Vie

Îles-de-la-Madeleine : L'autre île

Il existe une île magique, puissamment sauvage et à l’écart de l’archipel des Îles-de-la-Madeleine, dont elle fait pourtant partie: l’île Brion.

Les visiteurs sautent à l’eau. Certains en ont jusqu’à la taille, d’autres, plus chanceux, aux genoux. Le zodiac, après une heure de traversée, s’éloigne maintenant. Au bord de l’île, le ressac mitraille les roches d’un côté à l’autre. Plus loin, les restants d’un vieux quai de pêcheurs d’il y a un demi-siècle se font assaillir sans merci par la mer, pourtant calme aujourd’hui. C’est elle qui donne le feu vert pour une sortie à l’île Brion.

Après que l’on eut déposé nos sacs à dos d’un jour, le guide Sébastien Côté de Vert et mer nous invite à emprunter un sentier jusqu’au vieux phare, automatisé depuis quelques décennies. Tout près, nous descendons vers une falaise qui se termine en avançant dans la mer. Le panorama sur une longue plage brillante et sur les autres îles, là-bas, très loin, laisse le groupe sans mots.

L’ILE EPARGNEE

"L’île Brion, pour moi, c’est le plus beau cadeau que j’ai eu dans ma vie, lance Mario Deraspe, plongeur et pêcheur madelinot. Dans mon âme, l’île Brion est plus importante que les Îles-de-la-Madeleine." Capitaine de bateau, Mario Deraspe a mené bien des touristes à bon port au fil des ans. Chaque fois, le même refrain revient. "Personne n’est allé une fois à l’île Brion sans souhaiter y retourner. Il y a là quelque chose à aller chercher qu’on ne peut pas trouver ailleurs." L’impression d’être Jacques Cartier ou tout autre explorateur abordant les côtes sauvages de l’Atlantique, d’une virginité absolue, est saisissante. Le temps et l’espace semblent se dissoudre.

L’île Brion est située à 16 km de l’île la plus proche (Grosse-Île), au nord-est de l’archipel. D’une longueur de 7 km pour 2 km de largeur, elle renferme la réserve écologique de l’Île-Brion, qui en occupe la quasi-totalité. Avec 141 espèces d’oiseaux recensées et une flore de plus de 200 variétés, l’île est un réel trésor où foisonne la vie. C’est ce qui a incité le ministère de l’Environnement, aujourd’hui propriétaire de l’île, à créer la réserve écologique de l’Île-Brion en 1988.

SENTIR LES ELEMENTS

"C’est une nature très forte, très présente; c’est une rencontre avec tous les éléments, précise Fannie Arsenault de Vert et mer, la seule entreprise à détenir un permis éducatif lui permettant de guider des petits groupes sur le territoire. Ainsi, Fannie et Sébastien, jeune couple à la tête de Vert et mer, offrent deux types d’excursion: une journée complète de randonnée ou un séjour prolongé de quelques jours avec dodo dans une yourte ou en camping.

"Travailler avec un territoire aussi puissant, c’est facile, expose Sébastien Côté. Le show, c’est l’île qui le donne." Inondé par la présence du vent, submergé par l’immensité du golfe, étouffé par les odeurs des centaines de végétaux, surpris par ces vagues qui se fracassent sur les falaises, ébahi par la soixantaine de phoques gris entassés sur des rochers, halluciné par cette plage d’une virginité absolue qui n’en finit plus, on commence, au bout d’un certain temps, à comprendre ce que le pêcheur Mario Deraspe avait dit plus tôt: "Même quand je vais dans le Sud l’hiver, je ne me ressource pas comme ça."

On vit une expérience si collée à la nature sur l’île Brion que c’est encore la mer qui choisit le moment du retour à Grosse-Île. "On peut rester pris, concède Sébastien, mais on n’est jamais mal pris. Très souvent, les gens sont contents de rester une journée ou une nuit de plus."

"Une journée, renchérit Fannie, c’est bien; tu as le temps de bien expérimenter l’île. Mais quand on va coucher à l’île, on a un meilleur contact avec l’environnement."

Vert et mer
633, chemin des Caps à Fatima, Québec
Tél.: 1 866 986-3555
Info: www.vertetmer.com

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Le Bistro du bout du monde
951, route 199 à Havre-Aubert, Îles-de-la-Madeleine, tél.: 418 937-2000
Soir: 100 $

Indéniablement inspiré par la fine cuisine italienne, le chef Luc Jomphe, bien appuyé par sa jeune équipe, met son imagination et son audace au profit des délices locaux. En entrée, les légumes bios et le goûteux maquereau, légèrement poêlé, marquent des points. Les amateurs d’exotisme verront leurs papilles assouvies par de belles pièces de loup-marin (phoque) que l’on ose servir saignantes. Très réussi. Les plus conservateurs trouveront, parmi la demi-douzaine de choix, un risotto (au homard ou autre fraîcheur régionale) mitonné avec doigté. Par contre, bien que les condiments y soient maniés avec soin, l’addition s’avère légèrement salée. Le service est convivial et professionnel et le décor, à la rusticité des cabanes de pêcheurs, est relevé d’oeuvres d’artistes du coin. Par beau temps, le magnifique coucher de soleil maritime baigne l’endroit d’une aura magique.