plus de perdre le plaisir du contact avec le propriétaire, déplore Michel Jodoin, les gens se retrouvaient avec un produit médiocre qui fermentait dans la vitrine du dépanneur." Depuis la fin des années 80, le gouvernement émet des permis aux artisans cidriculteurs. Mais les mentalités ont été durement éprouvées et nombreux sont ceux qui associent encore le cidre à un intense mal de ventre.

Michel Jodoin a parié sur la qualité de ses produits pour rebâtir le lien avec les consommateurs. Après plusieurs séjours d’apprentissage en Normandie, en Bretagne, en Champagne et même en Allemagne, il consacre maintenant la totalité des fruits de son verger à la production de cidre et d’alcool. Grâce à son alambic allemand, il est le seul cidriculteur au pays à élaborer eau-de-vie, brandy et liqueur de pomme.

Le mousseux rosé brassé selon la méthode champenoise est un pur délice fabriqué à partir de la pomme Geneva. Michel Jodoin explique que ces pommes à la chair rouge sont immangeables parce que trop sures. Ce qui ne les empêche pas d’être à l’origine d’un délicieux élixir.

Le tour du propriétaire
À la Cidrerie Michel Jodoin, on entre dans l’atelier de fabrication comme dans un moulin. Tout de suite, l’odeur des fûts de chêne, de la levure et de la pomme vous enveloppe. S’ensuit une visite guidée où l’on se familiarise avec les différentes étapes de production. Pressage, entreposage, fermentation dans de gigantesques cuves métalliques, alambic, ajout de sucre et de levure, mise en bouteille: le procédé méticuleux de la concoction du cidre nécessite des soins de tous les instants. "Demain matin, je dois vérifier quelque chose à 7 h, mais j’adore ça. J’ai une belle équipe et notre boulot est de rendre les gens heureux. J’ai du plaisir à partager quelque chose que j’aime, à tendre un brandy à quelqu’un en lui disant: "Sens ça, bâtard. Ça, ça va être primé mondial!""

Adossés au mont Rougemont, les 5000 pommiers de Michel Jodoin permettent de récolter suffisamment de pommes pour produire 150 000 bouteilles par année. Le cidriculteur a d’ailleurs prévu une dégustation près du poêle à bois.

Ceux qui ne sont pas assez réchauffés après leur ration sont invités à gravir la montagne. Un sentier de moins de trois kilomètres de long se rend jusqu’au sommet, traversant la vieille érablière complètement dévastée par le verglas de 1998. En haut, un belvédère sommaire offre une vue spectaculaire des vergers du coin… ou de la brume de novembre. En cas de tempête de neige imprévue, les raquettes vous promettent une superbe randonnée.

Les cidres sont en vente au comptoir et il fait toujours plaisir d’acheter une bouteille directement du fabricant, comme si ça nous rapprochait de lui et de son produit. Par contre, les alcools forts (eau-de-vie, brandy et liqueur de pomme) ne sont disponibles qu’à la Régie des alcools, qui fait depuis peu une place aux produits du terroir québécois. Il était temps!

Info
Autoroute 10 Est, sortie 29
Route 133 Nord jusqu’à la route 112
Route 112 Est jusqu’à Petite Caroline
Après l’intersection pour Rougemont, à gauche sur Petite Caroline

Cidrerie Michel Jodoin
1130, Petite Caroline
Rougemont
(450) 469-2676
www.cidrerie-michel-jodoin.qc.ca