Éric Marchand et Joël Arseneau sont fin prêts, mais les kayaks d’Aerosport le sont moins. Ils ont passé quelques jours dehors, subissant les assauts de la pluie et du gel. De vrais kayaks de glace qu’il faudra dégager au marteau et à la bouilloire!
Tandis que d’autres se ruent sur les hélicoptères pour aller faire leur safari-photo-blanchons sur la banquise, nous prenons la route de la dune du Sud sur l’île du Havre aux Maisons. Mes deux rois du vent (spécialistes du cerf-volant de puissance, de la voile sur neige et du kite-surf) ont plus d’un tour dans leur sac… Été comme hiver, ils proposent aussi des excursions en kayak autour de l’archipel. Naviguer au ras des glaces fait fantasmer quiconque a déjà goûté aux joies du kayak estival. Imaginez aux Îles, paradis des plages et des falaises. Comment ne pas être curieux de les voir en hiver, emprisonnées dans leurs manteaux de glace, s’en approchant par la mer?
Joël aime les glissades. Il embarque dans son kayak en pleine halte routière pour dévaler la pente de la plage et se laisser aller jusqu’au bord de l’eau claire. On s’y jette comme un phoque, d’un coup de rein qui lancera la pointe du kayak en avant. Il filera tout seul à la surface. Instant magique où l’on se sent porté par l’eau, en symbiose avec l’élément!
Le golfe du Saint-Laurent s’étend à perte de vue; l’île d’Entrée se devine au loin; la plage s’étire en blanc vers le nord. On virera plutôt vers le sud, pour longer le couvert glacé jusqu’au pied des falaises. Le cap Noir est tout près. Le cap Adèle se détache en contrebas des Buttes Pelées qui surplombent le littoral escarpé. Vision en rouge et blanc. Avec nuances: le bleuté de l’eau glacée, l’ocre du grès givré des falaises, le blanc laiteux de la terre…
La promenade est tranquille mais fertile en surprises. De saignée en saignée, on dépasse en silence de mini-icebergs. On se fraie un passage dans la slush, quand on ne joue pas les brise-glaces présomptueux, au risque de grimper sur une plaque se refusant à craquer. Mais l’eau est souvent libre aux abords de la côte, chaotiques à souhait, avec de surprenants amoncellements de glace travaillés par le vent et la marée. Quand le soleil s’y mire, les diamants sortent! Dans les échancrures du littoral, les grottes sont nombreuses et souvent accessibles. Leurs sculptures intérieures valent bien celles du dehors. Chaque fois qu’on le pourra, on s’approchera au plus près, admirant ici une "chute" de glace, comme les tuyaux d’un orgue, touchant là à la peau lisse d’une caverne ou suivant du regard de longues stalactites. De ce voyage un brin mystique entre mer, terre et ciel, on ressortira lumineux, apaisé et prêt pour de nouvelles aventures.
www.aerosport.ca ou www.tourismeilesdelamadeleine.com
(Comptez 100 $ pour deux-trois heures de kayak. Aerosport propose aussi, sur les lagunes glacées, une initiation au buggy-cerf-volant sur ski, version hivernale d’un drôle de char à voile, mû par une sorte de voile de parapente tenue à bout de bras (80 $ pour deux heures.)
Hébergement:
Les Îles offrent un choix limité en cette période hivernale-printanière. Pour le "standard" et la compagnie des touristes japonais, américains ou européens, optez pour le Château Madelinot, à Cap-aux-Meules. Pour un accueil personnalisé et chaleureux, La P’tite Baie, à Havre-aux-Maisons, offre de superbes chambres et une table étonnante, faisant la part belle aux produits de la mer. Sur l’île du Havre Aubert, c’est à La Marée Haute qu’il faut souper et/ou dormir. Les chambres ont un cachet du tonnerre… et le chef Patrick Mathey vaut le détour! Demandez-lui comment était son bain du matin… dans une piscine taillée dans la banquise? www.ilesdelamadeleine.com/hotels
Détour
Avant de partir, passez à la Fromagerie du Pied-de-Vent à Havre-aux-Maisons, assistez au moulage du fameux fromage et achetez une meule pour vos amis… Vincent le fromager s’est aussi lancé, avec deux comparses, Émile Boudreau et Patrick Mathey, dans la fabrication artisanale de charcuterie de porc. Un vrai délice à la saveur des Îles…